30 juin 2009

Concours - Festival Eldorado Music Club au Café de la Danse


En association avec le tourneur P-Box et le magazine Eldorado, le Café de la Danse accueillera le 14 et 15 septembre prochain l’Eldorado Music Club Festival. Au programme si vous connaissez un tant soit peu le mag, des membres de l’élite moderne de la folk américaine à l’ancienne.

Le lundi 14 vous aurez droit à rien de moins que Magnolia Electric Co et son magnifique leader Jason Molina venu présenter Josephine son nouvel album. Plus tôt dans la soirée, le groupe texan Bosque Brown emmené par la songwritteuse Marn Lee Miller, et enfin Julien Pras le frenchy que l’on ne présente plus, actuellement en parenthèse solo.

Le mardi 15 ce sera au tour de Steve Earle, vieux brisquard de la country alternative depuis 1980 et plus de 15 albums, précédé par Tiny Vipers, petit protégé de chez Sub Pop au folk dénudé. De quoi ressortir ses chemises à carreaux deux jours durant.

A cette occasion, Dodb vous fait gagner 2 places pour chaque soir. Pour cela il suffit de répondre avant le 15 août à la question suivante :

Quel est le dernier artiste Sub Pop chroniqué sur Dodb ?

et d’envoyer vos réponses à l’adresse contact@desoreillesdansbabylone.com avec l’intitulé "Concours Eldorado" et le soir préféré. Bonne chance à tous.

Réserver la soirée du 14
Réserver la soirée du 15

Pour vous mettre l’eau à la bouche, Steve Earle interprète "Tennessee Blues" :


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The Diff’rent Strokes - This Isn’t It Ep (2001)

Pour le plaisir (et sans aucun rapport avec Herbert Léonard), je tenais à vous présenter le disque le plus anecdotique du monde, qui je suis sûr vous a échappé, à moins que vous soyez 1. Fan hardcore des New-Yorkais 2. Dénicheur professionnel de perles rares. L’objet de cette chronique pour le fun, vous l’aurez compris, c’est ce disque pastiche (vous reprendrez bien un verre ?), sorti la même année que son original, parodiant trait pour trait le premier (et meilleur) album des Strokes.

Partons du pseudo, car c’en est un. The Diff’rent Strokes, si vous avez grandi en VO dans les années 80/90, c’est le titre de la série Arnold et Willy. Un Arnold que l’on retrouve imprimé en face B du disque (oui, certains ont même poussé le vice jusqu’à acheter le vinyle), en ultime hommage à la sitcom. Mais qui se cache derrière ce pseudo ? Personne ne le sait. Sans doute un mystérieux geek (suffisamment bien entouré pour être édité) qui garde son identité masquée depuis. Les spéculations vont bon train : les Strokes eux-mêmes ? Damon Albarn ? Pulp ? Moi ? Et finalement, who cares ?

La pochette, cela ne vous aura pas échappé, est également un détournement de l’originale, fameuse pour sa main gantée. Ici ce sont Playmobils et Légos les héros de l’histoire. Pourquoi ? Parce que le disque est composé de quatre morceaux (seulement) extraits de Is This It ?, remixés à la sauce Casio / drum machine / guitare. Le résultat est un jouissif assemblage instrumental, presque meilleur que l’original.

En face A, "Last nite" et "Hard to explain" repris au Casio, telles d’exotiques covers en mode easy listening. En face B, l’excellent "The modern age" sous forme de morceau disco 80’s fait main, et un "Is this it" au xylophone artificiel. Passé le côté anecdotique de ce disque destiné à rester dans l’ombre et à faire la joie de ceux qui le connaissent, c’est surtout l’occasion de constater à quel point même moquées et dénudées au maximum, les mélodies de Julian Casablancas restent sublimes.

En bref : 4 titres pour collectionneurs (cd ou vinyle), les Strokes comme vous ne les avez jamais vus, réduits à leur plus simple appareil, et pourtant plus efficaces que jamais.




"The modern age" et "Is this it" encodés par mes soins depuis le vinyle :




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26 juin 2009

Wolf Parade - Apologies To Queen Mary (2005)

Pourquoi chroniquer ce disque vieux de quatre ans déjà ? Un peu parce que c’était dommage qu’aucune ligne n’ait encore été consacrée à ce groupe canadien sur Dodb, un peu aussi parce que j’ai toujours voulu le faire, mais que j’hésitais avec celui de 2008, A Mount Zoomer. J’ai bien eu le temps de réfléchir, les écouter encore et encore, et même si le deuxième comprend de très bon morceaux ("Call it a ritual", "California Dreamer"), il n’a pas le même impact que celui-ci. En plein dans la brèche entrouverte par leurs voisins d’Arcade Fire et de Broken Social Scene, le quatuor livrait en 2005 un disque très attendu, grâce à deux Ep en état de grâce justement. Un poids sur les épaules qui n’a pas semblé les avoir gênés, même si Apologies To Queen Mary ne révolutionne rien.

Si l’on peut dire une chose sur ce premier album, c’est qu’il est direct. On n’attend pas longtemps avant que commence la première salve de "You are a runner, I am my father’s son", premier hymne binaire qui remplit l’espace sonore, alors qu’en fait ce n’était qu’une intro à "Modern world", morceau typiquement Wolf Paradien, à l’efficacité épique incontestable. Leurs amis Canadiens cités plus haut n’auraient pas fait mieux. Les voix torturées de Dan Boekner (Handsome Furs) et Spencer Krug (Frog Eyes, Swan Lake) s’intercalent à merveille avec les lignes mélodiques ultra répétitives des morceaux, c’est dit, mais ultra efficaces. Apologies To Queen Mary est résolument pop, et annonce sans honte un nombre de hits à faire pâlir n’importe quelle autre formation.

C’est confirmé sur le titre suivant, "Grounds of divorce", qui sans être mon préféré, contient lui aussi d’agréables synthés enragés, et une mélodie pour le moins accrocheuse. Isaac Brock de Modest Mouse est à la production et ça se sent. C’est également lui qui a fait signer le groupe chez Sub Pop, autre gage de qualité. "We built another world" joue lui aussi sur le l’enchevêtrement guitares / claviers, même si je suis moins touché. Trop de bruit finalement. Heureusement, le monumental "Fancy claps" est en suivant. Certes légèrement bourrin, il illustre à merveille la fuite en avant frénétique de certains morceaux. Qui peut rester de marbre face à l’énergie mise en œuvre ?


Très simple dans les compositions, Wolf Parade se contente d’avancer, et de rendre chaque morceau instantané. C’est ce qui peut déplaire, je le comprends. Tout comme les voix qui peuvent par moment rappeler le moins bon de Clap Your Hands Say Yes !. Mais Wolf Parade sait aussi se poser, sur un "Same ghost every night" flottant au gré des breaks. Mais quand je vous disais qu’il y avait des tubes, c’était vrai. Parce que "Shine a light" est juste derrière, et ne fait pas dans la dentelle non plus. Arlen Thompson et Hadji Bakara complètent le quatuor à coup de cymbales et autres chœurs, le groupe parait en place.

Et alors que je voulais vous épargner l’énumération des douze titres, je ne peux m’empêcher de citer encore une fois le titre suivant, "Dear sons and daughters of hungry ghosts" lui aussi parfait avec ses Alala. Heureusement pour vous, les quatre derniers titres, bien que dans l’esprit, ne méritent pas forcément que je m’attarde dessus. M’enfin, huit sur douze cités à comparaitre c’est déjà pas mal.

En bref : simple piqûre de rappel au cas où vous auriez manqué l’arrivée de Wolf Parade sur le territoire indé, cet album pop/ rock à la beauté baroque instantané, remplit jusqu’à la gueule de morceaux tout bonnement jouissifs.




A lire aussi : Fleet Fowes - S/t (2008)

Le Myspace

"Fancy clap" en clip non officiel, le clip de "Shine a light" et "Modern world" pour finir en beauté :



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25 juin 2009

Blind Man's Colour - Season Dreaming (2009)

Attention gros coup de cœur. Et si je n’ai pas envie de me la jouer découvreur de talent ou annonciateur de hype, je n’ai aucun doute quant au succès qui attend ce duo Floridien encore absent de la sphère web musicale francophone. Découvert par hasard en échangeant quelques mails avec le label Kanine Records responsable entre autres de la réédition vinyle de Horn Of Plenty, premier Lp jusqu’ici rarissime de Grizzly Bear, les BMC’s comme on peut déjà les raccourcir ne sortent pas pour autant de nulle part. Déjà approuvés par Ed Droste et Kanye West (pour ses soirées chill), la paire formée par les jeunes (19 ans !) Kyle Wyss et Orhan Chettri, tout deux copains de fac, est ce qu’il m’a été donné d’entendre de plus original cette année, dans le genre Merriweather like, parce que c’est bien ce dont il est question tout au long de ce premier album d’une maturité déconcertante.

Originaires de St Petersburg, les deux étudiants aidés par Sheridan Willard (le troisième larron) se sont fait connaitre il y a peu en mettant à disposition avec l’accord des intéressés trois covers de Merriweather Post Pavilion. Déjà l’exercice de style bonjour. Comment reprendre des structures si fugaces, si fragiles, dont les limites semblent si vaporeuses, en y ajoutant sa sauce ? Le défi a pourtant été relevé, que dis-je, transcendé tant leurs reprises de "Taste", "In the flowers" et "Brother sport" étaient fantastiques. Le tout bien-sûr, réalisé à l’aide d’un 4 pistes standard customisé au Labtop. Pas de quoi faire siffler les oreilles de Dave Fridmann qui ne devrait pas tarder à jeter son dévolu sur le duo.

Alors certes, on sent des influences. A l’école, c’étaient les Pink Floyd qui tournaient en boucle sur le poste de la chambre universitaire. Maintenant, et comme c’est d’usage, c’est la constellation Animal Collective, Atlas Sound et Grizzly Bear qui doit occuper leurs étagères. Le même son poreux, fluide, effervescent, naïf, intemporel. Pas de mélodie, presque pas de structure, mais un empilage de sons déshumanisés et non identifiables, tous plus étranges les un que les autres, et pourtant si captivants, si hypnotiques. Loin d’être mou ou roboratif, Season Dreaming s’écoute comme un voyage rêveur forcément un peu subaquatique, en apesanteur, entre folk organique et ambiances électroniques. Pour faire court si vous avez aimé Merriweather Post Pavilion, vous adorerez Season Dreaming, à la seule différence près que là où Animal Collective sait maintenant trouver des pseudos gimmicks de mélodies, les BMC’s continuent de la jouer ambiant, sans but, flottant.

Encore que, les trois exceptionnels premiers titres sont là pour fixer le décor. Conçus sans trop de prise de tête non plus autour d’une expérience métaphysique, sous-marine pour "The warm current’s pull", aériene pour "Heavy cloud hustle" et enfin sur la terre ferme pour "The dinosaur ride", soit un enchaînement "fadé" sous forme d’aventure au sein de trois éléments naturels. A l’issu de ces trois titres, les BMC’s ont déjà largement rempli leur contrat. C’est sans compter sur le premier single, "Jimmy Dove" terriblement terrible, tous comme les deux morceaux qui le précèdent. Restent l’excellent "Ghosts" et sa montée de guitare sèche finale, et surtout le Last but not least "Shells", dixième et dernier morceau de dix minutes d’égarement. Impressionnant.

En bref : Je ne sais plus quoi dire tant les BMC’s m’ont convaincu. Sur un seul premier album inattendu ils se hissent sans mal au niveau d’ Animal Collective, à 19 ans seulement et sans aucune faute de goût. Du grand art dont vous auriez tort de vous priver.



Leur blog, leur Myspace et le site de Kanine Records

A lire aussi : Animal Collective - Merriweather Post Pavilion (2009)

En attendant le 18 août, leur premier Ep Rainbow Faces et leurs reprises de MPP sont en téléchargement libre

"Never hope for treasure" (avec un montage amateur génialissime sous LSD), "Jimmy Dove" sans clip et "Wine singer" (avec un magnifique montage de films en 8mm) :



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24 juin 2009

Jazz Liberatorz - Fruit Of The Past (2009)

Plusieurs années avaient été nécessaires aux Jazz Liberatorz pour sortir leur premier opus, Clin d’Oeil, qui fut l’un des meilleurs albums de 2008 pour Dodb. Et c’est seulement un an après que paraît son successeur, dont le seul titre, Fruit Of The Past, indique que Dusty, Madhi et DJ Damage maintiennent leur cap, pour mon plus grand bonheur. Nous voilà donc repartis pour une heure de hip-hop à l’ancienne, de claviers soyeux et de beats boom bap bien fumants, sur lesquels viennent se poser des invités de grande classe, de Fat Lip des Pharcyde à Mos Def, de T. Love à Declaime AKA Dudley Perkins. L’espace réduit entre la sortie des deux disques s’explique par le fait que ce second opus contient pour l’essentiel des titres déjà sortis en 45 tours ou sur des compilations.

Loin de n’être qu’une copie-carbone de Clin d’Oeil, Fruit of the Past réserve une place beaucoup plus importante aux plages instrumentales, avec de nombreux interludes où les samples vocaux disputent la vedette aux cuivres, au vibraphone et aux scratches. Les deux parties de “Music In My Mind” rendent directement hommage aux légendes du hip-hop jazzy en reprenant des boucles de certains des meilleurs morceaux des Pharcyde, De La Soul ou Pete Rock & CL Smooth, tandis que des titres comme “Dark Keys” (avec Olivier M’Selem au Fender Rhodes) ou “Breathing Pleasure” (avec le flûtiste Eric “Rico” Gautier) se placent dans la continuité de la jam-session "Qidar", qui clôturait le premier album.

Les rappeurs invités ont droit à des instrus plus musclées, très connotées East-Coast. On retiendra notamment l’excellent “Back Packers” (featuring Fat Lip) ou le très funky “After Party (Jazz Lib Remix)” avec Wildchild, membre du collectif Lootpack avec Madlib et DJ Romes. Lorgnant davantage vers le R&B, “What’s Real” est certainement le morceau le plus accrocheur et le plus léger, grâce au flow précis d’Aloe Blacc et à un refrain qui rappelle les grandes heures d’Arrested Development. La divine T. Love, collaboratrice régulière du crew, livre quant à elle un superbe “Force Be With You”, où elle mêle comme à son habitude chant soul et scansion rap. Etrangement, le track le moins intéressant vient de l’invité le plus connu, à savoir Mos Def, qui semble ne pas s’être beaucoup foulé pour ce “Mountain Sunlight” bien anodin. Mais peut-être sa présence aidera-t-elle les Jazz Lib’ à se faire remarquer outre-atlantique ?

En bref : Après l’exquis Clin D’Oeil qui nous les avait révélé, les Jazz Lib’ proposent une sorte de rétrospective de leurs sorties vinyles, agrémentée de quelques inédits et remixes. Pas aussi enthousiasmant que leur premier effort, ce fruit du passé reste vivement conseillé aux amateurs de hip-hop jazzy.



Jazz Liberatorz - What’s Real (feat. Aloe Blacc).mp3
Jazz Liberatorz - Back Packers (feat. Fat Lip).mp3
Jazz Liberatorz - Breathing Pleasure (feat. Rico).mp3

Leur Myspace

A lire : Jazz Liberatorz - Clin d'Oeil (2009)

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23 juin 2009

Madness - The Liberty Of Norton Folgate (2009)

Madness, Madness… le genre de groupe auquel on associe forcément un tube ou deux. "One step beyond" et "Our house" pour ne pas tourner autour du pot. Pour le reste, la formation du label Two Tones avec Les Specials par exemple, il faut déjà plus se creuser la tête. Accoudé à jamais à ce renouveau du ska jamaïcain en Angleterre, le septette qui a au moins le mérite de revenir en formation d’origine tente donc un ultime retour après une reformation bâclée en 1992, un Wonderfull qui ne l'était pas tant que ça en 1999 et un album de reprises en 2005 sous le nom The Dangermen Sessions Vol 1. On attend d’ailleurs toujours le volume 2. Et si à première vue tout cela ne dit rien qui vaille, ce serait sous-estimer la joyeuse bande qui revient 30 ans tout pile après l'album One step beyond. Verdict ?

Eh bien il est vachement bien ce nouveau Madness ! Plus sérieusement, j’avais oublié à quel point le registre des seuls blancs de Two Tones est varié, et en fait carrément pop. Au trio traditionnel d’instruments s’ajoutent sans complexe violons, banjo, cuivres, claviers et surtout piano, qui occupe à mon sens les plus belles plages de ce disque. La production théâtrale et festive a même été confiée aux magiciens d’antan, Clive Langer et Alan Winstanley qui - sans supplément guitare - sont parvenus à recréer l’ambiance Londonienne. Parce que oui, je ne l’ai pas encore dit mais The Liberty Of Norton Folgate est une déclaration d’amour à Londres, et plus particulièrement au quartier Norton Folgate réservé aux artistes et aux connaisseurs fin 19ème.

Attention à ne pas se fier à l’intro folklorique, ni au départ du titre "We are London" qui débute sur des Nanana bien faciles, parce que pour le reste, les nombreuses compositions (15 !) de ce disque sont assez recherchées. J’en veux pour preuve le titre éponyme, placé en dernière position, soient 10 minutes de montagnes russes pop parfaitement orchestrées. Heureusement, avant d’en arriver là, d’autres très bons morceaux sortent du panier : le très sixties "Rainbows", tout en orgue, grosse caisse et chœurs, les nostalgiques "That close" et "Sugar and spice" emmenés au piano et à la voix par le caractéristique Graham "Suggs" McPherson.

Bien-sûr il y a le single "Forever young" qui tourne en boucle depuis des semaines, modèle de morceau pop romanesque. Lee Thompson au saxo s’en donne à cœur joie dans le refrain, tout comme Mark Bedford à la basse. Alors que "Dust devil" est une petite ballade reggae ska tranquille, "Clerkenwell polka" invite au folklore urbain. Roda Dakar des Specials y met même du sien sur la splendide "On the town". Et si d’autres titres sont bien plus anecdotiques, il y a suffisamment de force mélodique dans l’ensemble pour passer un excellent moment. Estival, forcément.

En bref : surprenants, les Madness reviennent 30 ans plus tard pour donner du bon temps et rendre hommage à Londres autour de titres finalement très pop, et surtout aux mélodies et arrangements intransigeants.



Le site officiel et le Myspace

A lire aussi : Dub Colossus - A town called Addis (2008)

"The Liberty Of Norton Folgate" agrémenté d’un clip amateur magnifique, fait d’images de films tournés à Londres :

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22 juin 2009

Garden Nef Party 2009, du 17 au 18 juillet 2009


Si vous n’êtes pas encore au courant, le meilleur festival français de musiques actuelles amplifiées se déroule à Angoulême mi-juillet. A l’origine plus connue pour ses bulles, la cité Charentaise s’est forgé une sacrée réputation festivalière en seulement deux éditions. A la pointe de la programmation, l’on a pu y voir des groupes plutôt rares comme Arcade Fire, The Stooges ou encore The Raconteurs. A chaque fois, des souvenirs exceptionnels renforcés par la grande qualité du cadre : la Ferme des Valettes et son incroyable théâtre de verdure.

Cette année encore, Dodb sera présent pour vous raconter ce qu’il s’y passe. Ce sera notamment l’occasion de vérifier l’efficacité sur scène des nouveaux albums des trois "gros" du festival : Franz Ferdinand, Ghinzu et Phoenix, mais aussi de découvrir des nouveaux morceaux de Gossip, Vitalic ou Cold War Kids. Enfin surtout, l’opportunité de voir les trop rares TV On The Radio. A ne manquer sous aucun prétexte.

Le site officiel et le Myspace

A lire aussi : Garden Nef Party 2008 : Jour 1, Jour 2, Garden Nef Party 2007 : Jour 2


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19 juin 2009

Pink Mountaintops - Outside Love (2009)

Stephen McBean a définitivement plus d’un tour dans son sac. Après avoir fait la une l’année dernière avec sa remarquable excroissance psyché rock Black Mountain, le Canadien barbu revient à ses premiers amours, à savoir Pink Mountaintops, version édulcorée de son songwritting. L’ambiance très lourde de In The Future laisse ici sa place à une relecture pop/folk de la musique traditionnelle américaine. Pour l’occasion, l’esthète s’est entouré d’une belle brochette de musicos principalement en provenance de la galaxie Constellation. Les demoiselles Sophie Trudeau de Godspeed You ! Black Emperor, Jesse Sykes de Sweet Hereafter et Ashley Webber de The Organ assurent notamment à tour de rôle le contrepoint vocal féminin avec McBean. Ted Bois de Destroyer est également de la partie, tout comme le batteur Keith Parry qui boucle le collectif plus que le groupe.

Hormis le choix de la pochette à l’eau de rose façon Feux de l’amour, McBean fait preuve sur ce troisième disque (après Axis Of Evol en 2006, et un éponyme en 2004) d’un goût et d’un savoir faire sans faute. Riche et opulent, son Outside Of Love remplit largement son contrat, pourtant à mille lieues de là où on aurait pu l’attendre en suivant In The Future. Le cru 2009 est tranquille, presque lent, mais c’est pour mieux décoller lorsque la troupe s’autorise quelques envolées emphatiques à la Bodies On The Water. Si l’on joue à décortiquer l’alchimie Pink Mountaintops, on constate que la rythmique est souvent pesante, mais que cela ne plombe en rien l’atmosphère principalement construite autour d’harmonies vocales mixtes en chœur, de cordes et de réverbs, ainsi comme le veut le genre d’une touche d’harmonica.


Le deux premiers titres, "Axis : Thrones of love" et "Execution" sont par exemple deux morceaux purement pop. Une batterie métronomique, un mélange de voix, une douce montée qui finit en apothéose. La production n’a rien perdu au moment du changement de nom. Que les montagnes soient noires ou roses, le son est dantesque, et forcément quand elles choisissent le rose, il se fait plus modeste. Les deux titres suivants, "While we were dreaming" et "Vampire" sont deux magnifiques ballades presque gospel, où les cantatrices ici présentes rivalisent de talent pour venir titiller Alela Diane sur son trône. Quant à "Holiday", il se veut plus joyeux et lumineux avec ses violons. A la moitié du disque (dix titres seulement), les Canadiens ont déjà fait le boulot, calmement, mais sûrement.

Le très Spectorien "Come down" prépare le terrain en douceur pour la mélopée folk bouleversante "Outside love". Neil Young est bien entendu à la fête sur ce qui s’avère être un habile mélange de folk, de pop et de rock, et donc d’americana sur "And I thank you". Le paysage sonore embrassé est passionnant, le chant de McBean touchant. A ce moment là ne restent que deux titres à se mettre sous la dent, la voiture balai "Closer to heaven" - tout est dans le titre - qui peut sonner comme du Spiritualized, et surtout "The gayest of sunbeams" qui ne ressemble à aucun autre morceau de l’album, ultra rythmé à la Arcade Fire.

En bref : Même s’il manque un petit quelque chose, Pink Mountaintops est désormais le parfait contre point pop/folk à Black Mountain, soient deux paysages sonores Américains (ok, Canadiens) amples et merveilleux. Quelque chose me dit que Stephen McBean n’a pas fini de nous faire remplir des lignes.




Le Myspace et la chronique de Mlle Eddie

A lire aussi : Black Mountain - In The Future (2008)

Le clip de "Vampire", "While you were dreaming" en version acoustique étouffée et "Closer to heaven" en mode dépouillée :




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16 juin 2009

Patrick Watson - Wooden arms (2009)

Face à la cohorte des pseudo folksingers de mes deux et autres roucouleurs de la bande FM à la con, il fait parfois terriblement du bien de tomber sur un disque tel que celui pondu par Patrick Watson et ses acolytes : précieux, fin et inventif. Pourtant, je dois le dire, je n'avais pas été totalement conquis par leur dernière livraison en date, Close to paradise, qui avait en revanche irradié la presse spécialisée de ses mélopées de piano très maîtrisées. Au demeurant, rasséréné par les participations du chanteur québécois au disque du Cinematic Orchestra (Ma fleur en 2007) puis au EP de Guillaume and the Coutu Dumonts (My main man, pour un scat tout à fait surprenant), c'était plutôt confiant que j'avais tendu mes oreilles bienveillantes vers cette fraîche galette printanière.

Peut-être faut-il le rappeler, derrière le nom de Patrick Watson ne se cache pas seulement un homme mais un groupe. La précision est ici d'importance puisque Wooden Arms – nom dont le band s'est aujourd'hui affublé mais également titre de ce troisième album – donne à découvrir une véritable formation de musiciens. Ce n'est pas seulement ce cher Pat' que l'on écoute mais ce quatuor de Montréalais talentueux et créatifs, adeptes des expérimentations sonores quoique grand fidèle de la pop et de la folk music. Simon Angell à la gratte, Mishka Stein à la basse et le beau gosse Robbie Kuster aux percus pour ceux dont les noms n'affleurent que rarement.



Je me suis donné bien du mal pour trouver un morceau pouvant se détacher du disque et porter haut son étendard. En vain. Constat identique lorsqu'il s'est agi de renier une des dix plages nous transportant successivement d'une confortable balade sentimentale à cordes aux errements mystérieux d'une piste instrumentale imprégnée de rock progressif, en passant par d'incroyables créations pop hautement alimentées en bricolage et bizarreries (bruits d'arbres, de vélo, de casseroles et je ne sais quoi d'autre). La composition est à proprement parler remarquable, les arrangements éblouissants et les variations permanentes. Il serait bien peu de dire que les quatre garçons maîtrisent leur art.

Wooden arms est un disque qui élève. Indéniablement. Pas à la vitesse grand V, mais progressivement. Vous enveloppant peu à peu de sa réconfortante lenteur et de ses constantes caresses mélodiques, souvent soutenues par un jeu de cordes très classieux. « Down at the beach » avec ses touches de piano d'inspiration classique, sa harpe enchanteresse et ses déluges intermittents de percussions est une pièce totalement envoûtante et atterrante. On pourrait en dire autant de « Tracy's water » et ses merveilleuses rivières de violons, de « Beijing » et son piano baladin ou encore de « Bird in a small cage » exécutée en compagnie de Katie Moore et d'un banjo mutin. Watson et ses potes nous offre simplement un rêve de pop éveillé, sybillin et pénétrant. Certes, il en aurait fallu peut-être un peu plus pour faire de ce disque une grande oeuvre. A défaut, on se réjouira de trouver en ces quatre garçons une des nouvelles valeurs sûres en provenance du Québec. Une de plus.

En bref : entre expérimentations sonores et compositions plus classiques, Patrick Watson et sa bande signent un disque de folk en apesanteur, lent et vaporeux. Un modèle de raffinement et de maîtrise.




Le myspace et le site web de Patrick Watson

A lire aussi : Patrick Watson – Close to Paradise (2006)

Le clip de « Fireweed » :


L'album en streaming :


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13 juin 2009

Phoenix - Wolfgang Amadeus Phoenix (2009)

4ème album des Versaillais, lancé en grandes pompes il y a quelques semaines : ce titre faussement emphatique, la promo sous forme de ballons gonflables... Et peut-être bien son meilleur. Le groupe emmené par Thomas Mars, habile chanteur qui manie plutôt bien la langue de Shakespeare, s'affirme de plus en plus comme l'un des groupes de la colonie versaillaise ou cristolienne sur lesquels compter, nos alternatives crédibles à l'éternelle hégémonie anglo-saxonne. Air avait montré la voie il y a une décennie, et depuis les Justice, Scenario Rock, Chateau Marmont, voire Poni Hoax, sans oublier les impayables et précieux Fancy, n'ont eu de cesse de tracer un nouvel axe francilien et banlieusard, qui devrait vite être pris très au sérieux par la concurrence étrangère. Et qui est sans commune mesure avec la prétendue nouvelle scène rock boutonneuse de Paname.

Phoenix, avec ses airs de ne pas y toucher, est un groupe qui fait son chemin, s'exporte très bien, et à qui on doit ce son classe un peu lounge, cette pop à la coule, bien exécutée, bien interprétée, efficace.

Ca commence avec "Lisztomania" : Franz après Amadeus, rien que de très normal ! En fait, ce qui frappe d'entrée, c'est ce mimétisme de plus en plus affirmé entre les timbres de Thomas Mars et celui de Kevin Barnes, monsieur Of Montreal en chef. Mais un Of Montreal candide, moins tordu, et qui surtout se montrerait euh... beaucoup plus abordable dans le format chanson. Candide, impavide mais inspiré, le chant ici s'accomode parfaitement de la pop langoureuse et lunaire qui l'enrobe. Peut-être moins rythmé que les précédents disques, WAM offre néanmoins de véritables petits bijoux tels que ne les renierait pas un certain Sean O'Hagan, l'homme à tout faire des High Llamas, ("1901", "Rome").

Sur la groovy "Fences" se croisent pèle-mèle, outre les rythmes chaloupés de Of Montreal, ceux de Fugu, autre trop rare orfèvre pop lorrain, drivé par l' "autre" Mehdi. Mais plusieurs plages vont même jusqu'à évoquer le Polnareff des grandes années, ce falsetto, les basses soyeuses, si le génie reclus avait troqué ses arrangements de cordes et d'orgues d'église contre l'habillage lounge poppy qui sied si bien à Phoenix !

Mais le morceau le plus surprenant demeure sans conteste ce "Love Like A Sunset" , un peu plus long que les autres, car conviant à une intro et à un break presque Kraut, où affleurent aussi le souvenir des ex-maîtres du post-rock, les Tortoise, Ui ou autres Mogwai. Tout ceci donne une première face impeccable, de celles qui feront date en 2009.

Alors, on peut sans doute regretter que le feeling, le son fluide, l'interprétation racée ne résistent pas à une deuxième moitié d'album certes jamais désagréable, mais un peu plus anecdotique. Les quatre, cinq derniers titres se ressemblent un peu tous, et un ronron finit par instants par s'installer !

Il n'empêche : pour les promesses déjà affichées, pour cette particularité "à la française" dans la production, et ce son presque immédiatement identifiable, on redemande du Phoenix, et perso, on coche déjà les dates automnales à venir dans le sud-est, et plus particulièrement celle du mois d'octobre au Rockstore de Montpellier, l'une des très nombreuses étapes d'une tournée d'importance !

En bref : au gré des années et des albums, Phoenix se crée un son. Et ajoute une nouvelle pierre angulaire à la galaxie des groupes de la région parisienne à dimension internationale. Ne manquent  que quelques chansons marquantes de plus pour faire de WAP, le sans-faute auquel le groupe doit pouvoir prétendre.



Le site et le Myspace.
A lire aussi : Of Montreal - Coquelicot Asleep In The Poppies : A Variety Of Whimsical Verse (2001)


"Love Like A Sunset Parts 1&2"



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12 juin 2009

The Horrors - Primary Colours (2009)

Au départ, on pouvait être sceptique : le nom du groupe (même s'ils réhabilitent les noms en "the"), les pseudos crétins façon Hives de ses membres, le garage rock poussif et crade de Strange House (2007), ce côté next big thing du pauvre, ce vilain look corbak, tout çela fait beaucoup niveau hype.  En plus, ils n'étaient même pas américains, (plus grave, ils étaient anglais !), n'avaient même pas eu l'idée de se faire produire à Brooklyn par David Sitek, mais au contraire le nouveau disque portait la griffe de ce frêle geek de Geoff Barrow ; fallait-il en jeter encore ?

 On les disait pourtant érudits, et puis il y avait cette pochette énigmatique jouant sur un flou lysergique façon Pornography des Cure, qui allait aussi faire la différence. Disons le d'emblée : Primary Colours ne révolutionne rien. On s'attend même au pire quand, après une très courte intro de "Mirror's Image" - mais tout dans ce disque est affaire de miroirs déformants - on se trouve à piétiner les plates-bandes d'un groupe de pop héroïque tel que pouvait l'être The Opposition, ceci dit pour la datation carbone. Encore faut-il y rajouter ce ressac de guitare obsédant qui noyé sous la reverb et ce son de vibrato typiquement My Bloody Valentine rend le morceau intriguant, à défaut de mémorable. Mais dès "Three Decades", et dans une ambiance de train fantôme dévalant au milieu d'un palais des horreurs (pas fait exprès!), Faris Rotter emmène son groupe assez haut en transcendant son timbre sépulcral, à mi-chemin entre celui de Ian Curtis et celui de Dave Vanian. Le frontman des Damned est également particulièrement suggéré sur la funèbre et trippante "I Only Think Of You". Intro de guitare Killingjokienne sur l'infernal "New Ice Age", mené tambour battant, et qui revient aux premières obsessions garage du groupe. Une basse Joydivisionesque façon "Love Will Tear Us Apart" ouvre un "Scarlet Fields" qui encore une fois, roule des pelles au groupe de Kevin Shields. Tandis que "Do You Remember" rend un hommage appuyé aux groupes majeurs de la cold wave, évoquant la morgue juvénile des séminaux Jesus And Mary Chain,"I Can't Control Myself" aurait fait un excellent single növö punk, avec cette touche de Farfisa aigrelet qui convoque l'esprit des Stranglers. "Sea Within A Sea", le curieux morceau qui cloture ce disque très probant oscille entre pop Stranglersienne et kraut ; en témoignent cette longue intro que n'aurait pas désavoué Julian Cope, et cet orgue Lowrey tout en boucles oscillantes. 

A l'arrivée, un album plutôt homogène auquel certains mauvais coucheurs auront reproché la longueur des morceaux : curieux  pour une oeuvre de 45' qui va à l'essentiel sur ses 10 morceaux, reprenant en cela des canons plus crédibles en terme de durée d'un disque. The Horrors, c'est surtout un groupe qui, au-delà de son premier vrai galop d'essai d'envergure, donne furieusement envie d'être visité live. 
Et c'est aussi un combo qui, sans rien inventer, parvient assez facilement à dépasser ses (nombreux) inspirateurs. On suivra avec intérêt la suite de leurs exploits.

En bref : auteurs d'un disque à la production encore garage et caverneuse, mais aux chansons plus ambitieuses, les Horrors réussissent un digest assez pertinent de leurs influences musicales. Et deviennent accessoirement l'un des (très) rares groupes anglais dont on va suivre avec intérêt la progression.



Le site et le Myspace (qui offre l'album en streaming)

"New Ice Age" :

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PJ Harvey & John Parish - A Woman A Man Walked By (2009)

Le précédent album de Polly Jean White Chalk était un album enchanteur, et unique dans l'oeuvre de la native du Dorset, puisque entièrement composé au piano. L'album n'a sans doute pas eu l'écho qu'il méritait, et est sans doute perçu comme une parenthèse dans l'oeuvre protéiforme de la belle, habituée il est vrai, à passer d'un style à l'autre, au gré des livraisons de ses LP's.

 Ici, retour à l'électricité si chère à notre harpie préférée, la "nouveauté" étant si l'on peut dire, que ce 9ème opus (hors compiles), est le deuxième signé à 4 mains, dont celles du fidèle compagnon d'armes, j'ai nommé John Parish, avec qui avait déjà été signé l'excellent Dance Hall At Louse Point (1996). De toute façon, le guitariste, qui fait un peu aussi office de mentor de la dame, n'est jamais très loin. Musiques pour monsieur, paroles pour madame, qui avait annoncé vouloir faire sonner sa voix aux antipodes selon les morceaux : ainsi de la voix autoproclamée de petite fille faussement candide sur les magnifiques "Leaving California" ou "The Soldier" qui ne sont d'ailleurs pas sans rappeler les meilleures plages de White Chalk, à la voix de vieille sorcière boutonneuse de "April", il n'y a qu'un pas.

 Pour le reste, PJ Harvey, qui s'affirme de manière éclatante comme une chanteuse majeure de son temps, fait souffler le chaud et le froid sur un album, à l'évidence loin d'être son meilleur, et qu'on eût aimé moins décousu, moins "compile" de ses humeurs. C'était un peu déjà le cas sur la précédente collaboration avec Parish, mais Dance Hall... avait au moins le mérite d'une inspiration plus homogène, et sans doute d'une production "à l'os", sans doute moins clinquante, mais plus humble. Alors, c'est vrai que le "Black Hearted Love" qui ouvre le disque et sans doute destiné à devenir un single roboratif, en fout plein les yeux, par son côté brûlot vengeur tout de noirceur romantique mais... on s'ennuie ferme sur certaines plages où PJ singe un Nick Cave au féminin sur les bordéleux "Sixteen, Fifteen, Fourteen", "Pig Will Not", ou sur le titre éponyme. Le blues ne sied certes plus trop à la dame.

 Par moment, cet album rappelle même le pire album de l'anglaise, ce Is This Desire ? (1998), bêtement saturé et rentre-dedans ; ailleurs, l'auditeur est confronté à de très beaux moments. Avec une voix dont les accents épousent de plus en plus ceux d'une Siouxsie Sioux passée maîtresse dans l'art du lyrique, l'indomptable PJ livre un disque trop rapproché par rapport au précédent, et condamné à errer à l'ombre du firmament de celui-ci. Malgré tout, la dame pond un album, et on achète par pur atavisme ; c'est comme ça. Au milieu, se glissent c'est vrai, quelques chefs-d'oeuvre.

En bref : un nouveau disque en demi-teinte, qui alterne grands moments et plages très anecdotiques. Pas un disque important ni même de transition, simplement une oeuvre mineure pour une artiste au sommet de son art vocal.




La video de "Black Hearted Love"

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Danger Mouse And Sparklehorse - Dark Night Of The Soul (2009)

Au lendemain du rejet constitutionnel d’Hadopi, Dark Night Of The Soul est un sacré pied de nez à l’industrie musicale, ou un coup marketing certain, à voir. Toujours est-il qu’après les tentatives Radiohead et autres Raconteurs de sortir des circuits classiques de distribution, le génial producteur Brian Burton et le génial songwritteur Mark Linkous tapent un grand coup dans la fourmilière en proposant d’acheter leur cd-r (vierge donc), de télécharger le disque sur internet (ici par exemple) et de se le graver soi-même. C’est quand même gonflé ! Ca va que le fameux cd est accompagné d’un livre de photos de 100 pages réalisé par le troisième larron de la farce, j’ai nommé Monsieur David Lynch. EMI n’avait qu’à mieux se tenir. Ajoutez à cela le côté mystérieux du projet annoncé le 1er avril dernier et surtout la myriade d’invités présents, susceptible de faire se pâmer n’importe quel fan de musique indé des années 90 et vous obtenez là un disque déjà qualifié de "maudit" voir de "lost album" puisque finalement non disponible dans les bacs. Tout ça est très intéressant mais le reste suit-il ?

Bon dieu oui, mille fois oui ! Eh c’est assez vite indéniable. Largement supérieur à la compilation presque homonyme Dark Was The Night qui réunissait déjà une liste pharaonique de guests, cette collection de 13 titres écrits à quatre mains est magistrale. Si le projet aurait pu s’appeler Dangerhorse ou Sparklemouse, c’est la patte Linkous que l’on retrouve le plus dans l’écriture déprimée et bricolée, Burton se chargeant lui de saturer ces mélodies pas très propres. Quant à Lynch, il est plus difficile d’observer sa participation, si ce n’est dans l’esprit, les visuels bien entendu, et surtout l’exposition qui a eu lieu à L.A. sur le sujet. Peut-être également sur le thème général de l’album, concept au possible, sur les écrits religieux d’un certain Jean De La Croix au 17ème siècle sous le nom La nuit obscure de l’âme.

Linkous et Burton avaient déjà collaboré en 2006 sur quelques morceaux de l’excellent Dream For Light Years In The Belly Of A Mountain (avec Dave Fridmann tiens-donc, et Steve Drozd des Flaming Lips). Linkous, artiste difficile et sombre s’il en est, avait beaucoup apprécié The Grey Album de Danger Mouse avec Jay-Z, par ailleurs excellent lui aussi. Le résultat, que je vais vous décrire en détail, est un album étrange, à la multiplicité des genres (allez, citons quand même Mercury Rev et les premiers Death In Vegas comme ressemblances) et surtout très varié dans l’interprétation puisque chaque titre est interprété par un chanteur différent, accompagné ou non par Sparklehorse.

L’album est donc divisé en quatre parties va-t-on dire. Les trois premiers morceaux, dans un registre psyché et délicat. Les trois suivants, plus rock. Les quatre suivants, qui retournent à la pop psyché nonchalante. Et enfin les deux derniers franchement plus sombres. Dire que chaque partie contient son lot de chef-d’œuvre est un euphémisme, et il est amusant de constater en parcourant la presse comme chacun tient son titre favori, qui n’est jamais le même. Il y en a pour tous les goûts, vraiment.


Ca commence très fort avec le formidable "Revenge" par Wayne Coyne himself. Qui mieux que lui pouvait porter ce morceau qui s’illumine à 1’15" ? C’est entre le Flaming Lips et le Sparklehorse et c’est magnifique. En suivant, Gruff Rhys des Super Furry Animals est entre le fuzzy et le country sur ce "Just war" encore une fois parfait. Dernier arrivé du premier tiercé, et peut-être le meilleur, Jason Lytle de Grandaddy interprète "Jaykub", et il ya tout ce qu’il faut.

Et là lorsque l’on croit que tout est fini, que l’on pense les meilleurs morceaux passés, sans prévenir, on se prend la monumentale claque "Little girl" qui refuse de sortir de ma tête depuis des semaines (Nova n’aide pas non plus). Morceau majeur de cette année auquel Julian Casablancas des Srokes donne tout. Il y a même un solo à 2’ qui me fait hérisser les poils. 4’35" de pur frisson, où l’on ne sait si l’on doit être triste ou gai. C’est dur de se remettre et pourtant "Angel’s heart" par Black Francis des Pixies fait bien le boulot. Beaucoup plus rock et rentre-dedans que tout ce qui précède, c’est un très bon morceau. Pas le temps de se relever non plus qu’Iggy Pop nous arrive avec son meilleur morceau depuis longtemps. Sur "Pain" il apparait crépusculaire au possible, sur un titre qui tient la route. Sur ces six premiers jets, croyez-moi, rien n’est à jeter.

David Lynch en personne se charge du très bel interlude "Star eyes", avant de prendre en pleine face la complainte "Everytime I’m with you" par Jason Lytle encore. Peut-être l’un de ses plus beaux morceaux. "Insane lullaby" par James Mercer des Shins prend le relai et encore une fois c’est somptueux. La délicatesse de la mélodie et des arrangements noyés dans des bruits de fond noisy, c’est du Sparklehorse tout cuit, à la sauce Shins, parfait ! Linkous prend enfin le micro sur le morceau suivant qu’il partage avec Nina Persson des Cardigans. Ce "Daddy’s gone" sonne très Beatles, et c’est très bien. Suzanne Vega (bin voyons) enchaîne sur un "The man who played God" tout à fait dans le jus.

A ce stade il n’y a plus qu’à laisser Vic Chesnutt s’escrimer sur un "Grim Augury" un poil moins convaincant que le reste, et David Lynch de boucler la boucle sur le titre éponyme, noyé sous les réverbs et autres effets d’usure.

En bref : Impressionnant! Pour un disque qui n’aurait jamais du sortir, c’est un miracle. Mis de côté l’anecdote marketing du projet, on se retrouve en face de 13 morceaux écrits par un génie, produits par un génie, mis en images par un génie et interprétés par onze génies. 13 (ou douze) incontournables de la musique indé contemporaine.




Le site officiel du projet, celui de Sparklehorse et celui de Danger Mouse

L’album en téléchargement et l’album en streaming

"Little girl" par Julian Casablancas et "Revenge" par Wayne Coyne :







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Concours - Pets, vinyles et T-shirts à gagner


La bande d’April 77 semble vraiment avoir du goût. Après la découverte The Bewitched Hands On The Top Of Our Heads, ils nous reviennent avec un quatuor suédois tout simplement parfait. Pets, c’est donc Jonas Olsson à la voix, et Per Zetterquist, Jonas Linngård et Kristin Träff aux divers instruments. Définir leur univers est assez simple : de la pure pop ensoleillée, entre indie, surf et soul, pour moi un mélange de Kinks (leur plus grande influence) et des moins cités The Foundations dans la manière d’agencer le son Brit pop à la sauce Motown.

A cette occasion, Dodb s’associe à April 77 et vous propose de gagner 2 vinyles et 2 T-shirts du groupe (avec single digital inclus). Pour cela, il suffit de répondre à la question suivante :

Quel a été le dernier groupe suédois chroniqué sur Dodb ?

et d’envoyer votre réponse avant le 12 juillet à contact@desoreillesdansbabylone.com avec l’intitulé de message "Concours Pets" et accessoirement votre lot préféré. Bonne chance à tous.



Pets - Giving Up’s The Hardest Thing (4 tracks maxi single)
Side one : "Giving up’s the hardest thing" / "Rooftops"
Side two : "Setting trends" / "Don’t you say your heart’s broken (we know it’s not)"

Les Myspace de Pets et d’April 77

Leur premier single "A good day for telling lies" :


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11 juin 2009

Pajo - Scream With Me (2009)

Scream With Me n’est pas un nouvel album de David Pajo, mais une sorte de parenthèse dans son très vaste catalogue. Enregistré en 2004 mais publié seulement aujourd’hui, l’EP pressé à 1000 exemplaires est un hommage à ses premières amours musicales, puisqu’il contient exclusivement des reprises acoustiques très lo-fi des Misfits, son groupe préféré lorsqu’il flirtait avec le punk dans les bars de Louisville, Kentucky. Ceux qui ne connaissent que ses remarquables productions sous les pseudos Papa M ou Aerial M seraient bien avisés de regarder un peu plus en arrière dans sa carrière, et notamment les disques réalisés avec Slint, pour mieux comprendre ce qui lie le songwriter au groupe horrifique du Dr. Glenn Danzig. Ou de jeter une oreille à ses travaux trash-métal récents au sein de Deadchild.

Oubliez donc la luxuriance et la complexité des arrangements de Whatever, Mortal (2001) et de ses relents dylaniens. D'un minimalisme total, Scream With Me a été enregistré avec trois bout de ficelles (ou plutôt six cordes) et un magnétophone, comme en témoigne la rudesse du son. Les chansons des Misfits se basent le plus souvent sur trois accords, et ne comptez pas sur Pajo pour en rajouter, même s’il lui arrive de souligner les harmonies avec des arpèges. Comme sur tous les disques de covers réussis - je pense par exemple au Covers Record de Cat Power, les originaux sont méconnaissables, à l’image de “Hybrid Moments” (ma chanson préférée des Misfits), que Papa M s’approprie au point de la faire ressembler à certaines de ses propres chansons (“Flashlight Tornado”, par exemple).

L’autre grand bonheur de cet EP réside dans le contraste entre la douceur de la guitare, associée à la voix angélique de Pajo, et les paroles complètement trash des Misfits. Avec son air de ne pas y toucher, il me fait bien marrer à fredonner “Bullet”, une sorte de délire graveleux sur l’assassinat de Kennedy, et notamment ces lignes d’une remarquable délicatesse, adressées à la veuve du président : “The dirts gonna be your dessert / My cum be your life source / And the only way to get it / Is to suck or fuck / Or be poor and devoid / And masturbate me, masturbate me / Then slurp it from your palm / Like a dry desert soaking up rain”. Difficile d’aller plus loin dans l’irrévérence !

En bref : David Pajo rend hommage au groupe préféré de son adolescence, les Misfits, avec cette série de covers acoustiques dépouillées, enregistrées à l’arrache. De quoi patienter jusqu’au nouvel album du prodige.



Pajo - Bullet.mp3
Pajo - Hybrid Moments.mp3

A lire aussi : Papa M - Whatever, Mortal (2001)

Le site, le blog et le Myspace de David Pajo
Le site du label Black Tent Press.



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10 juin 2009

Peter Bjorn and John - Living Thing (2009)

Étrange, étrange. Deux mois après la sortie de Living Thing, il semblerait que l'explosion prévue n'ait pas eu lieu. Pourtant ce nouvel album de Peter Bjorn & John n'est tout de même pas un pétard mouillé. Souvenez-vous il y a plusieurs mois je m'enflammais pour "Lay it Down," petite bombe pop à la mèche savamment allumée. Le marketing sur le web est un jeu de piste bien plus drôle que les affiches de métro, et le trio avait su s'en amuser, en postant, à quelques semaines d'intervalle, deux vidéos hilarantes au milieu de nulle part. Ces deux premiers extraits, "Lay it Down" et "Nothing to Worry About," n'auraient pas tant attisé les braises, s'il n'étaient pas ces popsongs jouissives et renversantes, avec lesquels nos suédois jouent aux sales gosses du premier rang, ceux à qui ont ne peut que donner des bonnes notes.

Et le reste est d'une intelligence indéniable. L'écriture est toujours aussi pop, mais le trio assène leurs sons comme les orateurs des traits d'esprits. Le résultat ne ressemble à pas grand-chose de connu, si ce n'est les productions les plus pop de Pharrell Williams peut-être, pour Kelis ou Gwen Stefani... avec plus de finesse et de malice. Percussions, voix et claviers sont les principaux matériaux de production. Minimalisme et lignes claires les seuls mots d'ordre. Soyons radicaux! Comme l'an passé avec l'album de Lykke Li, Björn Ytlling fait d'un album pop un objet plastique au design extrêmement soigné. Celui de son groupe est seulement moins rond, plus anguleux et acéré que celui de sa protégée.

J'avais lu l'album précédent Seaside Rock comme une petite pause ludique, au cours de laquelle le trio s'amusait avec ce qu'ils savent faire, sans hésiter à s'éloigner de la pop façon Peter Bjorn and John, ou des canons de la pop suédoise, ce qui revient au même. C'est drôle comme Peter Bjorn and John ont accompagné l'évolution de la pop suédoise au cours de cette décennie. Leurs premiers albums étaient encore emprunts des guitares et des mélodies sucrées des années 90, celles de la pop des Cardigans ou des Wannadies. En 2006, le parfait Writer's Block était alors le meilleur représentant d'une nouvelle « suédicité » : écriture parfaite, production parfaite, popsongs où la mélancolie se dissimule sous la joie.

Aujourd'hui, Peter Bjorn and John joue de la mutation électronique de la pop nationale. Au lieu d'user de clavier denses et de belles voix comme Kleerup, ils rabotent, avec une précision incroyable, le son jusqu'au squelette. Ce squelette pourrait alors être emprunté à la danse macabre de la vidéo d'"Around The World" de Daft Punk, tant le son (et le travail qu'il cache) est impressionnant, et tant il amuse la galerie. Et pourtant,... je suis déçu. Writer's Block, l'album du succès, malgré une forme plus convenue, reste au-dessus. Parce que l'intérêt des blagues, même les plus longues, est toujours trop court. Et les quelques « ballades » de Living Thing (même la délicieuse petite pièce de "Blue Period Picasso") n'arrivent pas à atteindre l'émouvante beauté des mélodies de Writer's Block, comme si ce nouveau son restait imperméable à l'émotion. « It's a living thing! It's a living thing! » Saluons tout de même l'audace, le meilleur des moteurs.

En bref : après le succès du beau Writer's Block, Peter Bjorn and John continuent de céder à l'amusement ; et ils ont bien assez d'intelligence et de maîtrise pour en faire une œuvre pertinente d'electropop ultra précise, à travers laquelle bien peu d'émotion passe malheureusement.




Myspace et site officiel.

Le nouveau single "It don't move me":


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09 juin 2009

Eels - Hombre Lobo, 12 Songs Of Desire (2009)

Un nouveau disque de Eels est toujours un événement en soi. D’abord parce que l’artiste mène son petit bonhomme de chemin depuis 1995 de manière assez irréprochable - c’est le fan qui parle - et ensuite parce que cela fait quatre ans que l’on attend le successeur du chef d’œuvre (sisi) Blinking Lights And Other Revelations, double album à l’inspiration sans fond, injustement oublié, pas assez programmé. Mark Oliver Everett, plus simplement E, est devenu depuis tout ce temps un frère dont on connait les défauts et qualités. Si dans le fond, le Californien barbu s’amuse à explorer les genres (un Souljacker électrique en 2001, un Shootenanny! folk pop en 2003), c’est pour nous resservir à chaque fois la même forme : voix éraillée caverneuse, basse à la Macca et caisse claire sur-étouffée. C’est grosso modo ce style Eels qui ne change pas d’un chouïa sur Hombre Lobo.

Enregistré dans ses propres studios californiens avec Kool G Murder (basse, clavier, guitare) et Knuckles (batterie, percussions), ce septième effort qui emprunte son graphisme à une célèbre marque de cigare (Cohiba) est en fait un autre de ces pseudos concept albums, sur les aspirations et frustrations du personnage Dog Faced Boy de Souljacker. C’est de lui que l’on parle dès le premier titre "Prizefighter" qui commence assez sec et avec du rythme, "Come on baby take a walk with me", le ton est donné. Un peu plus tard vous l’aurez compris, ce Dog Faced Boy lâchera la partie animale qui est en lui et deviendra loup, aux dépends de son côté humain. Le rêve, être dans la peau d’un autre, l’animal, des thèmes très Eelsiens qui nous sont ressassés avec plus ou moins de brio depuis Beautiful Freak.

C’est le gros reproche que je ferais à ce dernier opus. Autant on y rentre vite, très vite même, les premières écoutes sont impressionnantes de facilité. Autant on s’en lasse vite, et on ressort ses prédécesseurs. Trop facile ce Hombre Lobo ? Peut-être. Déjà dans la structure du disque on ne peut pas faire plus simple, c’est une ballade / un morceau rock, une ballade / un morceau rock… Cet ordre est uniquement perturbé par la ballade "All the beautiful things" qui suit… la ballade "My timing is off". Les morceaux rock sont donc "Lila breeze", "Tremendous dynamite" et "What’s a fella gotta do", agréables mais somme toute assez classiques. Pour les comptines folk il fait compter sur "That look you give that guy", judicieusement choisie comme premier single avec l’étrange et inclassable "Fresh blood", mai aussi les moins bons "In my dreams" et "The longing". Seule la presque ska "Beginner’s luck" arrive encore à m’enthousiasmer après plusieurs écoutes. On aurait aimé mieux.

En bref : Davantage collection d’agréables B-sides que véritable nouvel album, Hombre Lobo est un disque moyennement inspiré dont personne n’aurait parlé s’il n’avait été de ce génie incontesté qu’est Mr E. Et ce dernier nous avait habitués à mieux. Sans rancune.




Le site officiel et le Myspace

A lire aussi : Eels - Concert à La Cigale

"Prizefighter" en enregistrement, l’un des meilleurs morceaux de l’album :

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07 juin 2009

Lee Fields & The Expressions - My World (2009)

Ce n’est pas parce que Lee Fields a participé à l’enregistrement de plusieurs titres du gentil DJ de variété Martin Solveig que nous devons déconsidérer le travail de cet incroyable chanteur, dont la carrière débuta en 1969. Ce natif de Caroline du Nord, souvent désigné comme le James Brown underground, n’a jamais eu la chance d’être signé par Motown ou Stax et d’atteindre le niveau de reconnaissance d’un Al Green ou d’un Donny Hathaway. Et même si ses 45 tours de l’époque sont aujourd’hui très recherchés par les collectionneurs, il lui faudra attendre les années 1990 et le revival soul pour revenir sur le devant de la scène, après une longue traversée du désert, grâce à certains des labels soul/funk new yorkais les plus intéressants, comme Truth & Soul, propriété de Jeff Silverman et Leon Michels, qui publie ce nouvel album.

Sans vouloir donner dans la surenchère, My World est tout simplement le meilleur album soul entendu depuis des années. The Expressions forment un backing-band idéal, composé de musiciens pour le moins chevronnés, collaborateurs, entre autres, de TV On The Radio, Sharon Jones, Amy Winehouse ou The Dap Kings. Très influencé par la scène de Philadelphie, leur son contient d’égales doses de soul orchestrale à la MFSB, de choeurs chatoyants à la Delfonics ou Stylistics, mais aussi d’éléments plus actuels, notamment des rythmiques proches du hip-hop. Pas étonnant quand on sait que le producteur de l’album, Leon Michels, a récemment commis un disque de reprises du premier album du Wu Tang Clan (Enter The 37th Chamber, par El Michels Affair... chaudement recommandé). My World n’est donc pas seulement un album adressé aux nostalgiques du son des 60s et 70s : il a également le potentiel pour séduire les fans de nu-soul façon Raphael Saadiq ou D’Angelo.

Cette mixture entre le vieux et le nouveau son soul est particulièrement palpable sur le morceau-titre, au beat sec et lourd assorti de cordes et de vibraphone - la version digitale propose justement un remix sur lequel le rappeur californien Aloe Blacc vient poser son flow. Il est par ailleurs assez difficile d’isoler un morceau des autres : ils sont tous excellents ! Comme sur les meilleurs disques de James brown, Lee Fields enchaîne ballades enivrantes et brûlots funky, romance et dénonciation sociale. La voix et même le physique du chanteur ressemblent à tel point à ceux du Godfather Of Soul que l’on est parfois amené à croire que celui-ci n’est pas mort, ayant juste changé d’identité pour plus de tranquillité. Même timbre éraillé, même puissance vocale, ou presque : la comparaison est inévitable, mais pas dommageable au vétéran, qui reprend régulièrement “Get On The Good Foot” ou “It’s A Man’s World” sur scène (voir vidéo).

De l’irrésistible riff acoustique de “Ladies” aux violons tragiques de “Money I$ A King”, tout est ici semblable à du miel - que dis-je ? - à de l’ambroisie. La reprise de “My World Is Empty Without You” des Supremes, hit Motown composé par la dream team Holland-Dozier-Holland, est ahurissante de fraîcheur et de douceur, avec sa guitare teintée de bossa-nova et la voix brûlante et désespérée de Lee. Les plages instrumentales, orientées deep-funk, sont tout aussi exaltantes - avec une mention spéciale au trompettiste pour son solo sur “Expressions Theme”. Mais pourquoi s’essouffler à vous décrire chaque titre ? My World est un disque fantastique, à acheter les yeux fermés.

En bref : Lee Fields n'est pas qu’un ersatz de James Brown, comme le prouve ce bijou de soul vintage mâtiné d’une légère touche de hip-hop. Impérial.



Lee Fields - Do You Love Me (Like You Say You Do).mp3
Lee Fields - My World.mp3

A lire aussi : Nicole Willis & The Soul Investigators - Keep Reachin’ Up (2006)

Le Myspace de Lee Fields
Le site et le Myspace de Truth & Soul Records

Les répétitions de “Ladies”


Un bout de “It’s A Man’s World” par Lee Fields


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05 juin 2009

The Jesus Lizard - Concert à Paris (27 mai 2009)


Ce fut un trés grand concert, à la hauteur de la réputation live d'un groupe nineties qui ne s'était pas produit à Paris depuis onze ans, et qui avait annoncé récemment sa reformation. Ce fut une expérience, et je suis content d'avoir vu ça une fois dans ma vie. La Grande Halle de la Villette est pleine à craquer, ce soir du 27 mai 2009, pour voir l'un des groupes les plus talentueux du hardcore américain, et surtout David Yow, son chanteur, à la démesure légendaire. Mais histoire de faire durer un peu le suspens, et de rigoler, parlons un peu des deux bouses antécédentes que les programmateurs du festival Villette Sonique ont cru bon de devoir nous infliger.

Passons trés vite sur le premier groupe, car du néant on ne peut parler. Man without Pants. Si quelqu'un peut m'expliquer l'intérêt de ce qu'ils font, je suis preneur.

Deuxième groupe : Sunn O))). Attention, tout est dans le O))), vous allez comprendre pourquoi. Après un quart d'heure de marmonnements lugubres vaguement grégoriens, puis un autre quart d'heure d'orgue d'église, deux types déguisés en pénitents entrent sur scène avec chacun une guitare, et, derrière eux, un mur énorme d'amplis. «Fais gaffe, c'est pas comme pour Motörhead, ils sont tous allumés », me dit mon voisin. J'ai juste le temps de sortir mes bouchons d'oreilles, que je prend en pleine poire une onde sismique gigantesque, genre O))): j'ai mal aux cheveux, aux dents, partout. Aucune rythmique, juste deux guitares qui égrainent très lentement quelques notes bourdonnantes, en boucle, sur de longues minutes, à un volume sonore hallucinant. «Un expérience physique extrême et radicale». En effet, encore faut-il préciser «de torture». J'ai tenu un quart d'heure. La moitié de la salle se barre.

On les aura mérité les Jesus Lizard ! La tension est palpable dans la fosse, qui s'est progressivement re-remplie. Un mélange d'excitation, d'attente très forte, pour un groupe que beaucoup n'ont jamais vu sur scène, mais dont tout le monde connaît la réputation. La colère, enfin, de s'être fait chier dessus par Sunn O))), alors qu'on avait rien fait. «Ben, maintenant, tu vas te faire pisser dessus, par David Yow, mais là c'est du bonheur ».

Nos quatre lascards entrent en scène. Yow trés sobre, chemise noire boutonnée, pantalon noir. Il balance un baratin trés poli dans un américain chamallow à souhait, mais il y a ce rictus, et quelque chose de diabolique dans le regard. À la première note de «Puss», il se laisse tomber dans la fosse. Il ne nous montrera pas sa bite, et ne nous pissera pas dessus, parce qu'il n'est pas un produit prévisible. Il ne se jette pas dans la fosse, il se laisse tomber, comme dans une rupture d'espace-temps. C'est sa capacité à s'abandonner, à exposer sa voix, son corps, qui frappe avant tout. Une voix souvent hurlée, même en fin de respiration, plutôt «en dedans», comme sur les premiers albums : ce qu'il perd en nuance, il le gagne en intensité. Sur scène, il est à fond, puis tout à coup se relâche, titube, manque de s'évanouir.

On a l'impression qu'on va exploser avec lui sur le refrain de «Thumbscrew», et les breaks ont quelque chose d'hallucinatoire, entre deux moments de furie pure. Le slam fonctionne comme une soupape : quand la pression est trop forte, il tombe. La savante alchimie rythmique du trio apparaît au grand jour sur scène ; basse et batterie sont souvent décalées ou à contretemps, la guitare de Denison, tantôt sur un mode mélodique, tantôt rythmique, est à la fois subtile et minimale ; c'est la quintessence du hardcore américain: sobriété, concision, refus du solo marathonien chiant, à l'anglaise. Le son est lourd, parfois lent, saccadé, les Melvins ne sont pas loin, mais pas l'ombre d'une sonorité métal. On est quand même loin du grunge, contemporain des années d'activité du groupe. La transubstantiation christique a lieu : Yow ouvre sa chemise, puis finit torse nu, suant, crachant, lessivé, nous avec. Les pitreries du petit moustachu des Black lips le lendemain nous paraîtront bien dérisoires.

À lire aussi : The Jesus Lizard - Shot (1996).

«Thumbscrews», comme si vous y étiez :




Morceau d'ouverture, «Puss» :




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