26 février 2013

DJ Koze - Amygdala (2013)

Alors que le rythme des sorties s'accélère, le denier Lp de DJ Koze s'impose déjà comme l'un des poids lourds de ce début d'année. Pour les lecteurs réguliers de Dodb, le pseudonyme de ce producteur allemand ne leur est pas totalement étranger. On se souvient de la chronique de l'excellent Reincarnation, cette compilation de ses meilleurs remixes, ou encore de ses nombreux autres maxis. Stefan Kozalla, de son nom, a en effet largement contribué à insuffler un peu de nouveauté, de fraicheur et d'invention à la scène électronique allemande qui ne cessait de se retourner sur les succès qui ont contribué à ses lauriers. Si la recherche et l'expérimentation sonore s'inscrivent parmi les maîtres-mots du producteur, ce dernier a eu le génie d'ajouter une forte dimension ludique à ses productions. Lorsqu'il compose, Stefan Kozalla s'amuse. Et cela se ressent. Et s'il n'évacue pas totalement une certaine gravité et hauteur conceptuelle liée à cette recherche et à la construction de ses morceaux, le producteur a également appris à ne pas se prendre trop au sérieux. Une qualité, on en conviendra, qui n'est pas à la portée de tout-un-chacun.



Pour cette nouvelle galette, DJ Koze a donc choisi de se réincarner en moujik casqué des temps modernes, chevauchant un cerf, planté devant un décors aussi bucolique que psychédélique… L'humour n'est jamais absent de son univers. Tout comme les nombreuses personnalités qui participent à l'élaboration de cet album. De Caribou à Matthew Dear en passant par Apparat, chacun des titres chantés dispose de son invité. Amygdala, le nom de l'album, ne semble d'ailleurs pas le résultat d'un heureux hasard. Cette partie complexe du cerveau est impliquée dans les réponses comportementales et végétatives associées en particulier dans la peur et l'anxiété. Une thèse que les noms choisis pour les morceaux semblent confirmer ("Homesick", "Don't Lose Your Mind"…). Si l'angoisse semble être le moteur de cet album, Koze a choisi de l'exprimer musicalement, par des sons mais également au moyen de paroles chantées en anglais et en allemand. Un processus d'expression des plus communs s'il n'avait pas en plus ce génie de la création.

Huit ans après son dernier long format, Kosi Comes Around, sorti sur Kompakt en 2005, c'est sur Pampa qu'est édité Amygdala. Cette petite maison fondée par Kozalla lui-même et Markus Fink est reconnue pour héberger les productions d'autres poids lourds de l'électronique allemande tels Isolée et le très recommandable Robag Wruhme. On ne sera alors qu'à moitié étonné de la qualité, de la finesse et de la diversité des productions que nous réserve cet album. Le titre d'ouverture "Track ID Anyone ?" avec Caribou en featuring, fait référence à cette question récurrente que l'on retrouve dans les commentaires de vidéos et dans les forums. Elle intègre, comme dans de nombreuses productions Koze, des éléments sonores hétéroclites. Des marmonnements à peine perceptibles, bruits de cloches et un voix féminine vocodée qui annonce : "We need to beat, we need to sleep and we need music".


Dans les nuages, ce "Nices Wölkchen". Koze semble survoler le monde qui l'entoure. Un effet augmenté par la voix planante et indolente de Sascha Ring AKA Apparat. Un vol en plané que prolonge "Royal Asscher Cut", l'un des quatre titres strictement instrumentaux qui composent l'album. La première grosse impression vient avec "Magical Boy" interprété par Matthew Dear. Du concentré de Koze. Une subtilité et une élégance dans la production qu'il est un des rares à savoir reproduire. Malgré son beat tellurique légèrement étouffé, le morceau ne tarde pas à intégrer des cordes éparses et harmonieuse auxquelles viennent s'ajouter une voix douce et féminine. C'est alors qu'interviennent des cuivres déchirés, légèrement dissonants, ainsi que la voix bien reconnaissable de Dear, dont le traitement ne fait qu'augmenter son effet tragique et bouleversant.

Si l'on arrive généralement à déterminer comment un morceau commence, le travail devient plus difficile lorsqu'il s'agit de savoir quels chemins Koze choisira d'emprunter. C'est une sorte de hors-piste auquel nous invite "Das Wort" interprété par Dirk Von Lowtzow, le chanteur et guitariste du super-groupe allemand Tocotronic. Alors que celui-ci commence à chanter en allemand, un couplet de la chanson se retrouve quant à lui interprété en anglais… Le traitement électronique des voix est une constante que l'on retrouve tout au long de l'album. Sur "Homesick", c'est la chanteuse Ada qui s'y colle sur un rythme légèrement hip-hop. Il devient difficile d'intégrer dans la description l'ensemble des éléments sonores divers et variés qui composent les titres. Ceux-ci sont truffés de trouvailles inventives et ludiques aussi bien au niveau instrumental que dans les rythmes et les tempos qui semblent évoluer au fur et à mesure de l'écoute, la rendant ainsi captivante. On peut également citer la reprise de "Ich Schreib’ Dir Ein Buch", titre de 1975 de la chanteuse allemande Hildegard Knef, qui confond par sa dimension à la fois foutraque et maîtrisée.

En bref : avec Amygdala, Koze ne se contente pas seulement de sortir un nouveau disque mais contribue certainement à écrire une nouvelle page de la musique électronique en 2013. Rien que ça. Magique.



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3 Comments:

Dave said...

Je sais pas comment tu as fait pour digérer si vite un tel album, mais en tout cas je suis ravi que tu l'aies chroniqué parce que s'il fallait compter sur moi il aurait fallu attendre 3 ou 4 mois !
Très grand album de l'un des tout meilleurs producteurs électroniques des années 2000 !

Antoine said...

J'ai un métabolisme rapide !... Au bout de deux écoutes il était dans la boite. Je crois que je n'aurais d'ailleurs pas grand chose à ajouter ou à retrancher de l'article !

Ju said...

Une véritable tuerie, en boucle sur la platine depuis qu'il est arrivé !