30 juin 2008

Lykke Li -Youth Novels (2008)

Il y a des formes rondes, des paroles superficielles, des mélodies sucrées. Et puis il y a cette voix, aussi douce qu'un bonbon. L'ensemble est d'une fraîcheur réelle, le plaisir d'écoute est immense. Lykke Li, toute jeune chanteuse suédoise, est exceptionnelle. Pourtant, dans son premier album
Youth Novels, elle ne propose rien d'autre que de la pop. Pop au sens le plus vulgaire du terme. Vulgaire au sens le plus noble du terme.

Alors qu'est-ce que Lykke Li a de plus que les autres ? Eh bien ce que Lykke Li a de plus, c'est le moins. Ecoutons de plus près le jouissif single "Little bit" : il y a un beat, volontairement saturé mais parfaitement cutté, il y a une petite guitare, et il y a le chant... et il n'y a rien d'autre. Parce que la voix et la mélodie, excellentes, suffisent à elles seules à faire tenir la chanson. Sur Youth Novels, chaque chanson est si bien écrite qu'il est inutile de surcharger l'instrumentation. Et si l'instrumentation tend à l'épure, la production bénéficie d'un soin extrême, qui fait de Youth Novels un objet d'une perfection plastique absolue, un pendant musical au design contemporain : rond, pop, minimaliste, aux lignes claires et précises. Lykke Li et Björn Yttling (de Peter, Björn and John) créent une sorte de dance acoustique, de la pop de chambre moderne.

Les parfaits"Dance dance dance", "I'm good I'm gone", "Let it fall", "Breaking it up" rappellent pourquoi les puristes électro et indé ont succombé à l'écoute du "Hollaback girl" de Gwen Stefani/Pharrel Williams ou du "Slow" de Kylie Minogue/Emiliana Torrini : l'envie de danser est la même, imparable, l'épure instrumentale est radicale, et les voix sont sucrées, irrésistibles. Mais à la différence de ces stars pop, Lykke Li a le charme sans la minauderie. Lykke Li est moins pétasse que grande classe. Tout est dans le flux de voix, jamais dans la respiration racoleuse.

Et puis il y a "Hanging high", qui en plus d'être tout simplement beau, vient faire acte d'un événement culturel majeur. Derrière les choeurs du refrain, ceux exactement que l'on a entendu chez Jens Lekman et Taken By Trees l'an passé, c'est mine de rien toute la pop suédoise qui vient de se trouver une identité. Après avoir vécu dans l'ombre de la pop britannique, dont elle n'avait pris que la structure, la pop suédoise acquiert une véritable swedishness, dans sa composition mélodique parfaite et dans ses voix enchantées. Youth Novels confirme la force et l'identité de cette pop jusque dans ses influences exotiques (la guitares hispanisante de "This trumpet in my head", et le 1,2,3,4,5,6 en français dans le texte de "Window blue"), et c'est sûrement pour cette raison aussi qu'il nous enthousiasme tant.

En bref : Un disque de dance acoustique, entre pop minimaliste et électro discrète, qui derrière des formes toutes suédoises, semble inventer un son tout nouveau.







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L'énergie lascive du single "Little bit" en vidéo, ainsi qu'une version live de "I'm good I'm gone" enregistrée avec la crème des musiciens de Stockholm: Lykke Li est un personnage fascinant, plein de mystère, habité, impénétrable...










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Hot Chip - Made In The Dark (2008)

Avec ce troisième album, la démarche des Anglais de Hot Chip devient évidente : à chaque nouveau disque, le son évolue et s'épaissit. Ils avaient débarqué avec les ritournelles minimalistes de Coming on strong il y a quatre ans. Les voici de retour, après le tempéré magnifique The warning, avec un son plus gros et plus live que jamais. Avec plus de guitares et plus de synthés, le groupe a la ferme intention de nous faire danser. Mais il semble tellement obsédé par cette ligne de mire qu'il se laisse aller à ses délires les plus geeky. Trop occupé à gonfler leurs chansons, Hot Chip ont oublié de les écrire. Eux qui nous avaient auparavant tant séduits par la finesse de leur pop songs ont ici créé des monstres.

Les beats les plus puissants ne sont pas nécessairement les plus efficaces, et Hot Chip devraient, après s'être épuisés à porter ces créatures sur scène, s'en rendre compte à leurs dépens. Made In The Dark : Hot Chip a en effet créé ce disque à l'aveuglette, avec la frime pour seul éclaireur, ô combien trompeur. Dès le début ("Shake a fist"), on se dit qu'on ne supportera pas longtemps d'entendre ces geeks se prendre pour des héros d'arcade dancing game. En matière de revenge of the nerds qui font de la grosse dance, on avait atteint les limites au col des improbables Slagsmalklubben."This game's called sounds of the studio." Mais le jeu n'amuse personne d'autre que le groupe lui-même.

La grande qualité de Hot Chip a toujours été de réussir à nous faire danser la tête en l'air, l'air songeur, le regard triste. Alors poussant jusqu'au bout ce qui ressemble désormais à une formule, Made In The Dark alterne tueries dance et balades mélancoliques. Sauf que ce que nous aimons tant sur le précédent, c'est que les titres dance sont mélancoliques. The Warning est un des rares disques dance dont on ne se lassera jamais, car chaque chanson y est, indépendamment du nombre de bpm, empreinte d'une profonde émotion, d'un souffle pop délicat, d'une subtilité aujourd'hui perdue. Bien que produit de manière plus modéré que ce Made In The Dark, The Warning est indéniablement plus fort. Avec des titres comme "Boy from school", Hot Chip dépassait les pionniers New Order dans l'art de dessiner une larme à l'oeil d'une electropop imparable. Ici, Hot Chip livre des slows sans substance, empruntant des rythmiques 90's au plus mauvais R'N'B américain. Le plus triste ne réside donc pas en ces balades, mais dans le sentiment de déception qu'elles créent.

En bref : Un délire geeky, lourd au possible. Espérons que Hot Chip calment leurs ardeurs par la suite, car ils viennent de se brûler les ailes.



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A lire aussi : Hot Chip - Live au Trabendo (mars 2008)

Seul titre à sauver du naufrage, le single Ready for the Floor, plus pertinent encore en vidéo:


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Clinic - Do It ! (2008)

Les liverpuldiens de Clinic sont de retour pour la 4ème fois, enfin 6 si l'on inclut la 1ère compile réunissant les légendaires premiers simples de ces iconoclastes british ainsi que la médiocre compile d'inédits publiée l'an passé.

Les Clinic sont un groupe d'allumés apparu en 1999 dont le style fait de surf avec beaucoup de reverb et mâtiné de Farfisa et de melodica n'est à nul autre pareil. De la voix faussement geignarde de Ade Blackburn au gimmick des masques de chirurgien sur le visage, c'est peu de dire que le parcours de ces drôles paraît quelque peu sortir des sentiers battus, et n'avoir par exemple aucun rapport avec les Zutons ou autres Coral issus de la même scène.

Ce disque, à priori un peu plus assagi que les précédents, ne change pas fondamentalement la donne lo-fi du groupe. On imagine l'affaire emballée live en moins d'une semaine sur un 8 pistes de fortune. Les gimmicks de Clinic sont sans doute comme autant de limites à sa trajectoire commerciale, encore que tout le monde le sait, la scène rock anglaise est suffisamment implantée pour lui permettre de subsister de manière insulaire.

On pourra ainsi arguer que chaque album du gang est interchangeable, et que semblables aux Ramones, ces musiciens usineront encore et toujours des mêmes artifices. Dans ces conditions, difficile de faire ressortir tel ou tel LP et a fortiori, tel ou tel morceau, même si, cela est vrai, la collection initiale de simples sur Alladin, conserve notre suffrage. Le dénominateur commun restant également le second degré, celui qui par exemple leur faisait pasticher sur leur premier véritable album, une pochette célèbre d'Ornette Coleman, pourtant très éloigné de la galaxie "Clinicienne". Groupe incorrigible et inclassable, à voir en concert pour céder sous les coups de boutoir de leurs morceaux joués au taquet et à 2'30" de moyenne !

En bref : groupe attachant, n'appartenant à aucune chapelle, et qui nous refait le coup de l'hyper-productivité ; tout juste 6 mois séparent Do It ! de Visitations.
___ Le Myspace _
A lire aussi : Swell - South of the rain and snow (2007)
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Ci-dessous, "Cement mixer" live, extrait de Clinic (1999) :


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Spiritualized - Songs in A and E (2008)

Jason est de retour et met le feu ! En effet, dans ce nouveau recueil dédié aux chansons en la et mi, pas moins de 3 titres sont "incendiaires" : "I Gotta Fire", "Soul On Fire" et "Sitting On Fire". Sinon que dire de la nouvelle livraison de Jason "Spaceman" Pierce ? Que chaque nouveau disque de Spiritualized est un événement, d'autant que pas moins de 5 ans se sont écoulés depuis le boudé par la critique et très garage Amazing Grace.
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Les choses, pourrait-on dire, reprennent le cours des premiers disques, et notamment du très pharmaceutique et génial Ladies and Gentlemen We Are Floating In Space (97) et de son non moins réussi follow-up Let It Come Down (2001) ; à ceci près que l'inspiration n'est pas toujours complètement à la hauteur des disques précités. Et qu'assez curieusement, et alors que Spiritualized s'est fait le spécialiste des symphonies opiacées n'ayant rien à envier au Philly Sound Spectorien, ce sont ici les titres les plus rentre-dedans qui convainquent le plus : naviguant au gré d'interludes instrumentaux courts, les rudimentaires mais efficaces "Yeah Yeah", "You Lie You Cheat" sonnent comme des uppercuts. Qu'on se rassure, Spiritualized n'a pas abandonné son savoir-faire d'orfèvre pop orchestral, et certains titres tels le magnifique "Sweet Talk" ou le très Beach Boysien "The Waves Crash In", volent au dessus de la mêlée pour ce qui est de l'interprétation au bord de la rupture façon Dylan, et des arrangements de cordes, toujours somptueux.

Las, ce qui pour n'importe quel autre nouveau groupe relèverait du grand oeuvre - par ailleurs difficilement accessible - ce nouvel opus de Spaceman est une (très relative) déception. Normal quand on a autant tutoyé les étoiles et laissé autant de morceaux mémorables derrière soi. Mais pour les néophytes, ce disque doit figurer en bonne place dans les listes d'achats, afin de découvrir l'univers d'un des groupes anglais les plus singuliers et originaux de son époque.

En bref : on est content de retrouver Spiritualized, car même si le groupe ne signe pas un nouveau chef d'oeuvre, sa démarche originale témoigne toujours d'un talent fulgurant.




Le site officiel et le Myspace
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A lire aussi : Sun Dial - Other way out (1990)
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La video de "Come Together", extrait de Ladies...


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29 juin 2008

IGO - Synth love (2008)

La Chine est un pays merveilleux et Shanghai sans nul doute l'une de ses plus belles putains. Dans cette ville délirante et outrancière, définitivement tournée vers la consommation de masse, la culture n'est qu'un simple produit parmi tant d'autres. Le spectacle est total. A ce titre, la musique se décline sur le mode « entertainement » et devient spectrale, au final presque inexistante. Une succession de boys bands et de groupes pop taïwanais dans les enceintes et quasiment pas d'artistes étrangers dans les rayons des rares disquaires. Le son réduit à un bruit pour faire bouger les culs en boîte de night ou à un simple bourdonnement pour accompagner les clients dans les malls. Vous me direz : « Ici, un peu aussi !». Je vous répondrai qu'il s'agit peut-être juste d'une question de proportion mais qu'en Chine cela n'est pas négligeable. Là, tout est démesure et excès. Contrôle parfois. Dans les interstices de ce qui s'apparente à un désert d'indifférence, il existe pourtant des lieux et des acteurs à travers qui la musique reprend goût à la vie. Le club Shelter et sa gueule de hammam réconditionné, le minuscule Logo, et des gens comme Ben Huang, eheart, Phreaktion Jane, Mhpping, tous activistes-mélomanes depuis belles lurettes dans leur pays. Parmi eux, il y a également les jeunes IGO, duo synthé-pop tout récemment distribué par Universal Music Hong Kong. Un geste peut-être présage d'un vent de changement dans l'industrie du disque de l'Empire du milieu ? Certainement pas à mon avis, le travail est de longue haleine, mais en tout cas un bon premier disque, et un grand plaisir dans le marasme pop rn'b chinois ambiant.

Synth love est le premier album des deux amis J Jay (chant) et B6 (clavier et programmation), fruit d'une toute fraîche collaboration débutée en 2006 à Shanghai. J Jay est de ceux que l'on baptisent « tortues de mer » dans le pays, jeune étudiant parti à l'étranger et de retour en Chine. Pour lui, ce furent les Etats-Unis et un master en science à la clé. Et de nombreuses formations de groupes dans la veine post-punk. B6, de son côté, embrasse très tôt une carrière locale de DJ et producteur. Les deux jeunes hommes se rencontrent en 2004 et forment deux ans plus tard IGO, rencontre naturelle et indolore de la new wave et de la synthé pop électronique. Le petit label Modern Sky Records produit leur premier album avant qu'Universal ne prenne très vite la main pour la distribution.


Pour moi, ce disque porte trois marques indéniables. Primo, les références classiques de la new wave, genre Depeche Mode ou New Order. Deuxio, la forte inspiration Kratwerkienne et sa suite synthé-pop. Enfin, un mixage et une production très contemporains me rappelant parfois à des artistes Kitsuné tels que Fischerspooner. A ce propos, le groove de certains titres de Synth Love est très proche de ceux développés sur l'album des Américains, Odyssey, sorti en 2005. Je pense en particulier au revigorant « Holy mood » ou à la plage d'ouverture « It's not easy », portée par une ligne de basses à la fois dark et nasty. La voix de J Jay est déterminée et presque dédaigneuse parfaitement dans la vibe d'un Casey Spooner, sorte de mariage moderne entre langueur new wave et lustre électronique. Sans oublier d'appuyer de temps sur le bouton « complaintes lascives et blasées » à grands renforts de reverb et d'écho. Ou l'insert d'un organe féminin aérien. La recette est plutôt bonne et elle a souvent tendance à m'enchanter malgré la légère sensation de déjà entendu. Le charme prend une fois de plus avec IGO, l'exotisme jouant évidemment son effet à plein, tout comme les bons souvenirs. Au-delà de ça, il y a là un joli disque bien apprêté de synthé-pop. Je vous propose donc d'acheter ce disque ou de le récupérer, et rien que pour vous la raconter de le passer en soirée histoire de prononcer tout naturellement : « Tu connais pas ? C'est IGO, un groupe de synthé-pop de Shanghai ! ». Personne ne pipera mot et votre crédit musical n'en sera que plus renforcé !



En bref : Un album de synthé-pop au croisement de Kraftwerk, Depeche mode et Air. Pas une folie d'originalité mais une curiosité soignée from Shanghai.





Le myspace d'IGO


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Ecouter le disque grâce à emule


Les titres « It's not easy » et « Holly mood »


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28 juin 2008

4 Hero - Two Pages (1998)

A l'origine de ce copieux projet, les deux DJ membres de 4 Hero, Dego McFarlane et Mark Mac Clair ont déjà oeuvré sous de nombreux pseudos associés au breakbeat avant de lancer leur groupe à géométrie variable.
Survenant 3 ans après Parallel Universe qui déjà mettait une grosse claque à tous les amateurs de drum and bass et de soul endiablée, Two Pages comme son nom l'indique, est un dyptique qui à la façon du Speakerboxx /The Love Below de OutKast, propose en deux volets les explorations soniques les plus représentatives de 4 Hero.

La première colossale fournée se veut tant sexy lounge que soul acid jazz la plus soyeuse, avec au micro des chanteuses au swing et au feeling aussi délicieux que Ursula Rucker ou Carol Crosby et d'autres intervenants, quand ce ne sont pas de redoutables instrumentaux à l'élasticité rythmique qui sont proposés ("Loveless", "Star Chasers","Escape That", "Golden Age of Life", "The Action", Third Stream"...). Dans un premier temps, arrangements cordes et cuivres du meilleur effet sur des rythmiques trépidantes basées essentiellement sur des contrebasses et des batteries frénétiques. Tout de velours.

Le second volet s'adresse davantage aux fans de jungle, à ceux qui ne s'effraient pas des stridences sonores du duo. Au menu ? Infrabasses, crissements, échos, rythmiques spasmodiques, bref une brutale redescente eu égard au confort luxuriant initial. Un morceau emblématique vampirise le reste de l'exercice, le redoutable "We Who Are Not As Others" mais il faudrait citer aussi les nappes de "Pegasus 51", ainsi que "Humans", "In The Shadows".

Ce très grand disque est un condensé de ce que la musique noire a donné de plus soul et de plus groovy au siècle dernier ainsi qu'un résumé de l'odyssée jungle qui hélas n'épargne pas l'immolation des disques de Goldie. A l'image de certains standards de jazz et de soul dont il revendique les influences Les 4 Hero même si peu prolifiques, sévissent toujours.

En bref : le disque d'acid-jazz soul breakbeat à posséder. Pas moins.



_ A lire aussi : Goldie - Timeless
Ci-dessous, une prestation live de "Star Chasers".

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Radiohead - Arènes de Nîmes - 15/06/08

"Beauf", il se reconnaîtra, a été bien inspiré de faire appel à moi pour la place restante de la fournée Radiohead : d'abord, parce que je n'avais pas cru bon d'y aller, qu'ensuite marché noir oblige les deux concerts des arènes étaient sold-out en moins de temps qu'il n'en faut pour cliquer "payer maintenant" sur son PC (merci à tous les spéculateurs à la petite semaine, au passage, small-time crooks dirait l'autre), et qu'enfin, revendre cette place à Basile Farkas eût été une faute de goût tant ce thuriféraire en chef du groupe d'Oxford a dû les voir un nombre de fois égal à un multiple de 7 (nombre d'albums), très élevé - d'ailleurs, sans doute était-il présent, Basile, si tu nous lis.....

Foin d'une première partie assez assommante, les Bat For Lashes, qui inspirera judicieusement à Gauthier cette remarque "ça ressemble à Bjork et en plus chiant, encore". Nous voila dans la fosse prêts à en découdre avec les U2 des 90's (j'assume complètement cette assertion vu l'effet rock héroïque pénible de Ok Computer, bref...).
Ca démarre par un brelan issu de In Rainbows , dernier album qui a fait davantage parler de lui par sa diffusion que par son contenu, et c'est dommage ! "15 Step", donc, enlevé comme il faut avec sa montée d'accords mineurs ;le groupe semble en grande forme. Arrivé au 4ème morceau, où est convoqué un piano, c'est la grâce, pas d'autres mots : Thom York qui est Radiohead à lui tout seul pour ceux qui n'en seraient pas encore convaincus, nous envoie un "Pyramid Song" magnifique de beauté arabisante, tandis que Johnny Greenwood se sert de sa gratte comme d'un violoncelle. L'album Amnesiac, dont il est issu, a carrément réhabilité Radiohead à mes yeux, et chance (!) le groupe ce soir, va plus ou moins zapper ses grands tubes (on n'échappera pas à un "Paranoid Android" assez moyen par ailleurs, ni à "Fake Plastic Trees" hélas....mais pas de "Creep" ni de "No Surprises", etc...) au profit de son grand oeuvre, chouette !

Témoin, cette incroyable interprétation, toujours au piano par Thom Yorke, de "You And Whose Army", où c'est étonnant, les caméras, omniprésentes, nous font le coup des travelling avant et arrière sur la paupière figée du chanteur, qui l'utilise pour décocher des oeillades désespérément éteintes au public ; ceci fait pendant le très prenant crescendo, cela donne un instant de live rare comme seul sait en réserver le très beau théâtre des arènes !
A retenir aussi, dans une soirée des plus réussie, un joli duo acoustique sur "Faust Arp" entre Thom et Jonny, un "Dollars and Cent"s aux trémolos toujours aussi trippants et un "Everything In Its Right Place" où le seul Yorke s'affaire au Rhodes tandis que le reste du groupe bidouille et trifouille des pédales d'effets pour donner un effet d'écho "inversé" à la voix de son leader.
A chaque fan, manquait sans doute un ou des titres fétiches, car forcément le répertoire du groupe est à présent très étoffé, mais comme on l'a vu, dans une set-list privilégiant les derniers efforts du groupe au détriment des anciens -ah, j'oubliais un Just infernal asséné à un public reconnaissant- il m'a semblé sur le moment, et au travers de ce que j'ai pu en lire sur différents blogs, qu'il ne se trouvait que peu d'aficionados pour se plaindre de la sélection des titres ; c'est dire l'intelligence dont a fait preuve le groupe dans son parcours.
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Le Myspace de Radiohead
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"You and whose army" et "Idiotheque" live


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27 juin 2008

Tender Forever + Mansfield Tya au Son'Art (Bordeaux)

Enfin, Tender Forever que j'avais accueilli avec enthousiasme lors de la sortie de son dernier opus Wider, est de retour dans sa ville d'origine, pour un soir au moins, loin de son Portland américain de villégiature. L'album, déjà bon sur disque, cumulait les commentaires élogieux en live. Partout où Mélanie Valéra passe, les gens deviennent fans, ou au moins admiratifs devant l'inventivité de la demoiselle, et surtout sa bonne humeur, contagieuse à souhait. Alors qu'il fait encore jour dehors, un agréable public à l'ambiance gazon maudit se répartit dans le Son'Art qui sent bon les grands soirs. Comme d'habitude, Martial Jesus Selector assure les entractes de main de maître, toujours partant pour parler passionnément de la musique qu'il aime. Les surprises ne faisaient que commencer.

En effet, la première partie nantaise de Mansfield Tya alias Julia Lanoë et Carla Pallone s'est rapidement avérée être bien plus qu'une simple première partie. Un duo magique, se passant les instruments comme dans un manège, piano, violon, batterie, basse, guitare, chacune y allant de sa démonstration. A 100% en symbiose, ces deux écorchées vives bouillonnent et jouent un rock mélancolique indescriptible, d'une étonnante violence taciturne. Le duo piano / violon dépasse tout espérance et amène un sentiment d'intimité partagé par le public. Mais plus que tout, et c'est peut-être dommage tant le duo en parait presque déséquilibré, la vibrante voix de Julia domine le show et se vêtit de parures remarquables. Une voix au niveau des meilleures, de Chan Marshall à Beth Gibbons en passant par Shannon Wright. Déjà le morceau Mon amoureuse, chanté en canon, sonne comme un classique et semble concerner de nombreuses personnes ce soir. A suivre de très près en espérant qu'elles sachent apporter cette même émotion sur disques.
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A ce moment là de la soirée on se demande comment seule, Mélanie arrivera à nous faire oublier la première partie et à reprendre en main une audience qui a déjà pris cher. Jamais à court d'anecdotes abracadabranteques, sans aucun souci du ridicule, le petit bout utilise tout ce qui se trouve autour d'elle sur scène et recrée petit à petit son univers électro folk lo fi fait de brics et de brocs. Labtop, clavier, guitares, I pod et ukulélé sont tour à tour invoqués non sans oublier les nombreuses interactions avec nous, les intéressés. Poussant même le vice jusqu'à chanter un duo avec son double (?) projeté sur un mur à taille réelle, ou à spanker ouvertement Beyoncé par diapositive interposée. nous sommes bluffés.


On connaît aujourd'hui l'histoire. Repérée par Calvin Johnson, signée chez K Records (Nirvana), en tournée avec Electrelane, Tender Forever n'est pas là pour faire joli. Titres pop sucrés (How many) ou chansons des coeurs brisés (Heartbroken forever), l'émotion déborde, exagère et fait fi des codes musicaux à chaque instant. Comme si sa vie en dépendait, Mélanie s'auto pousse dans ses derniers retranchements, toujours au bord de l'essoufflement, jusqu'au bout du bout du deuxième rappel. C'est ça un concert de Tender Forever, on rit et on s'émeut, sans interruption. Une fois de plus (Gravenhurst, Zombie Zombie, Why...), le Son'Art était ce soir The place to be.
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My love, cover de Justin Timberlake par Tender Forever et Pour oublier je dors, de Mansfied Tya:



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Art Bleek - L.A. EP (2008)

D'un Arthur à l'autre, le registre change. Un bref post juste pour vous signaler la sortie d'un nouvel EP du dénommé Arthur Pochon alias Art Bleek. Comme il l'avait lui même annoncé dans l'interview publiée dans nos colonnes, son L.A. EP, inspiré par son séjour en Californie, débarque dans les bonnes crémeries sous l'estampe Resopal.


Ce maxi s'inscrit peu ou proue dans le même courant qu'Euphorized, à savoir une deep house pointilleuse, très travaillée, dérivant de temps à autre vers une techno plus dure et dépouillée. « Stopped clock » est le premier titre du maxi. Ses basses austères martèlent un peu la caboche et de l'ensemble se dégage un aspect rèche qui n'en fait pas la meilleure pièce du disque. On retrouve le groove plus habituel d'Arthur Pochon sur la deuxième plage, justement nommée « Down town L.a. ». Une sorte de balade urbaine, entre lumière et obscurité, beaucoup plus mouvante et dynamique que le morceau qui la précédait. « Groundscrapers » prend le relais sur la face B. Ses bases sont plus âpres, servies par de grands coups de basses sismiques et des sifflements en écho. Une fois de plus nous sommes davantage dans la techno que dans la house lumineuse. Mais dans son irrémédiable alternance/schizophrénie entre titres obscurs entêtants et groove deep plus léger, Art Bleek nous replonge une nouvelle fois sous les spotlights sur « Pacific coast highway ». C'est toujours aussi bien maîtrisé et les sonorités arrondies du frenchy demeurent séduisantes mais l'EP est néanmoins un peu en deçà de la belle surprise qu'avait été Euphorized.


En bref : Un maxi moins fascinant d'Art Bleek mais qui donne une nouvelle preuve de sa minutie et de ses belles dispositions en matière de deep house. A suivre.




La myspace d'Art Bleek


A lire aussi : Art Bleek – Euphorized EP (2008) et l'interview d'Art Bleek


Pour se souvenir voici le titre « Euphorized ». Pour découvrir, « Pacific coast highway », extrait du L.A. EP.



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26 juin 2008

Joseph Arthur au Café de la danse (Paris)


Du songwriter de l'Ohio Joseph Arthur je ne connaissais pas grand chose avant de me rendre cette semaine à l'un de ces concerts. Quelques souvenirs me restaient seulement de sa réputation d'as de l'oversampling – point plutôt sympathique – mais pas plus. Pour sa venue à Paris, c'est l'honorable Café de la danse qui accueille le chanteur dans son charmant décor, chaleureux quoique dépouillé, et devant une assemblée de fans bien nourrie. Un microphone au milieu de la scène, pas de sampler en vue, les pierres du bâtiment rougies par les spotlights, le public assis et sage. Pour faire bref, du confort et de l'intimité pour cette soirée manifestement placée sous le signe de la folk music. Joseph Arthur, légèrement déguingandé, ray-ban « wayfarer » à la Dylan dégainées, jean-noir-veste-bleue, est dans le ton, vissé droit comme un « i » à un mètre des premiers spectateurs, la guitare en bandoulière et l'harmonica à portée de main.


Le silence règne. Un rapide “bonsoir, je suis ravi d'être ici” et l'Américain se lance. Les premiers arpèges d'“Electrical storm” résonnent et les paroles éraillées du chanteur remplissent l'enceinte. Sa mélancolie se fait instantanément grandeur et le public, moi compris, écoute religieusement. Joseph Arthur module d'une gamme à l'autre avec aisance et finit le titre dans un doux et haut fredonnement. Indéniablement, sa maîtrise vocale scotche et l'entrée en scène est belle, très dylanienne dans l'allure mais par-dessus tout magistrale.

Le bonhomme alterne ensuite morceaux anciens et nouveautés de son album à venir (Temporary people). L'auditoire est studieux mais peu à peu Joseph Arthur semble glisser vers la facilité et dérouler son répertoire, d'une balade folk à de la pop acoustique grandiloquente portée par les envolées de son chant.

Passé les cinq-six premiers titres, et bien que la voix soit réellement profonde et envoûtante, ses incessantes montées dans les aigües commencent à lasser. Le jeu de guitare est parfois brutal et à certains instants il manque cruellement de relief, devenant ainsi un tantinet brouillon. Les références récurrentes à Dieu couplées à l'enchaînement de lieux communs de certaines de ses love songs passionnées (du genre : “I'm looking for her... I'm looking for the one...”) finissent de m'ennuyer et de m'agacer. Et en dépit de deux rappels bien léchés et de l'engouement généralisé de la salle, sur les titres phares de l'artiste comme “In the sun”, c'est sur une légère impression de déjà vu que je quitte le Café de la danse. Pas déçu, pas outré, mais pas touché non plus.


Le site de Joseph Arthur

Le myspace du Café de la danse


A lire aussi : rubrique folk



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Wild Beasts - Limbo, Panto (2008)

Attention génies! Et le titre étant tellement galvaudé de nos jours, croyez moi, j'y ai réfléchi à deux fois. Je vous invite à découvrir ce qui risque fort en ce milieu d'année de devenir la next big thing, le prochain buzz inter médias après Vampire Weekend et MGMT. Non pas parce que ça nous arrive tout chaud de l'Angleterre pop fantasmée, ni parce que le NME en a fait ses choux gras, juste parce que ça semble évident. Les Wild Beasts sont pourtant comme les autres, quatre gars avec des guitares, qui font des chansons. Mais ils sonnent sur un premier album instantanément intemporels en ce sens qu'il pourraient bien provenir du futur, ou avoir été enregistrés il y a des dizaines d'années. Pardonne moi Tore Johanson mais ta production d'ordinaire étiquetable (Franz Ferdinand, The Cardigans) est ici habilement contournée pour laisser s'exprimer le côté instinctif de ces quatre bêtes sauvages. Le passé a fait que le futur soit en marche.

C'est d'abord dans le choix de leur patronime que se situe la première ambition, courageuse. Wild Beasts, c'est littéralement "fauves" en hommage au fauvisme, mouvement artistique du 20ème siècle qui favorisait l'audace et la recherche de nouvelles chromatiques. Matisse et Braque en furent les principaux représentants et créèrent le scandale. Tout ça parce qu'à un moment donné, on assiste à un accord momentané entre de jeunes artistes indépendants soumis au même climat d'époque. Et si c'était pareil pour la musique contemporaine dite rock? Des accointances à Montréal, à New York, à Leeds, c'est possible. Alors si précurseurs que ça les Wild Beasts? L'avenir nous le dira, mais le présent nous offre ce sommet de romantisme lyrique pop qui repousse les limites de ce qu'on imaginait possible il y a peu.

Par contre, passage obligatoire par la case "je ne suis pas allergique aux voix en falsetto" parce que Hayden Thorpe place sa voix au centre de la musique, telle une diva glam de rock opéra. Derrière lui, Tom Flemming le couvre à la basse et au chant ténor, formant l'une des deux grandes réussites de ce disque, le mélange de ces deux organes vocaux, et la créativité sans limites de seulement, et c'est rare, quatre jeunes hommes. The club of fathomless love et Brave bulging buoyant, clairyoyant (Quels titres!) sont deux exemples qui démontrent un niveau de maturité assumé. Leur propre son. Un équilibre choquant entre voix et guitares, auxquels on ne peut, fan ou pas du registre de tête, qu'adhérer. Ascendants et descendants, les rythmes semblent constamment avoir un train d'avance sur ce à quoi l'on s'attend.

She purred, while I grrred (Encore!), multiplie les moments les plus fous, un peu comme dans vos boîtes de nuit d'adolescence: quatre salles quatre ambiances. Et même s'ils ne sont pas toujours parfaits, c'est une erreur égale une réussite. Débordants de tous bords, le nouveau meilleur groupe anglais du moment n'est pas qu'une simple curiosité. Et gaffe aux deux meilleurs slows d'opéra rock jamais créés, Please, sir et Cheerio chaps, cheerio goodbye (Décidément!). Et les éructions De Hayden, sur Woebegone wanderers (Je me demande si tous ces mots existent!), à vous filer la chair de poule un après-midi d'août. Je bouclerai la boucle avec The devil's crayon, premier single et aussi le plus dansable, presque funk. Et ainsi de réaliser que j'ai quasiment cité tous les titres, incapable de me décider, tant tout est bon dans le cochon. Trêve de plaisanteries et place aux Wild Beasts et à leur Limbo, Panto bouillonnant et historique.

En bref : Enfermez les Sparks, Orange Juice et The Coral dans une machine à voyager dans le temps, mettez leur un bon coup de pied dans les couilles et vous obtiendrez cette révélation anglaise et cet album prochainement indémodable.
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Le Myspace et le site officiel

Le clip de The devil's crayon et celui de Brave... :



A lire aussi : Pete & The Pirates - Little death (2008)
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25 juin 2008

Beat Pharmacy - Drifter (2008)

Sur la scène dub techno, Brendon Moeller est un incontournable. Descendant spirituel de Moritz Von Oswald, il a collaboré avec certains membres de la tribu Rythm & Sound, comme Paul Saint Hilaire (alias Tikiman). Bien loin de Berlin, ce Sud-africain devenu New Yorkais mêle depuis 1994 les textures froides du dub électronique germanique à des sonorités plus roots et cuivrées souvent proches de l’afrobeat et de la soul des seventies. Gérant de Deep Space Media, sous-division de Wave (le label de François K), il n’en a pas moins essaimé les perles sur Eskimo, Mule Musiq ou King Street- sous des pseudos aussi variés qu’Echologist, Alphamotive ou Beat Pharmacy. Toujours dans la même vibe, entre groove chaleureux et béatitude horizontale.

Certains morceaux nous contraignent, nous enferment dans un espace réduit sans nous laisser respirer. Drifter, donné ici dans son “extended version”, est plutôt de ces morceaux panoramiques qui donnent à contempler, en quelques minutes, un espace infini. Les sons semblent flotter. Leurs contours sont flous. Les cuivres s’étirent, se chevauchent. La wah wah, vague évocation de la Blaxploitation, est en mode reverb maximale, tandis que les pointes d’orgue Hammond, clairsemées, procurent la sensation de tourner indéfiniment dans un manège vide, sensation renforcée par l’utilisation presque outrancière d’un phaser hélocoïdal. Tout cela est encore plus flagrant dans le dub mix, le véritable joyau de ce maxi, que seule une trompette solitaire et étouffée différencie des plages les plus cotonneuses de Basic Channel. Si vous êtes clients de ces atmosphères, précipitez-vous sur les trois premiers albums de Beat Pharmacy et particulièrement Steadfast (Wave/Deep Space Media/Nocturne - 2007), d’où est extrait Drifter.

En bref : Brendon Moeller apporte un peu de chaleur et de cuivres dans le monde opaque de la dub techno. A ranger en bonne place dans la catégorie “musiques pour petits matins brumeux”.







Le Myspace de Brendon Moeller, ceux de Beat Pharmacy et Echologist
Le site de Beat Pharmacy
Le site et le Myspace de Wave
Le Myspace de Deepspace

A lire aussi : Interview - Bvdub
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24 juin 2008

Black Mountain - In The Future (2008)

L'époque a fait la part belle aux Blacks dans le rock des années 2000, qu'on en juge : Black Keys, Black Lips, Black Angels, Black Mountain ... Ceux qui nous préoccupent sont canadiens, et viennent de Vancouver. Ces speedfreaks donnaient dans le rock lysergique psychédélique avec force envolées de strat et l'orgue de rigueur jamais baveux ni bavard.

Les Black Mountain; donc -et sans S, s'il vous plait. Auteurs d'un 1er album éponyme remarqué il y a en 2004, les Black Mountain sortent un double album  -juste 52 minutes-  où de longues plages de silence font parfois irruption et éruption, avec ce qu'il faut de de breaks plus couillus.
Mais tout d'abord ce titre, In The Future, à l'ironie savamment menée, quand on sait que les influences de ces bonshommes et leur demoiselle sont plus à chercher du côté de Grateful Dead, du Jefferson Airplane, (la voix d'Amber Webber offre ce mimétisme troublant avec le vibrato de Grace Slick) ou de Hawkwind que du côté de choses plus modernes.

On l'a cependant dit et répété : la valeur d'une musique n'est pas fonction de ses références anciennes ou modernes ; il s'agit encore une fois de savoir les digérer et à l'arrivée, ce sont les chansons qui font ressortir tel ou tel artiste du lot. Et là, qu'il s'agisse du riff stoner de "Stormy High", de la folk-rock à sandales et patchouli de "Stay Free" ou bien de l'envoûtant "Tyrants" à la puissance live, Black Mountain fait feu de tout bois.

L'une des forces de ce groupe est sans doute aussi de marier de façon très originale et des plus complémentaires la voix du leader barbu et allègrement trentenaire à celle vibrante et chaude de sa chanteuse percussionniste et de réussir une osmose de leurs deux voix dans des crescendo alertes.
Certains morceaux sont, aussi étonnamment que cela puisse paraître compte tenu de l'héritage musical convoqué, renversants d'originalité ; l'on pense à "Tyrants" mais aussi au punching ball qu'est la mélodie de "Wucan", l'envolée de "Evil Ways". Et 9 morceaux sur 10 réussissent à n'osciller qu'entre 3 et 3 et 6 minutes, ce qui n'est pas un mince exploit pour un groupe de cet acabit. Seule la magnifique odyssée de "Bright Lights" avoisine les 17', et lancinante, telle un scorie d'épouvante, captive d'un bout à l'autre. Pour les amateurs, l'ambiance de ce titre n'est pas sans évoquer le chef d'oeuvre prog des Damned, "Curtain Call" (1980) sur le Black Album. Et ce qui ne gâte rien, la pochette est magnifique. Celle-ci est l'oeuvre du clavier du groupe Jeremy Schmidt qui doit plus qu'un tribut aux oeuvres des illustrateurs de l'âge d'or du progressif des années 70.

En bref : des chansons aux airs de classiques pour un album appelé à tutoyer les sommets dans les palmarès de l'année 2008.

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Une version live de Tyrants :


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Tanger - Il Est Toujours 20 Heures Dans Le Monde Moderne (2008)

Difficile de s'en remettre : oui, le groupe qui a commis cette chose est le même que celui qui s'était fendu d'un album éponyme mémorable lors de ses débuts en 1997. Las, si l'intitulé est le même, si le groupe éparpillé a conservé son noyau dur (P.Pigeard/ C Van Huffel) , il y a à peu près autant en commun entre ces deux moutures de Tanger qu'au hasard entre The Who Sell Out et Who's Next.

Le dernier des mohicans underground français, sans doute soucieux de mettre de l'eau dans son vin, ("Allo, monsieur le banquier ? Pour mon autorisation de découvert....") est passé à totalement autre chose. Fini les mélopées sensuelles d'antan, terminé le prog-rock classieux encore présent jusqu'au Détroit. Adieu les racées sonorités du Hammond B3 et sa cabine Leslie, ces percus et ces flûtes arabisantes, ces longs mantras pénétrants et enivrants qui faisaient du combo parisien il y a encore quelques années, oh ! pas un précurseur de quelque musique que ce fût, mais plutôt un digne héritier, ovni en son temps, de formations progressives cultes du rock français des 70's : Eden Rose, Omega Plus, Melmoth,.....

Les textes étaient aussi précieux (dans les deux sens du terme) qu'ils sont bavards à présent. C'est clair : pour perdurer et trouver sa place dans le monde impitoyable du rock français, Tanger a vendu son âme, c'est aussi simple que ça. Tout dans cet album est de mauvais goût : de la pochette au rose dégueu mettant pourtant et pour la première fois en vedette les musiciens, aux paroles qui se fourvoient dans des rimes ou des références ridicules voire pesantes, pour qui a connu les années 80 ("C'est les watt qu'on préfère"). De fait Tanger, met les pieds dans la chanson française dans tout ce qu'elle a de plus vil au niveau des tics du phrasé (en plus n'est pas Jad Wio qui veut pour se permettre des leeeeeiii), des rythmiques poum poum papatchouk qui tournent dans le vide. Jusqu'au gimmick fatal et irrémédiablement rédhibitoire à savoir l'exercice du duo foireux tel qu'il peut être en vogue : ici on doit se fader l'inepte duo "Parti Chercher des Cigarettes" dont on devine, à l'aune de la voix (?) de Nina Morato à la limite de la trachéotomie que l'exercice relève du vécu.

Et pourtant, tout avait si bien commencé l'ancien blog MySpace, avait livré un nouveau morceau en streaming, le superbe "Météorites", sorte de variation nihiliste et apocalyptique de Suicide, avec ce son bourdonnant. La version ici est accélérée, a moins d'écho, bref c'est un mix différent et moins réjouissant. S'il était une chose que l'on pouvait souhaiter à Tanger bouffeur de tant de vache enragée, c'est que l'un des deux singles potentiels de l'album, ("Cyclotron"; "La Fée de la Forêt" et ses ouuuuuh, ouuuuuuh roboratifs) devinssent des tubes. Afin que toute cette démarche eût un sens (commercial, s'entend !).
Las il n'en fut rien et le groupe ne devait plus jamais donner signe de vie.

En bref : le chant du cygne d'un ex-groupe culte : rendez-nous nos "Manga", "Ebony", "L'immodeste attitude" et autres "Facel Vega" !


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La fée de la Forêt en live :


La Fée de la Forêt - live TANGER
par Tangerette

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Be Your Own Pet - Get awkward (2008)

Pochette faussement doucereuse et enjouée, tenues colorées, BYOP comme on les appelle cache bien son affaire. Hélas ça n'a pas suffit à empêcher la société bien pensante américaine à retirer du nouvel album quelques titres on va dire osés, un brin violents et sexuels. Pas mal pour de jeunes dudes âgés seulement de 18 à 21 ans. Pour moi aucune ambiguïté au titre Black hole, non non, aucune. Et le comble c'est que le groupe est mené tambours battants, c'est le cas de le dire, par une sacré meneuse au doux nom de Jemina Pearl, véritable Karen O. blonde. Objet du délire et de tout ce tintamarre censeur? 15 morceaux de heavy pop pied au plancher qui à défaut de révolutionner le genre enfoncent un peu plus le clou avec une énergie impressionnante. Plus proche du punk garage sanglant que de la balade écolière, BYOP la joue vite et fort, au sens brutal du terme. Bien loin de l'image teenage du Tenessee.

En vidéo ci-dessous, The Kelly Affair tube puéril et jouissif qui en voiture vous fera appuyer un peu plus sur la pédale. Mes amortisseurs n'ont plus eu à subir pareil choc depuis le Standing in the way of control d'une certaine Gossip girl. Les autres premiers titres, Super Soaked, Heart Throb ou Becky ont tendance à être les meilleurs. Après, vers la fin, ça s'essouffle et peut paraître un peu monochrome, excepté la quasi balade You're a waste. Un gros maxi aurait suffit. En profondeur du stye Yeah Yeah Yeah! , sur 33 minute chrono, la jeunesse Nashvilloise a la hargne et nous défoule. Et c'est pas si mal.

En bref : Vite et fort, insolent et subversif. Déjà pas mal pour un deuxième album à 21 ans.

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Le site officiel et le Myspace
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A lire aussi : UFO Goes UFA - Pop garage symphony N°9 (2008)


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22 juin 2008

Quarion - Bptchk! mix (2008)

Le webzine électro Boing Poum Tchak ! (bptchk!) a eu la délicieuse idée de mettre gracieusement en ligne un mix du prodige suisse Quarion, dont nous vous parlions en début d’année à l’occasion de la sortie de son remix du May I ? de Jamie Lloyd. Celui dont le (mini-)buzz s’est emparé livre sa sélection du moment, sexy et légère, agrémentée de quelques-uns de ses disques fétiches. Au programme de ce mix d’une heure, évidemment, de la deep-house de luxe, souvent éthérée, parfois vocale mais toujours groovy. On y retrouve pas mal de connaissances, avec le Français Art Bleek en ouverture, les Allemands Westpark (du label aussie Future Classic), ou encore Soultourist, éminent collectif membre de la Drumpoet Community. Le meilleur titre de la sélection reste sans doute celui de Quarion lui-même, "Vibrations", tiré de son dernier disque en date, The Workout EP. A signaler, en fin de mix, le planant "Falling Angels" de l’Irlandais John Daly, un artiste à surveiller de près.
Notez aussi sur vos tablettes que Quarion retournera le Social Club de Paris le 12 juillet aux côtés de Radio Slave. Immanquable.

Enregistrer la cible sous : Quarion Bptchk! mix

Tracklist :
Art Bleek - Modern spaces (Connaisseur)
Westpark - Unit Goin’ Steady (Future Classic)

Soultourist - Fo eva (Drumpoet Community)

Unknown/Three - 3.1 (Slowhouse recordings)

Lee Jones - As you like it - Recloose remix (Aus)

Quarion - Vibrations (Drumpoet Community)

Milton Jackson - Randoms - Hiro remix (Tronic soul)

Stephanie Cooke - Holding on to your love - Mood II Swing dub (King Street)

Omar S - Psychotic photosynthesis (Fxhe)

John Daly - Falling angels (Plak)

Dachshund - Holiday now (Perspectiv)

Le site de Drumpoet
Le Myspace de Quarion
Le Myspace du Social Club

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17 juin 2008

In(Fine) - Court-métrage

On aura qu'à faire comme si (In)Fine était le clip officiel des Ting Tings, nouvelle sensation rock n' roll tout droit venue d’Albion. On n’aura pas besoin de faire comme si Céline Petitgenay & Lili Sohn avaient réalisé ce court-métrage pour le marathon vidéo TV campus 2008 de Strasbourg : 48h pour faire un film de maximum 5 min avec le thème « y'en a plus ! ». Suivez le fil...


(in)fine
envoyé par madamelilite
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JC Menu - Lock Groove Comix (2008)

Suffisamment rare pour être remarqué, le micro monde de la BD rock'n roll s'enrichit ce mois ci d'une nouvelle série (une suite?) de comix dédié. Mis en page comme un fanzine, sans véritable fil conducteur, JC Menu part d'un cas particulier, son obsession pour le sillon terminal et infini présent sur certains vinyls collectors, pour finalement décortiquer son rapport à la musique qui est loin d'être celui d'un simple débutant. S'enchaînent alors sur un rythme quasi punk (l'objet est dense mais court) souvenirs de concerts marquants et chroniques de disques comprenant ce fameux sillon sans fin, simple subterfuge pour placer nombre d'anecdotes d'écoute musicale comme on en a tous. Par exemple, le cathartique et imaginaire passage à tabac du relou de service en concert, ou encore les petites habitudes qui nous font quasi inconsciemment sauter toujours la même plage sur un disque.
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C'est évidemment bourré de références: les Beatles forcément, mais aussi Neil Young, Pere Ubu, Jesus Lizard et autres noms plus obscurs. Mais plus que ça c'est surtout une déclaration d'amour au vinyl, à la musique en tant qu'objet, aux gadgets collectors, à tous ces détails superflus que le cd n'a pas et qu'il lui envie. En quatrième de couverture, JC, en train de couler, tient la tête hors de l'eau et brandit galette noire et fanzine froissé, tout en s'écriant : "Vinyl et papier forever!! Merde aux cd! Merde au MP3! Merde aux blogs! Merde à Myspace!". Un peu révisionniste mais bon, j'ai plutôt tendance à être d'accord donc... Quoi qu'il en soit c'est drôle, 100% rock et à 6 € chez l'Association ça en devient quasiment indispensable.
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16 juin 2008

Jazz Liberatorz - Clin d’œil (2008)

Il est toujours extrêmement plaisant de découvrir des artistes qui partagent le même fétichisme que vous. Les Jazz Liberatorz ne jurent que par le hip-hop soulful du début des années 1990 que j'ai toujours considéré comme le seul et unique hip-hop, par opposition au rap. Clin d'oeil est donc un hommage, en long format, à tous ceux qui, d'A Tribe Called Quest aux Roots, savent que le hip-hop est la prolongation directe du jazz - un peu à la manière de Madlib et de son Shades of Blue, qui rendait honneur au catalogue de Blue Note. Le seul listing des invités de cet opus suffit à en deviner le contenu: Sadat X des Brand Nubians, Fatlip et Tre Hardson (alias Slim Kid Tre) des Pharcyde, Buckshot de Blackmoon, etc. Pas mal pour un groupe de Meaux, Seine-et-Marne, cité davantage célébrée pour son brie que pour sa nu soul, et rebaptisée “MeauxTown” pour l’occasion.

Je ne m’étendrais pas sur les carrières bien pleines de Damage, Dusty et Madhi. Sachez que le plus ancien d’entre eux, Damage, est dans le circuit depuis le début des années 1980 et qu’il a fondé, aux côtés de ses potes Crazy B et Cut Killer, le supergroupe de DJ’s hexagonal Double H. Quant à Dusty et Madhi, ils ont forgé ensemble les beats d’une bonne brochette de rappeurs français (Futuristiq, Mystik, La Malédiction du Nord...). Réunis en 1999 sous l’écusson des Jazz Libz, les trois trentenaires ont mûri leur projet pendant près de dix ans avant de le sortir en janvier dernier. Entourés d’excellents musiciens, dont les petits génies du clavier Olivier M'Sellem et Olivier Portal, ils ont fourni à leurs prestigieux invités des instrus qui évoquent plus la joaillerie que le simple beatmaking.

Sur une base “boom-bap” classique, les beats impériaux et les samples sont sertis de percus caressantes, de flûtes fuyantes (“Ease my mind”) et de synthés liquides qui rappellent Lonnie Liston Smith (“Cool down”, “Speak the language”...). A la fin de chaque plage, les guests ont une minute pour parler de leur rapport personnel au jazz et de leurs influences. Ainsi entend-on J Sands évoquer le souvenir de son grand-père écoutant Miles Davis, ou T. Love déclarer sa flamme à Billie Holiday, Max Roach et Thelonious Monk. T. Love, justement, délicieuse chanteuse-poétesse américaine installée à Paris, pose avec Fatlip pour l’un des temps forts de l’album, “Genius at work”, sur un tempo saccadé en rupture avec le reste des titres. Autre grand moment, le très feutré “Take a down”, qui confirme s’il en était besoin le talent de storyteller de Buckshot. En fin d’album, “Speak the language” nous emmène sur des territoires purement soul où s’illustre la diva new yorkaise Lizz Fields, avant que la formation parisienne Soul Clan ne vienne clore ces très douces hostilités par “Qidar”, puissant jam funky aux légers accents moyen-orientaux. La cohérence du projet va jusqu’à l’artwork et à la typo, largement inspirés des pochettes de Black Jazz Records, le label du pianiste Gene Russell. Le clin d’œil est certes appuyé, parfois redondant, mais l'insistance a parfois du bon.

En bref : Une pléiade d’invités de première classe pour un album de hip-hop comme on n’en fait plus, œuvre de trois perfectionnistes français maniaques de jazz et de soul. Essentiel.



Leur Myspace
Celui de Kif Records

A lire aussi : Digable Planets - Reachin' (1993)

Quelques titres :

free music


L’amusante vidéo promo de l’album :
Jazz Liberatorz

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15 juin 2008

Scarlett Johansson - Anywhere I lay my head (2008)

Il fallait presque s'y coller... ne serait-ce que pour ramener son verbe et laisser se déverser le flot amer de la critique. Comme bon nombre de ses confrères et consoeurs du septième art, la nouvelle égérie [poumonnée] du cinéma américain Scarlett Johansson se veut une artiste complète. Elle s'offre pour se faire un premier disque à l'enchanteresse pochette, Anywhere I lay my head, où la belle gosse reprend quelques titres de l'excellent et inénarrable Tom Waits. A mon grand regret, je ne pourrai être ni sévère ni vraiment médisant... quoique que...

Quitte à ne faire un disque que de reprises, un seul titre a été composé par Scarlett Johansson, le choix du répertoire du crooner maudit californien relève déjà du bon goût. C'est appréciable. Encore faut-il ne pas le vandaliser ou se la branler, en bon bobo pompeux ou en actrice hollywoodienne gâtée. L'ambition se doit d'être en présence car évidemment, réinterpréter les chansons racées de Tom Waits ne saurait être exercice aisé et peut facilement passer pour de la plus pure prétention. Pour éviter cet écueil, Scarlett Johansson s'est attaché les services du doué David Andrew Sitek, membre du groupe new-yorkais TV on the radio et multi-instrumentaliste agité du bocal. N'en déplaise à Jean-Daniel Beauvallet l'éminence grise musicale des Inrockuptibles, et au risque de passer à ses yeux pour un « sot/sourd se contentant d'une écoute bâclée et des oeillères de [ses] a priori » (cf. son article paru le 25 mai 2008), je ne me répandrai pas sur le merveilleux « entrelacs de textures et atmosphères au service de la voix spectrale » de la demoiselle... Cliché. Je ne ferai pas non plus de cet album une des pépites de l'année 2008. Désolé, pas de jeune fille à la perle pour moi.


Certes, production il y a, et production plutôt ouvragée de surcroît, j'en conviens. Dès les premiers accords de synthétiseurs de « Fawn », l'ambiance est en place, richement accompagnée par une orgie « free » de cuivres et clochettes. Effectivement, les territoires de Scarlett et David sont brumeux et troublants. Ils perturbent. « Town with no cheer », qui succède à cette introduction instrumentale, offre déjà la preuve qu'il n'y a pas péril en la demeure et pas de saccage en perspective. La voix de l'actrice surprend, basse placée et noble, en retrait derrière les nappes riches et foisonnantes de la musique concoctée par Dave Sitek. La version de « Falling down », titre de l'album Big Time (1988), est bien maîtrisée et parvient par moment à faire oublier son créateur. Mais à réécouter l'original, on se dit que cette débauche d'efforts et d'effets est vaine et illusoire.


En réalité, le vrai problème pour moi est que cette album soit quasi-exclusivement composé de reprises et qu'il relève plus du talent d'arrangeur et de producteur de Sitek que du don de la nouvelle muse « woody allen-ienne ». Scarlett Johansson est juste, ne minaude pas et ne fait pas injure à Tom Waits, c'est un bon point (je crois que vous aurez compris mon inclinaison pour Waits, auteur qui a entre autres collaboré avec William S. Burroughs...). Pour autant, cela ne fait pas de Anywhere I lay my head une oeuvre personnelle et touchante. Manque la création. En dépit de ce que peuvent penser certains, la musique n'est pas seulement re-création. Cependant, pas de crime de lèse-majesté ici, un disque bien agencé et qui dévoile une voix mature et profonde. Autant de raisons de ne pas tourner le dos à Scarlett et d'attendre avec attention un deuxième essai plus intime de la miss.


En bref : Un disque de reprises de Tom Waits respectable, finement et peut-être trop produit. Un premier jet brumeux et féérique pour Scarlett Johansson, honorable mais pas le chef d'oeuvre annoncé.




Le site de Scarlett Johansson


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A lire aussi : She and him – Volume one (2008)


Le clip de « Falling down » :



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14 juin 2008

Ratatat - LP3 (2008)

L’annonce faite il y a quelques semaines de la sortie de LP3, le nouvel album de Ratatat ne vous a certainement pas trompé. Mes atomes crochus pour le duo new-yorkais auront recommencé à s’agiter. Un léger trouble provoqué par cette délicieuse particularité qu’avaient les deux précédents opus de m’envelopper dans un univers touffu et mystérieux. Emmené par le guitariste Mike Stroud et le mixeur/producteur Evan Mast, les deux potes de lycée ont depuis le départ œuvré dans l’instrumental. Des morceaux à la structure simple et efficace dont la base repose essentiellement sur l’utilisation du tiercé guitare, basse, synthétiseur. Et comme il serait difficile de demander à Ratatat de changer des habitudes déjà bien ancrées, les new-yorkais n’auront pas bougé d’un iota en trois albums, toujours chez XL Recordings.

La griffe Ratatat n’est ni véritablement révolutionnaire, ni totalement conformiste. L’équilibre de l’équation repose sur le velouté et la pesanteur de la production d’Evan habilement écorchée par les saillies de guitare de Mike ; sur l’utilisation d’instruments rock et sur une production orientée électronique sans jamais tomber dans le genre hybride trop rapidement étiqueté électro-rock. La dimension instrumentale est certainement leur plus grand atout comme leur plus grand défaut : leur univers fonctionne en totale autonomie et ne supporte que très peu l’introduction d’éléments hétérogènes. La cohérence d’ensemble n’en serait que malmenée et le charme rompu. La comparaison avec quelques groupes de rock instrumental des années 60-70 n’est pas fortuite. The Ventures ou encore Joe Satriani ont composé des mélodies terriblement accrocheuses mais d’un style identique. Une recette reproduite à l’envi et n’intégrant que peu d’éléments novateurs.

Alors, je dois peut-être l’avouer, je suis assez mitigé concernant LP3. D’abord, la pochette est moche. Le matou rugissant de Classics a été remplacé par une statuette sur synthétiseur sur fond de flou artistique baveux. Je passe. Et puis les inquiétudes qui étaient apparu à l’écoute de "Shiller" se sont révélées justifiées. Le rythme d’ensemble s’est ralenti. La bestiole a le cafard ("Shiller", "Mi Viejo", "Flynn", "Black Heroes"), baille aux corneilles ("Bird Priest"), s’amuse à faire des ronds d’eau ("Imperials")… Des occupations dignes d’un fauve neurasthénique enfermé dans la cage d’un zoo. N’allez cependant pas croire que le reste de l’album est aussi peu intéressant qu’une visite dans un parc animalier. L’épique Mirando et la cavalcade Falcon Jab font presque oublier un parcours monotone à la manière du titre Brulee. Même les nouvelles textures dont leur maison de disque avaient vanté n’apportent qu’un intérêt mineur dans la composition des morceaux. Pas vraiment en phase avec l’excellent clip de Mirando où les explosions, les poursuites dans la jungle version Alien Vs Predator laissaient présager plus qu’une simple ballade de santé.

En bref : Peu inspiré, LP3 n’est pas l’album le plus intéressant du duo. Les quelques réussites sont noyées dans la masse fastidieuse des autres morceaux.




Le Myspace et le site.

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