31 janvier 2008

Dan le sac Vs Scroobius pip - Thou shalt always kill Ep (2007)

Si vous êtes passés à travers, Thou shall always kill est l'énorme tube buzz du moment et on le doit au duo le plus improbable de la planète zik, formé par le dj à rouflaquettes Dan le sac et le barbu à casquette Scroobius pip (sic). Le mauvais goût a enfin ses représentants (voir pochette). Comme quoi on peut porter des chemises à carreaux, parler comme Mike Skimmer (The Streets) et être à la pointe de la mode. Deux british qui nous ressortent le coup de Loosing my edge de LCD Soundsystem, hymne hip hop insolent et beat électro dévastateur. Du Grindie. Fait de Grime (rap anglais) et de rock indé, de bric et de broc.

"The Arctic Monkeys... Just a band. Bloc Party... Just a band. The Nex Big Thing... JUST A BAND. Thou shalt not stop liking a band just because they've become popular" ou encore "Thou shalt not judge a book by it's cover. Thou shalt not judge Lethal Weapon by Danny Glover". Voici les textes. Bourrés de références avec une vanne dans chaque phrase. Du spokenword comme on dit, placé sur un beat pas dégueulasse. Tout y est en fait. Clip, textes, look, zik. Du grand art second degré. L'album publié par Lex Records et financé par Warp devrait faire mal.

En bref: Les 10 commandements et plus encore délivrés par un prêcheur référencé et un dj anachronique. Presque messianique.

Le clip :


Lire la suite

30 janvier 2008

Thomas Fersen - Duo Ukulélé à La Teste de Buch le 23 janvier 2008

C'est dans la sympathique salle Pierre Cravey que se déroule ce soir le concert du plus singulier des chanteurs français, Thomas Fersen. J'avoue avoir un peu décroché depuis Le bal des oiseaux en 1993, ne pas avoir beaucoup suivi sa carrière, un peu par flemme même si j'avais conscience de son talent de conteur et de sa nonchalante folie. Mais quand Mr Fersen passe pas loin de chez soi et qu'en plus c'est dans le cadre d'une tournée ukulélé aux côtés de son cher guitariste Pierre Sangra, je n'en fais ni une ni deux et je me rends sur place.

Complet, bouillonnant, fan, en liesse, le public est acquis à la cause. Thomas, en pantalon pattes dèf et chemise à jabots nous accueille avec sa fameuse guitare hawaïennes à 4 cordes qui connaît un renouveau ces temps-ci. Mandoline et soprano, c'est un véritable arsenal d'instruments Playmobil qui occupe tout l'espace. Et la voix, grave et désinvolte, qui revisite un répertoire désormais classé patrimoine national (Zaza, Bella Ciao, Le chat botté...) en acoustique minimaliste. Thomas Fersen est un poète (Brassens pas loin sur Monsieur), un jongleur de jeux de mots et de rimes animales, tout comme son champ lexical (La chauve souris, Le chat botté, Le bal des oiseaux...). Ce soir Mr Fersen ne manquera jamais de répartie ni de finesse d'esprit. En témoigne son anecdote confiée au public, celle où il se retrouve seul avec sa phlébite et son couteau. Truculent.

Finalement Thomas chante plus que ce qu'il ne joue, mais Pierre Sangra remplit largement son rôle d'accompagnateur qui lui va même trop petit. Excellent dans tous les styles, ses sonorités acoustiques d'une autre époque s’accordent à merveille avec la chanson française contemporaine de Thomas. Presque meilleur qu'en studio (désolé), le public est conquis et demande 3 rappels, pas moins. Une bien belle soirée en musique, faite d'histoires du quotidien et de gens ordinaires adroitement passés sous le bistouri d'un artiste de 44 ans que je devrais à présent écouter d'avantage.

A noter que cette tournée a lieu dans le cadre de la sortie du disque Gratte-moi la puce, best of de poche qui reste bien dans l’esprit du concert.

Le Myspace

Le site de La Teste de Buch

Des extraits du concert de Bruxelles :

Ukulélé Session Thomas Fersen
envoyé par cplesoir

les meilleurs moments de Gratte moi la puce:

free music

Lire la suite

26 janvier 2008

Peter Visti - Balearic love / Bad weather EP (2007)

Peter Visti a 40 ans. Il est chauve et Danois. Son métier est producteur-dj de musiques électroniques, option « baléaric beats ». Il a un site myspace avec des photos de son fils, de ses étagères à vidéos et de ses amis en boîte de nuit. Et il aime l'amour. Hormis ces informations cruciales, je ne connais rien de lui si ce n'est qu'il a signé sur le label belge Eskimo recordings et a donc le privilège d'y cotoyer le pape disco Daniele Baldelli et les maîtres nordiques Lindstrom et Prins Thomas. Il est aussi coupable d'un maxi à tomber par terre : Balearic love / Bad weather. Deux épopées inoubliables de 10'30''.

Le baléaric beat, historiquement, provient des Baléares, du son que l'on écoute au petit matin au sortir des chaudes soirées d'Ibiza. Généralement une musique house tranquille, teintée de sonorités pop et d'influences latines. Pour Peter Visti, le balearic se transforme en une expérience, une musique hantée, lanscinante, presque métaphysique. Des arpèges de piano classique rencontrent des voix fantomatiques sur un beat en forme de boîte de conserve. Des nappes sombres, de légers accords de guitares et des basses étouffées grésillantes sont aussi de la partie. Et je ne peux omettre ces synthétiseurs, parfois solennels parfois robotiques, qui taquinent les tympans. Au final, une aventure de dix minutes entre apnée profonde et grandes bouffées d'oxygène, errements et lévitation. C'est magistral et fin, chapeau bas.


« Bad weather », deuxième titre du même maxi, nous entraîne sur un terrain nettement plus disco et moins obscur que « Balearic love », mais là aussi l'écoute tient presque du parcours initiatique. Balance ton beat et tes synthés Peter, me voilà déjà contenté ! Entre des plages électro-disco dynamiques et des interludes en totale suspension, on se sentirait presque égaré. Mais le beat rejaillit rapidement et nous prend vivement au collier. Et les synthés aiguisés du Danois nous transpercent à nouveau en mode starlights night-club. De Concorde à Passy le temps s'est courbé. Où étais-je ?


En bref : House baléarico-disco initiatique, incroyable.





Site myspace de Peter Visti

Eskimo recordings distribués en France par La Baleine


Lire la suite

25 janvier 2008

Jeff Mills au Rex - Automatik 10 ans limited (19/01/2008)

C'est toujours pareil lorsqu'on voit des légendes. On n'est jamais à l'abri d'une déception, surtout quand il s’agit d’un Dieu vivant comme Jeff Mills. Mais le Wizard, pionnier de la techno aux côtés de Kevin Saunderson, Juan Atkins et Mad Mike Banks, fondateur en 1990 du label/groupe Underground Resistance, puis d'Axis (1991) et Purpose Maker (1995), n'est pas de ceux qui se reposent sur leurs lauriers.

Lui qui a toujours été d'une fidélité exemplaire au Rex et à ses soirées Automatik depuis 10 ans ne pouvait se contenter d'un mix routinier pour célébrer l'anniversaire de la doyenne des soirées techno françaises, hebdomadaire qui plus est. Le résultat : une déflagration sonore si retentissante que les prochaines nuits, quelles qu'elles soient, me paraîtront mornes pendant un bon moment. Pour chauffer la salle avant l'arrivée de la star, l'Espagnol Angel Costa, en navigation perpétuelle entre Mayorque et Francfort, balance un set lourd et pimpant où les infrabasses taquines de Loco Dice croisent la pop sous codéine de Trentemoller. Un warm-up idéal, même si d'intolérants adorateurs de Mills éructent quelques “Casse-toi” bien sentis. Vers 2h30, un homme noir, discret et peu communicatif, prend place dans la cabine DJ. Une vitre l'empêche d'être en contact direct avec les clubbeurs, lui qui ne semble pas extrêmement chaleureux.

D’emblée, le tempo monte, monte… Les synthés forment une nébuleuse moelleuse où l'âme ne peut se lover, contrariée par l'envie irréfragable de se mouvoir qui monte dans les jambes de chacun. Enorme son de Detroit. Dense et radical. Basique. Grandiose. Au moment le plus inattendu, au terme d'une progression répétitive et tendue, résonne soudainement le timbre pur d'un saxophone ténor. Le beat se tait. Le cuivre soulève les hurlements des danseurs, avant qu'une rythmique funky indécente ne transperce le Rex de part en part. Un piano façon early house embraye et accroche des sourires béats sur les faces. L'homme que l'on nommera Driv' manque de souiller son pantalon sous la pression de ce mix monumental. Quelques boucles acides plus tard, c'est un spoken word sensuel et brésilien qui vient titiller nos tympans. Ravage cérébral.

En dehors de son classique The Bells et de l’hymne house Move your body de Marshall Jefferson (1987!), je n’ai reconnu aucun disque et je donnerai volontiers quelques dollars à celui qui me fournira cette fabuleuse playlist. Au-delà de cette sélection judicieuse, la technique du maître, surtout, a frôlé l’irréprochable. Concentré sur ses trois platines, le visage fermé, il est resté sans faiblesse. Au petit matin, après des heures de gigotements extasiés, le courage nous a manqué pour honorer le retour d'Angel Costa aux platines. Ce n’était simplement pas possible. Pas après ça.

Le site d'Axis Records
Lire la suite

24 janvier 2008

Sebastien Tellier - Sexuality (2008)

Le fantasque barbu electro-volubile est de retour et l'on ne peut que s'en rejouir. Après ses escapades cinématographiques, pour les bandes originales de Narco et Steak, et deux ans après le très subtil Sessions Sebastien Tellier revient avec un album au titre évocateur : Sexuality. Un disque effectivement placé sous le signe de l'érotisme, et quoique non exempt de défauts (une prod' à mon goût globalement un peu trop léchée et légèrement formatée à la Air), une belle oeuvre à balader sur vos platines. Ambiance suave, feutrée et orgasmique garantie. Sebastien Tellier, une fois de plus hors des modes, parfois hors du monde à n'en pas douter...


Première impression kitsch avec un morceau d'ouverture imprimé d'un texte français aux profondeurs abyssinales... « Je sens la chaleur de l'été... je vois les filles qui changent de couleur de peau... je vois le ciel bleu t'épouser ». Petits accords de piano délicats et synthé cheesy à souhait. En fin de compte, belle introduction. Un ample synthé nous accueille pour le second titre de l'album, « Kilometer », aux surprenantes intonations rn'b. Des soupirs de plaisirs retentissent par moment. Et l'on comprend ce penchant « grivois » lorsque l'on connait Sébastien Tellier et notamment son récent diagnostique : « Je me suis aperçu que désormais seul le cul m'intéressait ». Limpide. En version soft ce pourrait être le leitmotiv de Sexuality, douce ode aux sens, aérienne et charnelle.


« Look », troisième titre de l'album bien nappé mais légèrement trop mou, me laisse quelque peu de marbre mais « Divine » est plus catchy et ma caboche se prend à dodeliner sur un beat plus enjoué. C'est sur le cinquième titre, « Pomme », que je sens mon sourire se graver. Nonchalant et excessivement libidineux ce morceau constitue la BO parfaite du film X des eighties. Sacré Seb'. Des orgasmes de femmes se détachent. Nous écoutons bien Sexuality, pas de doute. Mais c'est pourtant le doute et l'égarement qui m'envahissent ensuite sur « Une heure »... avant de retrouver un peu plus de chaleur avec l'entrée en piste de basses arrondies et lascives. La voix de Tellier pénétrent littéralement mes conduits auditifs. Explosion de sonorités enivrantes et fluides jusqu'à la lie.


Le registre change quelque peu avec « Sexual Sportswear » et ses synthétiseurs quasi-religieux. Titre en lévitation, son beat atmosphérique et spatial nous exile l'on ne sait où. On ne peut s'empêcher d'y saluer Guy-Manuel Homem Christo, moitié des Daft Punk et producteur de l'album. La love song « Elle » paraît ensuite bien fade avec ses synthés généreux et barbapapesques mais l'androïde « Fingers of steel » nous ressaisit aussitôt. En somme, Sebastien Tellier nous balade avec un doigté expert.


L'aventure se clôt sur « L'amour et la violence », magistral avec sa partie de piano classique grisante, ses déroutantes paroles en français et son crescendo de synthé stratosphériques. Trop d'ajectifs pour évoquer Sexuality mais voilà un album riche. Plutôt rare.


Atterrissage dans les bacs courant février. A noter, le très bon remix de « Sexual sportswear » par le pensionnaire d'Ed Banger SebastiAn. Un titre disponible sur le maxi de Sebastien Tellier « Sexual sportswear », évidemment.


En bref : Libidineux et charnel, un album électro enivrant qui recèle de trésors.





Sebastien Tellier - Sexual Sportswear









Sebastien Tellier - Sexual Sportswear(Sebastian rmx)









Le clip de Sexual Sportswear :




myspace.com/telliersebastien



Lire la suite

Rivers Cuomo - Alone, the home recording of Rivers Cuomo (2007)

Comment faire confiance à quelqu'un comme Rivers Cuomo plus communément appelé tête pensante de Weezer? Personnage insaisissable du paysage rock des années 90 et pourtant l'un des plus importants et prolifiques. Plus de 800 titres issus de son poignet, 10 ans de carrière et à son actif la paternité d'un genre qu'on appelle maintenant la power pop. Qui mieux que Weezer représente ce feeling adolescent d'une jeunesse californienne? Qu'il produise machines à tubes ou songwriting mélancolique, le binoclard solitaire est de toute façon à mille lieues de là où l'on croit qu'il est. Aux dernières nouvelles le monsieur prépare une bio qu'on dit colossale, pratique assidument la méditation Vipassana (allez savoir ce que c'est), assume une abstinence sexuelle de 2 ans (?!?), mais surtout, prépare en douce la sortie du prochain Weezer pour cette année avec l'aide du grand Rick Rubin.

Et donc que peut-on s'attendre à trouver dans un album comme celui-ci? Des face B, des démos, des unrealesed, des titres secrets cachés dans des bas de laine? Un peu tout ça en fait. A peu près dans l'ordre chronologique, à savoir de 1992 à 2007. Des reprises aussi de Gregg Alexander, Ice Cube ou Dion and the belmonts. Mais ce que les fans attendent surtout ce sont des morceaux issus de l'albôm phantôme de Weezer, celui qui aurait du voir le jour entre The Blue Album et Pinkerton, le mythique Songs from the black hole datant de l'époque où Weezer était encore béni et moins perturbé par la célébrité. Au final 18 titres au son inégal, irréguliers comme la carrière du groupe cité plus haut (même si je les ai tous aimés ces putains de disque, chacun à leur manière).

Effectivement, de Longtime Sunshine à Superfriend, on trouve les 5 meilleurs titres du disque, avec un style reconnaissable parmi cent autres. Rivers apparaît plus posé, plus sûr de lui. Blast off! est du pur Weezer. Tout comme la première version de Buddy Holly, celle enregistrée dans une chambre d'ado par un artiste complexe, la même que l'autre en plus brute. Wanda (You're my only love), et les années 90 revivent. Le plus beau titre folk. En queue de peloton, Little Diane et I was made for you (Rivers est fan de Kiss) sont là pour rappeler que s'il veut faire un tube, une chanson immédiate, il le fait. Comme ça. Tranquillou.

En Bref: Un disque sorti du placard de l'un de ces artistes inconnus mais majeurs dans la musique nineties. Toutefois réservé aux fans et aux curieux.
_
_
_
_
"Blast Off!" le clip


Rivers Cuomo - Blast Off!
envoyé par epb21
Lire la suite

22 janvier 2008

Cat Power au Bataclan (21/01/2008)

Cat Power va mieux, et ça se voit. Ceux qui avaient vu son concert au Grand Rex l’année dernière n’ont pas été surpris. Moi qui ne l’avais pas vue depuis plus de trois ans, j’ai été bluffé par la transformation de Chan Marshall, de l’alcoolique angoissée et capricieuse à la star maître d’elle-même, généreuse et, semble-t-il, heureuse. La chrysalide faite papillon, pour reprendre la métaphore la plus usée du monde.


A la Boule Noire, en 2002, elle avait offert un concert somptueux et foutraque, seule en scène, martelant le parquet de coups de bottes appuyés lorsque, posée au piano, elle envoyait sa voix fêlée taquiner les étoiles sur les chansons de ses meilleurs albums, What would the community think (1996), Moon Pix (1998), ou Covers Record (2000). L’interprétation de Moonshiner, l’une des plus belles chansons de Dylan, avait atteint des sommets de beauté dépressive. A la Cigale, en 2003, entourée d’un groupe lassé par ses poses et ses divagations éthyliques, son show outrancier avait été assez mal accueilli, malgré l’intensité de certains titres auxquels violon et violoncelle conféraient un lyrisme débordant.

Mais c’est à sa (contre-) performance au Café de la Danse, en 2004, que je ne pouvais m’empêcher de penser en pénétrant l’enceinte du Bataclan, hier soir. Dans ce caveau froid comme la mort, devant un public apathique voire hostile, la belle nous avait donné le spectacle navrant de sa déchéance. Tenant une setlist griffonnée dans ses mains tremblantes, elle avait esquissé des ébauches de chansons émaillées de « Sorry… » et de fausses notes. Les sons restaient coincés dans sa gorge tant l’angoisse et les vapeurs de whisky l’étreignaient. Ne supportant pas la lumière des projecteurs, elle avait insisté pour les faire éteindre, si bien que, dans l’ombre, les spectateurs peinaient à distinguer ses traits. Elle était repartie pliée en deux, malade, désespérée. Certains avaient demandé, en vain, le remboursement de leurs billets. Un journaliste l’ayant interviewée à l’époque se rappelle avoir descendu un gros pack en deux heures d’entretien ponctuées par les rots sonores d’une demoiselle mal dans ses pompes.

Mais la nouvelle Chan Marshall est arrivée. Après avoir touché le fond et stoppé les concerts peu après la sortie de The Greatest (2006), son dernier album en date, la chanteuse originaire d’Atlanta a fait un tour en cure de désintox et s’est installée à Miami. Elle a maigri, bronzé, et repris goût à la vie. Dans la foulée, elle a préparé Jukebox, son deuxième album de reprises, sorti hier, où elle donne sa version, souvent méconnaissable, de ses morceaux de blues et de soul préférés. Un disque malheureusement un peu lisse, trop bien produit. Et c’est là le problème. De Cat Power, on attend, et c’est il faut bien le dire assez malsain, une fragilité excessive, un dolorisme apitoyant qui ne peuvent s’accorder avec une santé et un bonheur parfaits.

Quand, dans un tee-shirt blanc trop large et terriblement sexy, elle donne une version très rock de Satisfaction, on en vient presque à regretter celle du Covers Record, sombre et évanescente, tout en acoustique. Quand une voix pleine et franche nourrit de vibrations soul le mythique Naked if I want to (une chanson de Moby Grape présente sur le Covers records et reprise dans Jukebox), on pense en soupirant aux chuchotements sensuels de l’époque alcoolique. Il aura donc fallu se départir de ses souvenirs pour apprécier une artiste libérée de ses démons, se la jouant Janis Joplin sur des blues éraillés. Metal Heart, un de ses plus beaux titres, en sort même grandi. N’empêche. Il faudra s’y faire. Désormais, Chan demande qu’un projecteur éclaire son visage - « for the audience », se trémousse avec aisance, adresse des clins d’œil à ses fans et leur distribue des roses blanches. Curieuse métamorphose…

Sa page sur le site de son label, Matador




Lire la suite

18 janvier 2008

Akron/Family - Love is simple (2007)

Dans la série ce qu'il ne fallait pas manquer en 2007, Akron/Familiy fait figure de coup de coeur instantané (voir pochette). 3ème album déjà pour ces 4 new yorkais sang pour sang folk freaks soutenus par Young Gods, les protecteurs de Devendra Banhart. C'est plus particulièrement Michaël Gira (ex Swans) qui les a vraiment lancés, non sans un échange de bons procédés d'inspiration musicale avec les Angels of light. On nage dans ce monde là et la sonorité n'est pas sans rappeler Animal Collective. Contagieux, efficace, osé, fou. C'est un peu tout ça Love is simple. A la sauce Lennon, McCartney, Zappa, Young. Ultra fraternelles, ces transes hallucinées déchaînent amour, passion et espoir sur des refrains imparables.

Ed is a portal, premier véritable coup de gueule, avec sa foule en liesse et son rythme renversant. On se sent à la foire d'un marché. Larsens, changements de tempo, reverbs, accents celtiques et cascades de choeurs, tout est là pour se retrouver gentiment barré et dans un état second à l'écoute de ses chansons. Don't be affraid/Love is simple enfonce le clou par un slow sixties d'anthologie. Des choeurs angéliques vaguement synthétiques. Je pense au Beta Band sur le country rock psyché de I've got some friends, poussant par moment jusqu'au bruitisme lo fi pas toujours agréable. Mais les titre sont riches et rebondissent en cours de morceau, comme Queen savait le faire.

Après deux ans de tournée les 4 voix sont époustouflantes. Et puis il y a ces grands élans d'incantations hippies, puissants et mélodiques, véritables hymnes pour barbus à lunettes. Poussant parfois même le bouchon jusqu'au gospel noisie qu'est le magnifique There's so many colors, transe de 8min11 aux arpèges pop seventies, la guitare est magistrale et les chanteurs démentiels. Ou comment trouver le refrain qui tue sur Phenomena, fable liverpoolienne du plus bel effet. Ca transpire la musique. Pony's O.G. calme le rythme et revient à la ballade classique mais suspendue, quelque part. Enfin, dans le final Love, Love, Love 2, la boucle est bouclée en conclusion hédoniste, Love is simple, grâce à Akron/Family en tous cas.

En bref: Coup de coeur énorme pour ce quatuor hippie from New York qui revisite avec joie, bonne humeur et talent tout ce que la musique a fait de bien ces dernières années, dans le genre.

Love is simple en live rangé:


Ed is a portal en live bordélique:



Lire la suite

15 janvier 2008

Inauguration du Social Club (16/01/2008)

En lieu et place du déjà défunt Tryptique s’ouvrira mercredi 16 le Social Club, nouvelle boîte branchouille à la programmation solide et à l’ambition hypertrophiée, dirigée par des hommes d’expérience : Antoine Caton, Manu Barron (programmation du Printemps de Bourges, de Dour ou Villette numérique), Arnaud Frisch et Antoine Caudron (création de la Techno Parade, festivals Astropolis et Cabaret remixé ; label et tourneur UWe…). En plus de briguer la place de nouveau club de la hype parisienne, les heureux proprios souhaitent faire du lieu, conçu par le collectif d'architectes EXYZT, le rendez-vous incontournable des aftershows, défilés, expos numériques ou plastiques, conférences et tutti quanti. Ils y parviendront, sans nul doute, avec l’aide du célébrissime designer Laurent Fétis, capable de conférer une identité visuelle excitante à un chiffon souillé.

Pour déflorer le rutilant dancefloor, Etienne de Crecy, Midnight Mike, Gildas & Masaya (les boss du label Kitsuné), et Zongamin (Ed Banger) ne pourront que faire l’affaire. Et, pour annoncer la multiplication future des concerts au Social Club, les rockers belges de Das Pop viendront électriser les happy few détenteurs d’une invitation. La programmation des mois de janvier et février permettra aux absents de se rattraper très largement puisque se produiront, pêle-mêle, Carl Craig, Felix Da Housecat, Yuksek, SebastiAn, Busy P, Extrawelt, Teenage Bad Girl, The Hacker, Ivan Smagghe, Goose, 2 Many DJ’s et quelques dizaines d’autres anonymes… Alors, en espérant que l’accès au club réponde aux exigences démocratiques, souhaitons longue vie au Social Club !

Social Club, 142, rue Montmartre

Lire la suite

11 janvier 2008

Leslie Winer - Witch (1999)

Et si seulement quelqu'un pouvait rallumer la lumière ? S'il vous plait, car un mystère entoure le parfum de cet album sortit en 1999, soit quelques huit années après son enregistrement aux alentours de 1990-1991. Depuis, Witch demeure incompris, inexpliqué.

Le parcours de Leslie Winer est en clair-obscur. D'abord mannequin réputée, elle a fréquenté l'underground new-yorkais. Devenue l'amie et confidente de figures comme William Burroughs, elle aura une liaison avec Jean Michel Basquiat – auteur de la photo sur la pochette de l'album. C'est après avoir quitté sa carrière de mannequin qu'elle produit son seul disque pour tomber dans un quasi-anonymat. Depuis, elle ressurgit épisodiquement pour poser sa voix avec différents artistes (Bomb The Bass, Mekon).

Witch est enregistré en même temps qu'un certain Blue Line de Massive Attack. Mais avec des tonalités new wave et dub, il est difficile de l’assimiler directement à la vague naissante du trip hop. On retrouve néanmoins quelques prémisses dans ses compositions : des rythmes lents, une basse lourde, des mélodies à l'aspect généralement mélancolique et calme.

La musique de Leslie Winer superpose des rythmes auxquels ne correspondent pas nécessairement de mélodies définies. Sur le morceau N 1 ear, ils fonctionnent de manière indépendante : le rythme ne sert pas de mélodie, chacun emprunte des chemins différents. Sa voix, posée selon la technique du talk over, prend des tonalités à la fois suave et amère. Etouffée, sourde, on la sent dédaigneuse, inassouvie et indifférente. Et d'outre-tombe, elle ânonne un passé désincarné, un présent inefficace… sans importance. Monocorde, elle ne laisse rien transparaître. Sa musique n'est pas le lieu de l'exposition de ses sentiments, mais le réceptacle dans lequel elle a pris soin de les enfermer. De sa boite de pandore s'échappent des textes cruels, provocants, comme dans N 1 ear :

And if I get bashed I must have provoked it
And if I raise my voice I'm a nagging bitch
And if I like f**king, I'm a whore
And I don't wanna I never wanna
(you never wanna, you never wanna)

Mais elle sait aussi se faire plus pensive, notamment sur Dream 1 :

Yeah, keep it simple
Come on
I had the strangest dream
The book that I read
And the stone that I found

And the tree that I saw
And the animal that I knew
And the language that I spoke in
And the script that I wrote
Shall I?
Shall I tell you?
Shall I tell you what I've been dreaming?

Alors, manifestement punk, poétesse, contradictoire… Sorcière ? Fuck off ! Elle s’en fout la sibylle, elle ne m'a jamais menti ; elle ne s'est jamais trompée. Reste de la musique, et des paroles.

En Bref : A la fois monotone et nuancé, séduisant et repoussant, Witch cultive les paradoxes pour nous perdre dans un dédale onirique et raffiné.

Son blog


Lire la suite

Midnight Juggernauts - Dystopia (2007)

Retenez bien ce nom, vous risquez d'en entendre parler. Enfilez votre combinaison spatiale musicale et installez vous bien confortablement. Température au sol: 18°, enceintes: ok, ampli: ok, platine: ok. Paré au décollage. Le trio électro fluo pop de Melbourne, après quelques maxis et remix chez Modular (il parait que c'est bien), livre en cette année 2007 un disque électro de science fiction biberonné aux synthés entêtants et exemplaires. Tel un voyage mystique à travers les années, les Aussies Vincent, Andy et Daniel revisitent (ou inventent) le space disco et accouchent d'un objet musical non identifié où rien n'est à jeter.

Ils ont fait la première partie US de Justice, ils ont la bénédiction des pères fondateurs de Daft Punk et ont des sérieux relents de culture eighties. Ils citent taquinement Metallica, Patrick Cowley (!) ou l'Electric Light Orchestra et on ne sait pas trop comment les définir. Pourquoi pas néo electro pop rock gothique rétro futuriste. Ca me va bien. Gothique parce que Sister of mercy n'est pas bien loin, pop parce Brian Wilson introduit le morceau Works converged et électro parce que bon voilà, ce disque est un peu une déclaration d'amour à Daft Punk. En témoigne la basse de Shadows ou encore Road to discovery. Sur ce dernier titre il n'y a qu'à écouter le récent Alive pour s'en convaincre. Et vous reprendrez bien un peu de Morricone, Twenty thousand leagues, un tsunami électrique aux synthés omniprésents. Tout comme cette voix caverneuse comme seul David Bowie sait la prendre.

Après une intro certifiée THX, Ending of an era rappelle étrangement Mademoiselle, avec son beat et ses choeurs et c'est mon coeur et mes couilles qui parlent. Parfois même, aux détours d'un couloir sonore nommé Dystopia, Midnight Juggernauts rencontre Air. S'en suit Into the galaxy, LE gros titre bien représentatif à l'intro déjà mythique de synthés distordus planants soulevés par des choeurs gonflés à l'hélium. J'imagine déjà le live. Ils ont digéré Discovery, on l'a compris. Tous les titres sont brillants et le disque ne baisse pas en intensité du début à la fin. Tombstone laisse KO, Nine lives laisse pantois. Arc en ciel laser aux sons analogiques et aux nappes vaporeuses, Dystopia rentre en orbite et se place directement dans le top ten des disques à avoir, dans le genre.

En bref: Space odyssée synthétisée et électro rock futuriste caractérisent ce disque d'enfer. Bien pensé dans l'air du temps et dans le respect des ancêtres, et dès lors, incontournable.



A lire aussi : Seventeen evergreen è Life embarrasses me on planet earth (2007)

Montes le son auditeur, et prends toi Into the galaxy et Tombstone dans la face:



MIDNIGHT JUGGERNAUTS - TOMBSTONE

Ajouter à mon profil Plus de Vidéos
Lire la suite

10 janvier 2008

Julie Doiron - Woke myself up (2007)

Allez, tant que j'y suis, pourquoi ne pas développer un peu plus sur la douce Julie Doiron. Découverte pour ma part à bord du split album avec Okkervil River et confirmée par sa participation discrète à la basse sur l'album Not on top d' Herman Düne, la canadienne compositeur interprète et mère de famille traîne déjà derrière elle une discographie conséquente. Je décide d'y rentrer par ce Woke myself up, premier pas vers l'électrification de ses chansons amorcée par l'apparemment excellent Goodnight nobody. Julie laisse alors éclater toutes proportions gardées son côté pop genre Laura Veirs.

Disque fulgurant, chansons immédiates ne dépassant pas les 3 minutes, je me lève déjà après avoir écrit ces quelques lignes pour retourner la galette. Julie confirme en un clin d'oeil tout le bien qu'on pensait d'elle. Toujours aussi léger et intime mais à l'acoustique moins minimaliste, ce dernier opus continue d'apaiser au fil des écoutes. Assistée pour l'occasion par Rick White (son ex) et ses anciens acolytes du groupe indé Eric's trip, Julie reste une conteuse d'histoires aux intentions sincères, sans fioritures, simple.

Swan pound donne immédiatement l'envie de monter le volume et de hocher la tête sur de lourdes notes qui nous arrivent en plein coeur. A ne surtout pas écouter en dépression. No more est par contre très entraînant. Si elle avoue écouter bien volontiers Lou Barlow ou Bob Dylan, Julie se défend d'une certaine tradition folk en utilisant guitare électrique et en évitant justement les accords folk. Le final de The wrong guy étant carrément branché au courant alternatif.

Lumineuse, chaleureuse et naturelle, Julie brosse dans le sens du poil sans jamais sacrifier son penchant lo fi ni l'effet enregistré dans le salon, en témoigne le miaulement du chat sur I Left down (volontaire?). En moins de 30 minutes Woke myself up devient votre meilleur ami sans aucune prétention au titre tant convoité de chef d'oeuvre. Juste de bien belles chansons.

En bref: Une demi heure d'introspection sans prétention entre une Canadienne au meilleur de sa forme et sa guitare. A écouter près du feu, lové dans une couverture avec un bon chocolat chaud.



L’album :

free music

Lire la suite

04 janvier 2008

Herman Düne - Not on top (2005)

Pour commencer l’année en douceur je vous propose de faire un saut dans le temps. C’était il y a 3 ans, ça aurait aussi bien pu être il y a 30 ans. Fidèle compagnon de mes déplacements de noël, ce Not on top s’est discrètement enfoncé dans mon cerveau, jusqu’à me redonner goût au voyage, au folk, à la simplicité, à la vie. Comme quoi des fois c’est pas si compliqué que ça la musique.

Herman Düne je connaissais le nom, j’avais comme tout le monde entendu parler de Giant en 2006, je les avais peut-être même déjà vus en festival, qui sait? Pourtant le moment de la découverte, le vrai, celui où on se met à écouter les paroles s’est passé bien plus tard, le nez collé à la vitre d’un TER et un casque sur les oreilles. C’est là que je me dis que le folk électro acoustique s’accorde si bien avec le déplacement, les paysages, les gens croisés ici ou là. Comme du Dylan en somme. Une influence planante renforcée par la voix nasillarde d’André et David Ivar. Ces deux là ne font rien comme tout le monde. Depuis 12 ans et sans déclencher plus de vagues que ça, les frères franco suédois travaillent sans relâche et auraient composé quelques 400 chansons. Rootsissimes et barbus jusqu’au ventre mais prolifiques, donc. Pour ce 7ème album enregistré à Leeds et paru sur le label Track and field, le duo s’est entouré du troisième bro, Neman le batteur et surtout de l’excellente artiste canadienne Julie Doiron (à découvrir) qui apporte par moments un petit côté Belle and Sebastian grâce à sa douce voix féminine.

C’est l’incroyable homogénéité qui surprend sur ce disque. D’un enregistrement mono à la Creedence Clearwater Revival, l’équipe nous pond comme si de rien n’était au moins 10 tubes sur 13 titres. Bon ok, ce sont 10 modestes tubes, pas des tubes de dancefloor, plutôt des tuyaux, des pailles si vous préférez, en fait le genre de titre qu’on semble comprendre et connaître depuis toujours. Dans le genre, Wathever burns the best baby, You could be a model ou Had i to know sont des merveilles d’ambiances feutrées pleines de fraîcheur. André et David s’accordent un titre chacun pour raconter des histoires tristes et drôles. On alterne en effet le déchirant Good for noone, Slow century ou Walk, don’t run et l’entraînant Little wounds (merci Dylan), Seven cities, That will never happen (où Julie est formidable) on enfin Not on top, le single énorme parsemé de guitares surf.

Tout dans ce disque respire la simplicité : les arrangements (autarciques), les orchestrations (absentes), les influences (de Lou Barlow à Neil Young en passant par Silver Jews), ou encore la pochette lo fi à souhait (avec pilosité affichée et bouteille alcoolisée traînant sur l’ampli). A présent un peu éparpillée, sous différents pseudos, la famille Herman Düne continue certainement de composer avec pudeur et persévérance des chansons intimes et authentiques qui me feront rêver. Même en 2008.

En bref : Résolument roots et authentique, c’est sans artifice aucun que ce simple disque de folk trouvera sa place dans votre vie, au moins le temps d’un voyage.



Le myspace

A lire aussi : Rio en medio - Bride of dynamite (2007)

L’album (pas dans l’ordre mais c’est pas très grave) :

free music


Lire la suite