26 février 2007

Socalled - Ghetto-Blaster (2006)

On découvre le phénomène dans un café-concert de Montréal : sur scène, Josh Dolgin, alias Socalled, tient tout à la fois du chef d’orchestre et de l’homme-orchestre. Un hochement de tête en direction de la très country Katie Moore, et la chanteuse, longs cheveux grisonnants et lunettes aux larges montures noires, entame le refrain. Lui plonge vers son sampler avant de s’emparer d’un accordéon. De nouveau, un signe du menton : un rappeur monte sur scène et son flow vient à son tour gonfler le beat. Le jeu se calme : son maître saute de l’estrade pour faire pleurer le piano-bar au milieu du public : « Slaughter Freestyle »…

Ainsi est Socalled, touche-à-tout canadien (le monsieur est aussi photographe, réalisateur de films d’animation, magicien…) qui assaisonne hip-hop et électro d’une sauce klezmer particulièrement savoureuse. Et encore, la recette est loin d’être exhaustive. Sur GhettoBlaster, une quarantaine d’artistes de divers horizons musicaux sont venus mettre la main à la pâte. Un projet rassembleur plus qu’un simple album, donc, un peu dans la veine de Gorillaz, mais pour un résultat résolument différent et plus homogène. Restent le côté expérimental et, surtout, la richesse de productions plus fouillées que brouillonnes. Et cette folie dont les samples de musique juive (des 78-tours de l’entre-deux-guerres) viennent prononcer le grain. Ajoutez à ça que Socalled ne sait pas seulement bien s’entourer (le rappeur québécois Sans Pression, le pianiste lounge Irving Fields, etc.), dompter les instruments, et mêler avec génie des sons improbables : derrière sa dégaine d’informaticien ébouriffé quoique dégarni se cache un MC de talent qui n’a rien à envier à ses invités.

Vous avez peut-être entendu « You Are Never Alone » - ou la chanson d’un « jewish cowboy » - sur les ondes françaises. Ca tombe bien, c’est un des meilleurs titres de l’album. Pour le reste, on apprécie « Let’s Get Wet », morceau électro aux accents orientaux, mais aussi le rap en yiddish de « Ich Bin A Border By Mayn Vayb », ou encore le plus traditionnel « Heart Attack Feeling ».

Au final, un album goûteux mais on reste un peu sur sa faim : trop d’amuse-gueules dans le menu, car sur les douze titres on compte pas moins de cinq interludes, intro ou remix. On peut toujours se rassasier en écoutant l’album précédent intitulé The Socalled Seder, sur lequel Josh Dolgin avait notamment invité Matisyahu, son équivalent new-yorkais et reggae en matière de musique juive.



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Sean Lennon - Concert à Bordeaux 22/02/07

En complément de la chronique de l’album My friendy fire, je suis allé écouter en compagnie de Sonia le concert de la dernière progéniture Lennon. Le moins que l’on puisse dire c’est que ce gars est plutôt cool, pas plus de 5 min sur scène et on aimerait déjà être son pote. Look atypique : jean chemise cravate veste grosses lunettes barbe et cheveux en pétards, ni vieux ni jeune, ni gros ni maigre et juste assez francophone pour nous faire rire : "Ouais j’aime la France parce que la France… c’est cool !" ou alors "Celle là je vais la jouer seul, je suis pas égoïste mais bon j’ai envie… alors c’est cool".

Précédé en première partie par un groupe italien dont je n’ai pas retenu le nom, mais surtout par une invitée surprise nommée Martha Wainwright (pour ceux qui connaissent, la petite sœur de Rufus Wainwright, excusez du peu), une sorte d’Anaïs à l’américaine, un peu à l’arrache mais qui fait taire tout le monde quand elle commence à chanter, le bon Sean reprend enfin sa guitare. Il débute par "Spectacle" ma préférée alors forcément j’aime. Les chansons s’enchaînent et je ne peux que constater avec quelle facilité les 11 titres du dernier album sont déjà si bien enregistrés dans ma mémoire, tout comme dans celle de So qui l’a pourtant moins écouté que moi. Je confirme donc une grande habilité pour le monsieur à écrire des chansons pop simples et directes, qui touchent le plus grand nombre, hommes, femmes, jeunes, vieux, rockeurs mélomanes de longue date ou simple curieux. Une seule chanson du premier album injustement boudé par la majorité bien pensante, la première qu’il ait écrite, à 19 ans, ainsi qu’un titre inédit, écrit il y a tout juste deux semaines qui confirme si besoin est que Lennon a encore des cordes à son arc, et à sa guitare par la même occasion.

Un concert simple, efficace, dans une ambiance de feu très "friendly". Ecoutez ces cd si vous n’en avez pas encore eu l’occasion et regardez ces clips, tous très originaux. Une première à noter, un concert à Barbey désormais 100 % non fumeur, plutôt agréable il faut dire même si du coup les machines à fumée tournaient à plein régime afin de recréer l’ambiance. Une fumée artificielle pour une musique qui ne l’est pas, elle.

A lire aussi : Sean Lennon - Friendly Fire

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25 février 2007

Pull Up remix! Million Dan au Nouveau Casino. Deja Mythique


Yo! Pull Up!!!....Pull Up! Pull up, pull Up!!! Inconnu du grand public, ce jeune rappeur en provenance directe de UK commence à faire parler de lui. Et hier soir, les fans de la première heure se pressaient devant le Nouveau Casino. Entouré de son DJ, le prénomé DJ Def K, épaulé de son wingman au flow retentissant, j'ai nommé Pesci, il a posé deux heures durant dans une ambiance chaude et quasi irréelle.
Pas moins de 3 Djs de hip hop et drum'n'bass se sont succédés pour suivre la cadence, démoniaque, imposée par le Jeune british. C'est l'équipe du Santa Crew, dans laquelle on retrouve Poupa Dancer, Dj Sunta et Fla Kubik'n'chten, qui l'a invité pour chauffer le public et faire valoir sa marque, fraiche et joviale, soutenue et cordiale. Rien qui ne s'approche du rap US, souvent violent et rébarbatif avec de lourdes basses et des insultes à tout bout champ. Non ici décidément, c'est le flow qui compte, l'énergie, l'interaction avec The audience. On pouvait ainsi entendre "when I say yo, you say yo"..."Yo!: Yo oooo!".
Enfin, que du bon quoi...
Pour l'instant aucun disque pour le jeune homme mais une mixtape annoncée pour les prochains jours.
Si je devais résumer, c'est un rap purement UK avec des "lovely" par ci, des "wicked" par la, de la joie de vivre et de grandir. A voir en concert absolument et à surveiller (pour les amateurs de comètes)
Les curieux se proméneront ici, ici et la pour en apprendre davantage.

Vadz


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24 février 2007

The Clash - From London To Jamaica (Live in Montego Bay, 27/11/82)

Vous connaissez Joe Strummer et ses acolytes, inutile d'en faire une tartine. Vous savez sûrement qu'à la fin des années 70, en Angleterre, les Clash et d'autres groupes de punk se sont acoquinés avec d'excellents groupes de reggae comme Steel Pulse et Misty In Roots, dans le cadre du mouvement "Rock Against Racism". Aussi incroyable que ça puisse paraître, ce mouvement est né en réaction aux déclarations très douteuses d'Eric Clapton et de David Bowie. Le premier avait invité ses fans à voter pour l'ancien ministre conservateur Enoch Powell (auteur d'une intransigeante loi anti-immigration) lors d'un concert à Birmingham en août 1976. "L'Angleterre devient surpeuplée", avait-il affirmé, avant d'ajouter que voter Powell permettrait d'éviter au pays de se transformer en "une colonie noire" (!). Quant à Bowie, il avait clamé dans un magazine que le Royaume-Uni était "prêt pour un leader fasciste" - il revint plus tard sur cette énormité en prétextant un "abus de substances".

"Rock Against Racism", lancé par Red Saunders et Roger Huddle, édite d'abord un fanzine et organise de petits concerts pour se faire connaître. De nombreux musiciens et intellectuels apportent leur soutien à la cause, si bien qu'elle prend rapidement de l'ampleur. L'apothéose, c'est le "Carnival Against The Nazis", en avril 1978, quand 100000 personnes marchent de Trafalgar Square au Victoria Park pour assister à un concert en plein air. Sur le programme figurent The Clash, The Buzzcocks, Steel Pulse, X-Ray Spex, The Ruts, Sham 69, Generation X et le Tom Robinson Band. Ces groupes d'horizons divers improvisent ensemble pour faire l'éloge de la mixité.

La preuve ultime de ce métissage est sans doute le live enregistré au Bob Marley Festival, à Montego Bay, le 27 novembre 1982. J'aurais bien aimé être présent, ce soir-là. The Wailers, Toots & The Maytals, The B52's, The Grateful Dead et bien d'autres se sont succédés jusqu'au petit matin. Les Clash montèrent sur scène vers 4 heures, survoltés, pour livrer une de leurs meilleures performances disponibles sur bande. Les tubes du groupe, cuisinés à la sauce reggae, ne perdent rien de leur énergie primitive. Au contraire. Les guitares massives de "Radio Clash" en témoignent. Le batteur Terry Chimes, qui jouait pour la dernière fois avec la formation, est terriblement impressionnant. Et, ce qui ne gâche rien, l'enregistrement s'avère très correct, bien qu'il s'agisse d'un pirate.

"Guns Of Brixton", "London Calling" et "Straight To Hell" conviennent particulièrement au traitement dub opéré lors de ce set jamaïcain. La palme des basses les plus lourdes revient incontestablement à "Junco Partner", tandis que "Rock The Casbah" n'a jamais été aussi dépouillée. Ma préférée : "The Magnificent Seven", dont deux versions figurent sur le vinyl. Seule déception : l'intro et le dernier titre du concert, "I Fought The Law", sont absents du disque.

Aucune trace de ce live sur Radioblog et Youtube, alors voici "The Magnificent Seven" et "Guns Of Brixton" en version studio, ça ne peut pas faire de mal :




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"Toucher des légendes" - Entretien avec Jean-Daniel Beauvallet

The Doors, The Who, Joan Baez, Deep Purple sont en tournée cette année. The Pixies et plus récemment The Police et Genesis sont réunis à nouveau et prêts à sillonner les salles de concert. Les papys du rock sont bel et bien de retour. Jean-Daniel Beauvallet, rédacteur en chef de la rubrique "Musiques" des Inrockuptibles nous décode ce phénomène.


Il semble qu'aujourd'hui nous assistions à un retour du rock des années 60 et 70, notamment avec la reformation de certains groupes et la reprise de leurs tournées. Faut-il y voir une histoire de gros sous ou un véritable défi musical ?

Jean-Daniel Beauvallet : Il n'y a généralement pas de défi musical. Ce n'est pas le cas pour The Who, Deep Purple ou The Doors [qui ont repris une tournée sous le nom de Riders on the storm]. Il s'agit là principalement d'une histoire d'argent. Ces groupes ne vendent plus de disques et du coup organisent des tournées. Cependant, il y a aussi la volonté pour certains de revenir à des choses plus simples, plus basiques. Jouer de la musique devant un public. Sting n'a par exemple pas besoin de faire des tournées pour gagner de l'argent. Je pense qu'il s'agit dans ce cas d'une pure question de plaisir. La reformation de The Police peut être un défi musical pour ses membres mais je pense qu'avant tout, il s'agit de prendre du plaisir, de retrouver un contact avec le public.


Justement, quel est le public visé par ses papys du rock qui remontent sur scène ?

Quand on se rend dans les concerts des Pixies, des Doors ou de Deep Purple par exemple, on se rend compte que le public est composé à 50% de jeunes et à 50% de fans de toujours, plus âgés. C'est justement une des motivations et un des défis pour ces groupes qui ont été formés il y a 30-40 ans : toucher les "kids", les jeunes. Des jeunes qui ont souvent découvert leur musique par le net ou par leurs parents et qui se rendent en concert pour avoir un contact avec des légendes vivantes. Et ce, même si les membres du groupe reformé ne sont pas exactement les membres originels. Ils veulent voir jouer des noms mythiques. De plus, les jeunes ont de l'argent et n'hésitent pas à investir 50 ou 60 euros pour aller voir des idoles. Il est intéressant par ailleurs de remarquer que ces groupes sont capables de remplir des zénith entiers mais ne vendent quasiment pas d'albums. Tout tourne autour du fait de "toucher des légendes". C'est ce que le public recherche essentiellement.


Est-ce de la nostalgie pure ou plutôt un retour à la mode du rock des années 60 et 70 ?


Pour certains, il y a clairement de la nostalgie. De plus, les fans de rock qui avaient une vingtaine d'années dans les années 70 n'avaient pas forcément l'argent pour aller voir leurs groupes favoris en concert. Aujourd'hui, ils peuvent avoir accès à un certain pouvoir d'achat et donc se permettre d'aller voir leurs idoles en live. Pour les "kids", le rock de ces années-là est effectivement à la mode. Pour la simple est bonne raison qu'aujourd'hui les nouveaux groupes n'inventent plus de langues nouvelles mais plutôt de nouvelles façons d'agencer les restes. La course en avant du rock est ralentie et on joue aujourd'hui avec les héritages. Internet a un rôle crucial dans la diffusion des anciens groupes auprès des jeunes. Internet a opéré une mise à plat du temps. Il n'y a plus de raretés, tout est disponible. On peut se procurer sans problème l'intégrale des Doors ou des Stooges. De ce fait, aller à la recontre de Ray Manzarek [le fondateur des Doors] ou d'Iggy Pop en concert reste la dernière rareté.


Les "tribute bands", formations qui rendent hommage à un artiste ou à un groupe en reprenant leur répertoire, participent-ils à ce retour à la mode ?

Les formations "en hommage à" participent effectivement à la redécouverte de certains groupes et au sentiment de nostalgie. A l'origine, les "tribute bands" sont nés en Australie car le pays était souvent à l'écart des grandes tournées. C'est un phénomène qui est donc né de frustrations mais que le public prenait avec dérision, sachant clairement qu'il y avait devant eux une vraie supercherie qui se jouait. Aujourd'hui, les gens se rendent à une soirée "tribute" car ils n'ont pas eu l'occasion de voir le groupe original et souvent dans des cas où des membres du groupe sont décédés. On peut penser ici à Queen et Freddie Mercury dont les "tribute bands" sont légion. On va à un concert "en hommage à" pour revivre une expérience musicale et passer une bonne soirée. Prendre du bon temps simplement. Le public se fout de ne pas avoir les originaux en face de lui. Il s'agit d'une mise en scène. C'est du théâtre, du cinéma, une sorte d'illusion collective acceptée par tous. Mais le phénomène des "tribute" est à mettre directement en relation avec le rock qui est produit aujourd'hui. Les Strokes, par exemple, sont une sorte de tribute au Velvet underground de Lou Reed. Comme je l'ai dit avant, la course au rock est ralentie. Du coup, le retour aux "classiques" semble naturel, ne serait-ce qu'en raison de leur disponibilité.


Si les "tribute bands" et le retour des papys du rock sont en relation avec la production rock d'aujourd'hui, peut-on y voir une tendance à long terme ?

C'est un peu la même chose qu'avec l'arrivée du CD dans les années 80. A ce moment-là les producteurs on pût se dire qu'il n'était pas judicieux de sortir beaucoup de nouveautés, que les gens allaient acheter des classiques et renouveler leur discothèque dans le nouveau format CD. Ce fût le cas. Aujourd'hui avec Internet, le public, et en particulier les jeunes, redécouvre un catalogue immense de disques. Du coup, les vieux routiers du rock ont la côte ainsi que les "tribute bands", mais on peut penser que ce "revival" se calmera dans quelques années, pour laisser davantage de place au rock contemporain chez le grand public.


Propos recueillis par Fab.

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22 février 2007

Walk the line - Johnny Cash

Réalisé par James Mangold en 2006 avec Joaquin Phoenix et Reese Witherspoon en tête d’affiche, Walk the line retrace une partie de l’histoire de "l’homme en noir", le musicien Johnny Cash. Pour moi il fait partie de ces noms que l’on connaît mais dont on ignore ce qu’ils ont vraiment fait. Le film, suivant le schéma plutôt classique du film biographique romancé (à la façon de "Ray") retrace les débuts de Johnny Cash, depuis son enfance dans le Tennesse et la perte de son frère (tout comme Ray Charles et tout comme Joaquin Phoenix), en passant par son premier job ingrat de commercial, son passage dans l’armée où il achète sa première guitare, puis enfin l’arrivée du succès avec tout ce qu’il comporte quand on parle rock’n roll : drogues, alcool, violence. Le film dévoile comment Johnny n’a pas réussi à assumer sa vie de famille monotone avec l’excitation des tournées et la passion qui l’animait pour la deuxième femme de sa vie, June Carter. Et c’est un bonheur d’assister aux multiples clins d’œil musicaux que nous donne ici le réalisateur, de la rencontre avec l’excentrique Jerry Lee Lewis jusqu’au dealer de la bande, un certain Elvis Presley, tout y est.


Il faut savoir que les acteurs ont été choisis par Johnny Cash et June Carter en personne et qu’ils ne sont absolument pas doublés durant le film, ce sont eux qui interprètent la totalité des chansons. Autres anecdotes, la mère du vrai Johnny Cash, Shelby Lynne joue son propre rôle dans le film. Ray Orbinson, compagnon de Johnny, est joué par Jonhatan Rice, chanteur anglais et frère de Damien Rice. Dommage que Roseanne Cash, fille de Johnny et elle aussi chanteuse ne fasse pas d’apparition dans le film. Le film qui a beau être complet élude pourtant les passages plus politiques de la vie de Cash lorsqu’il rencontra le président Nixon au sujet de l’état des prisons américaines. La rencontre et la collaboration avec Dylan est également absente du film. En tout cas, force est de constater que les acteurs sont excellents, notamment Reese Witherspoon (en brune) que j’avais l’habitude de voir dans des comédies légères et qui là m’a complètement bluffé.


Walk the line fut pour moi l’occasion de découvrir l’univers musical d’un artiste blanc inspiré du folk, du country et d’hymnes religieux américains chantant de la musique noire et ayant inspiré toute une génération d’artistes. Il ne me reste plus qu’à me ruer sur ses anciens enregistrements, notamment ses concerts enregistrés en prison avec Dylan. Qu’elle est belle cette époque où le rock n’était pas encore électrique…

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21 février 2007

Muddy Waters - Hard Again (1977)

Comme disait Dave, ce ne sont pas nos dernières news qui vont donner l'envie soudaine de sauter sur son lit et regarder fixement le voisin par la fenêtre la langue bien pendante en éclatant de rire, à se pisser dessus. Bon je vous rassure, ce n'est pas non plus la réaction que vous allez avoir en écoutant ce petit album du grand Muddy Waters, mais il est possible qu'un soir de solitude il vous redonne un peu de pêche.
Tout d'abord je dois vous avouer que le choix d'un album en particulier a été difficile. Il faut dire qu'il en a sorti une bonne quarantaine ! Et pour un novice en blues comme moi , pas facile de préférer un album à un autre. J'ai finalement tranché, en piochant Hard Again qui se veut dépouillé, pour revenir au racine du blues.

Mais avant tout autre chose qui est ce Monsieur Waters ? Et bien c'est avec Robert Johnson et Bo Diddley, l'inventeur du Blues electric. Né en 1915, il perd sa mère alors qu'il avait 3 ans. Il se fait élever par sa grand-mère et travaille très tôt dans les plantations du delta du Mississipi. Là-bas le Blues de rue, si l'on peut dire, est déjà bien ancré dans les moeurs. Une corde fixée sur un baton , un bout de métal que l'on tape sur un cailloux suffisent à créer une musique sur laquelle on peut chanter à tour de rôle. C'est probablement les esclaves noirs qui ont introduit ce style. Waters séduit par cette ambiance se met à l'harmonica puis à la guitare dès l'age de 13 ans. Il commence ensuite sa carrière de bluesman dans les années 1940 aux côtés du producteur Alan Lomax.

Hard Again est sorti en 1977, produit par Johnny Winter, un guitariste connu depuis peu ayant joué à Woodstock'69, puis aux côtés de Jimmy Hendrix ou encore Jim Morrison. A cette époque on peut déjà tracer une longue carrière derrière Muddy. Il a influencé la plupart des groupes de Rock des années 60-70. Petite anecdote, les Rolling Stones on tiré leur nom d'une chanson de Waters nommée Rollin'Stone (un qualificatif courant dans le blues). Jimmy Hendrix s'est d'ailleurs inspiré et a repris certains de ses singles. Le CD démarre sur une chanson qui va vous faire sourire, Mannish Boy. Avant le cliché il y a l'originale. Voici la chanson qui a mis sur le devant de la scène ce vieil héritage du Blues : "I'm a maaaan / I'm a Hoochie Coochie Man !". Ensuite s'enchaînent les chansons que j'écoute uniformément. Elles diffusent une humeur très positive. Le vent de l'harmonica interpellé par les pentatoniques des guitares à cordes métalliques, et le piano bar diffusent leur parfum. Tandis que Muddy Waters se confond dans le flot avec sa voix expérimentée et ses phrasés rythmés par le soleil. Un savoureux témoignage de l'émancipation de tout un peuple.

Un extrait:
La chanson qui va vous faire sourire ...


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Rocé - Identité en crescendo (2006)

De nom, je connaissais le monsieur depuis un moment déjà, mais jamais je n'avais entendu un de ses titres ou tenu un de ses disques dans mes mains curieuses. Ma rencontre avec Rocé, c'est mon ami Oxmo qui l'a arrangée. En première partie dans une célèbre laiterie du 67.
Rocé, de son vrai nom José Kaminsky, opère pourtant sur la scène rap depuis plus de dix ans et la sortie de ses premiers maxis sur le label Chronowax. C'est en 2001 que son premier album paraît. Top départ, le nom est bien trouvé évidemment. Identité en crescendo enfanté l'année dernière, est donc arrivé cinq années plus tard. Un temps bien utilisé si j'en crois mes oreilles.
Rocé en concert, c'est un type qui ne paye pas particulièrement de mine. Un arabe trentenaire, trappu, le crâne rasé. Il ne se la joue pas ricain, pas canaille, il ne se la joue pas tout court. Un tee-shirt large légèrement hip-hop dans le texte, pantalon à pince, baskets. Il s'avance tranquillement vers le micro mais sans l'assurance superflue. Il accueille le public d'un simple "bonsoir, ça va?" puis annonce sa première chanson : "Je chante la France".
Introduction jazzy mélancolique d'une trompette, le beat s'installe. La noblesse se fait attendre. On l'entrevoit rapidement. "J'ai la Marseillaise ciblée, le drapeau sous les semelles. J'ai le regard crispé sur ce pays et ses querelles. Le regard débridé et le pelage blanchi. Je begaye presque sans plus d'accent les mêmes problèmes qu'il y a des décennies". Prélude à une chanson en forme de plaidoyer mais aussi de carte d'identité. Car d'identité il sera question pendant ce concert comme dans le second album de Rocé dont le titre ne ment pas. "Je chante la France" ouvre cette album. Et force est de reconnaître qu'il s'agit d'une introduction qui nous en dit long sur l'ambiance d'Identité en crescendo. Un rap engagé sagement mûri à l'ombre d'influences jazz mesurées.
Pourtant, après son premier album, Rocé avait fait le deuil du rap français et l'exprimait : "Selon moi, le rap français est intégré à la société, il n'est plus subversif, il est devenu le cliché que la société voulait qu'il soit. C'est une musique qui ne lance plus de messages, qui se contente de faire des constats, de dire : "Regarde la merde où j'habite". Une prise de distance qui amène Rocé à trouver refuge dans le free jazz en compagnie d'Albert Ayler ou Ornette Coleman. De cette rencontre naîtra peu à peu Identité en crescendo. Une pièce servie par des instrumentaux jazz (avec la participation sur un titre d'Archie Shepp) mais avec la parole forcément rap. Une parole qui interpelle et revendique une multiplicité identitaire loin des casiers préfabriqués idéologiques.
L'album dans son intégralité est placé sous le signe de la qualité. Des instrus parfaits et le verbe haut, on écoute les 13 titres sans déplaisir, l'oreille attentive malgré quelques jolis balancements. Pour moi, "Je chante la France", "Amitié et amertume" et "Des problèmes de mémoire" conduisent le scud légèrement un ton en dessus des autres titres. A noter trois participations jazz très classes : Archie Shepp, bien sûr, mais aussi Jacques Coursil et Antoine Paganotti (que je connaissais pas mais dont jai pu lire qu'il s'agissait d'un costaud).

Pour conclure et en substance, Identité en crescendo est un des meilleurs albums rap frenchie qu'il m'aie été donné d'écouter récemment. A redécouvrir pour ceux qui connaissaient Top départ son premier opus, à découvrir vraiment pour les autres.


Le lien emule :
Roce-Identite_En_Crescendo-FR-2006_RAP_REFLECHI_COMME_FABE_KOMA_ETC.rar
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Mud Flow - A Life On Standby (2005)

Parlons d’un groupe dont on n’entend pas parler, un groupe qui ne fait pas la une des magazines, un groupe dont vous ne connaissez peut-être même pas le nom et pourtant un groupe qui a bercé mes soirées l’année dernière à maintes reprises. C’est déjà le troisième opus de ce trio bruxellois après Re Act et Amateur et pour paraphraser le chroniqueur de la Fnac, "c’est un scandale que ce groupe ne soit pas connu". Composé de Vincent Liben chanteur guitariste à l’origine du projet (1994), de Blazz à la basse et Charly Delcroix à la batterie, Mud Flow fait partie de ces groupes belges sur lesquels je souhaite porter un coup de projecteur, qui produisent un rock intense et prenant, qui vous emportent et ne vous lâchent plus, à condition d’ouvrir votre cœur. L’an passé, privé de ma chère et tendre, je me suis laissé allé à écouter et ré-écouter la douce mélancolie et les arrangements légers de cet album où plane sans cesse un spleen positif du genre "ça ira mieux demain", aussi bien durant les retrouvailles que durant les séparations. Parce que oui, une fois encore dans nos chroniques, A life on standby ne fait pas partie de ces albums qui nous fera sortir les cotillons mais plutôt de ceux qui nous font tout remettre en question. Ce n’est donc pas un album belge qui donne la frite (désolé). Ce qui surprend c’est à la fois l’homogénéité et la variété de cet album, tantôt noisy tantôt mélodique, tantôt acoustique tantôt électrique, c’est un frisson quasi permanent qui s’en dégage. Plus abouti que les précédents, plus envoûtant et émouvant aussi, la fin du cd est un véritable concentré d’émotions. Apre et profond, ce superbe album sorti en 2004, injustement méconnu de tous les fans de Radiohead, Eels, Sonic Youth et autres Pink Floyd propose une pop bien ficelée sans aucune prise de tête et c’est assez rare de nos jours pour être souligné. J’attends avec impatience le prochain opus Ryonsuke prévu pour le 2 mars et dans la même lignée je vous propose de découvrir d’autres excellentes formations belges : Venus, dEUS, Gils in Hawaï, Ghinzu

Je dirais que les morceaux de la 1 à 6 sont exceptionnels et que de la 7 à la 11 c’est magique. En fait tout est bon. De "Sense of me" l’intro à "Chemicals", du tube joyeux "Today" à la torturée "Tribal dance". Interlude avec "How i got depressed and started a war" (sic) puis le très pinkfloydien "Unfinished relief". Ne pas manquer le titre "Debbie and charly", surtout à partir de 4’00". Et puis la fin du disque n’est que du bonheur: "Five against six", belle à pleurer, "Song 1" chanson dépressive par excellence mais teintée de lueurs d’espoir et enfin "New Eve" au final en furie. Attention, ce n’est pas parce que c’est belge qu’il ne faut l’écouter qu’une fois, alors on reprend son souffle et on y retourne.








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20 février 2007

The doors - The unknown soldier (clip)

Sorti en 1968, Waiting for the sun, troisième album des mythiques Doors reste pour moi l'une des meilleures productions (voire la meilleure) de la bande de Jim Morrison. Pas besoin de longs discours face à un chef d'oeuvre pareil, l'évocation de quelques titres suffit : "Love street", "Spanish caravan", "The unknown soldier", "Yes, the rivers knows".

Si je me permet d'évoquer cette merveille, ce n'est pas pour la porter à votre attention (si vous ne la connaissez pas, malheureusement, il ne vous reste plus qu'à vous flageller jusqu'à la fin des temps et à implorer la clémence du Roi Lézard) mais plutôt pour ajouter un peu d'images aux douces sonorités de ce blog. En effet, le clip de "The unknown soldier" est une bien belle curiosité, preuve de l'engagement du groupe contre l'impérialisme américain des 60's. Plans de Frisco dans les sixties, mise à mort symbolique de Morrison, images du Vietnam, tout est réuni ici pour faire de ce clip un témoignage historico-musical qui mérite le détour.
fab

Pour votre plaisir :




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19 février 2007

Jeff Buckley - Live à l'Olympia (2001)

Après la sortie de son premier album Grace en 1994, Jeff Buckley part en tournée pour en faire la promotion. C'est déjà un habitué des représentations en public. Au début de sa carrière, Jeff a beaucoup fréquenté les bars et en particulier les irish coffee du quartier New-Yorkais Sin-é. C'est ce qu'il aime, échanger avec les gens qui l'écoutent. Il disait "ne pas avoir envie d'être dépassé par sa réputation, mais être seulement jugé sur ses chansons". Lorsqu'il arrive à l'Olympia en juillet 1995, un rêve d'enfant se réalise: il marche sur les pas d'Edith Piaf et James Brown. Il s'est bien préparé pour être à la hauteur des français qui pourtant le considèrent déjà comme un héros.

Ce live est sorti en 2001, par Sony, numérisé depuis une cassette audio retrouvée "dans les affaires personnelles de Jeff" comme le précise la pochette du CD (très bien illustré et documenté par j.d. beauvallet des Inrockuptibles). Soit 4 ans après sa mort. Il marque apparemment le sommet de sa carrière.
Pour moi c'est surtout un album plein de surprises qui combleront en partie le vide laissé après Grace. On y trouve un homme au naturel comme à ses débuts, sans les artifices du studio. Jeff avait une belle voix et il a su la mettre en valeur malgré le trac. Lover, you should have come over , Dream Brother, Lilac Wine ou encore Hallelujah raviront les fans qui retrouveront les chansons proches de sa performance sur l'album, très mélodieuses et toujours agréables, parfois même à en couper le souffle lorsque Jeff prend sa voix de tête. Ensuite il y a la version de Grace, où l'on sent Jeff bien présent, s'efforçant à donner le meilleur de lui même. Parfois même il arrive à ses propres limites, en poussant sa voix à un tel point qu'on dirait un cri de douleur, comme s'il voulait s'essayer au grunge de Kurt Cobain, sans pour autant prononcer de fausse note. On trouve aussi de nombreux clins d'oeil au cours du spectacle : une interprétation trash de Kick out the jams des Mc5, une version de Kashmir accélérée de 5 bpm (il le dit dans le concert!) en l'honneur des Led Zeppelin, et non de puff daddy, merci ! Et enfin pour Edith Piaf il chante Je n'en connais pas la fin avec les couplets en anglais, mais il fait un effort en chantant les refrains en français à la manière des Beatles sur Michel.

En résumé l'écoute de cet album nous immerge dans l'ambiance de l'Olympia, où Jeff a essayé d'apporter le meilleur de lui même. Et si son talent n'arrive pas à la hauteur de son travail sur album studio où en concert dans des salles moins importantes, c'est à mon avis un très bon souvenir pour la France, profitez en il n'y en aura pas d'autre, dommage...

Pour aller plus loin:

En flânant sur Youtube je me suis amusé à comparer les différentes versions Grace de Jeff Buckley. Voici celle qui m'a le plus subjugué, tenez jusqu'à la fin-fin, c'est spectaculaire:



Jeff Buckley, live à Nulle part ailleurs en 1995


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17 février 2007

Godspeed You Black Emperor! - Lift your skinny fists like antennas to heaven!

En ouvrant ce disque, on tombe sur des dessins bien curieux. L'un d'eux représente deux hommes. L'un, masqué, en costard, porte une cravate ornée du sigle dollar, et coupe, à l'aide de longs ciseaux, les mains de l'autre. Sur la table, un contrat fraîchement signé. Et là-dessus, un titre d'un cynisme achevé : Lift your skinny fists like antennas to heaven ! Levons nos moignons, donc. C'est Faust revisité, mais c'est surtout une juste illustration, en négatif, de l'éthique d'un groupe hors-norme qui évite soigneusement les autoroutes du music-business. Chacun de ses albums, au fond, exprime la même sentence ultra-radicale : le capitalisme mène à l'Apocalypse - on adhère ou pas... Quoi qu'il en soit, la musique de Godspeed You Black Emperor!, quasiment dénuée de chant, s'apparente plus à un appel muet et fataliste à l'insurrection qu'à un objet de propagande pur. Si la révolte gronde, elle est purement musicale et reste informulée. Godspeed nous invite à grossir les rangs des esthètes-kamikazes pour qui rien n'est plus beau qu'un combat perdu d'avance.

Sorti en 2000, cet album est sûrement le plus abouti du collectif Montréalais. En apparence, il est plutôt hermétique. 4 plages de 22:30 minutes, sur deux CD, forment une unique symphonie, épique et ténébreuse. Le nom des titres n'est indiqué nulle part, mais le livret contient un mystérieux diagramme chronologique représentant les variations d'intensité de l'album. Ce mépris des formats imposés est revendiqué par ces artistes comme par tous ceux de l'intransigeant label Constellation (The Silver Mt. Zion Orchestra and Tralala Band, Fly Pan Am, Exhaust, tous plus ou moins liés à Godspeed ...) par lequel la version vinyle a été éditée, alors que le double CD est sorti chez Kranky.

Le disque navigue perpétuellement entre de flamboyantes envolées orchestrales et des phases d'extrême nostalgie, comme au début de la deuxième partie, lorsqu'un homme à la voix chevrotante se remémore son enfance avant de lâcher, dans une tristesse infinie : "They don't sleep anymore on the beach...". Parfois, la même note de violoncelle, le même larsen se prolongent jusqu'à la douleur, vous immergent dans l'angoisse et soudain, un puissant rayon de soleil éventre le ciel uniformément noir: grosse caisse, fine pluie de cymbales, distorsions suintantes, cordes lyriques, vont crescendo et portent une joie post-humaine, à l'abri du temps et de la contingence. Mais la félicité ne dure qu'un instant. Très vite, les guitares se taisent, le rythme retombe, et ne subsistent que les sons lointains d'un monde détruit, comme si on déambulait dans une ville ravagée. Au milieu de cette promenade, les échos étouffés d'un piano et une voix d'outre-tombe procurent des frissons à la limite du supportable.

"Lift your skinny fists..." est une chevauchée macabre qui allie la puissance organique des cordes à un rock progressif débridé, pour une orgie sonore éprouvante, mais inoubliable.
Godspeed You Black Emperor!, ou la rencontre de Wagner et Sonic Youth dans un abri antiatomique...







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14 février 2007

Archive - Unplugged (2004)

Vous connaissez tous Archive mais est-ce que vous connaissez Archive en unplugged? A première vue l’idée peut paraître étrange pour un groupe jouant habituellement au maximum sur l’électronique et la sophistication de leurs sons sur plusieurs niveaux. Passé l’effet de surprise on ne peut que constater que… ça marche ! Les chansons que l’on connaît derrière des basses et des orchestrations puissantes sont tout autant efficaces en acoustique. Elles y gagnent même en émotion. C’est dans cette musique épurée que la voix de Craig Walker devient si touchante. Unplugged est un album qui s’écoute en silence et de façon religieuse. Limité au trio voix / guitare / piano, le groupe de Darius Keeler et Danny Griffith est étonnant de simplicité. Pour la petite histoire cet album est sorti en 2004 peu de temps après l’album Noise alors que tout le monde s’attendait à un live électrique. Produit par Warner et enregistré en petit comité dans le studio Davout à Paris où sont passée entre autres les Rolling Stones et Lou Reed, cet album est selon moi trop court. Unplugged (qui n’a rien à voir avec la série d'MTV) est l’occasion de se poser dans un monde qui va si vite et d’écouter Archive autrement. Complément indispensable d’une discographie déjà si riche, moment de récréation folk pour un groupe de trip hop, chanteur sur le fil du rasoir en état de grâce, Unplugged est tout ça à la fois. Ne vous en privez pas.

Personnellement je trouve qu’Archive a eu la bonne idée de ne pas faire figurer ses gros titres sur ce live. Ici vous ne trouverez pas d’"Again", ce qui rend cet album très personnel, plus humain peut-être. Bonne surprise, deux reprises inédites sont présentes, "Game of pool" des français de Santa Cruz et "Girlfriend in coma" des Smith. "Goodbye" ici en écoute est à belle à en pleurer. A ne pas écouter donc si vous êtes dépressif. Pour tous les autres, faites vous plaisir.
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En bref : Une fois débranché, on découvre un Archive différent et attachant. Une porte d'entrée possible pour les réfractaires.
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"Noise" :

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08 février 2007

Joanna Newsom - Ys (2007)

N'en déplaise aux pourfendeurs de la critique bobo, la presse musicale branchouille ne s'est pas trompée en encensant l'ovni folk de l'américaine Joanna Newsom, Ys. Second album de la demoiselle par ailleurs.

Voilà ce qu'on pouvait lire il y a quelques temps dans les Inrockuptibles (sic) : "Merci pour le nouveau Joanna Newsom : c’est simplement incroyable, les arrangements sont sublimes, les meilleurs de Van Dyke Parks depuis un moment ! ... Et les morceaux... Je reste sans voix, c’est dangereux, je ne serai pas capable d’écouter autre chose pendant des semaines... Ceci n’est pas un disque c’est une drogue !"

Honnêtement, je ne sais pas quoi vous dire de cet album. Pour commencer, la petite histoire de la dame peut-être. Joanna est née en 1982 sous un soleil radieux de Californie, à Nevada City pour être précis. Elle débute la harpe à l'âge de 7 ans puis étudie cet instrument au Mills College avant de bifurquer vers le clavier. Elle participe à quelques groupes de la Cité des anges comme Golden Shoulders ou The Pleased. Son premier EP solo sort en 2002 et s'intitule Walnut whales. C'est ensuite le très suave The milk-eyed mender qui voit le jour en 2003 chez Drag City, responsable aussi des galettes de Will Oldham.
Et nous voilà en un clin d'oeil en 2006 avec cet objet insolite entre les mains : Ys. 5 pistes, 50 minutes d'évasion, d'aller-retour entre passé et présent dans le brouillard total. Certes il y a une patte, celle de Van Dyke Parks, géniteur du classique psyché Song cycle en 1968 et vieux routard du psyché rock et du folk, mais il y a aussi et surtout cette association si déchirante entre la voix évasive de Joanna Newsom et la douceur d'une harpe, instrument rare et précieux.
Appuyons sur la touche lecture de notre vieille platine, juste pour voir ou plutôt écouter. A partir de ce moment fatidique, votre corps se pixélise, tout remue à l'intérieur et cependant vous n'êtes pas ici, pas là, ailleurs certainement. Mais où? Comment parler de cet album si ce n'est par de l'affectif et des métaphores, des images et des images, encore et encore. Ma pompe à sang j'ai envie de la jeter dans des gueules. Je sens ma poitrine se décharner et dévoiler un bric-à-brac d'entrailles et de sentiments à l'air libre. A vif, la vie pénètre sans douceur. Si le charme agit, la mélancolie nous dévore dans de longues plages vocales sans fin. Evasif, fantaisiste, enchanteur, onirique... vous pouvez y mettre tout ce que vous voulez. Mais vulnérable c'est comme ça que vous finirez. Tout vous déchire, vous écorche. Et pourtant le vernis est doux, toujours. Mais amer, souvent.
Ys est un album fort, pénétrant. Un album en marge aussi. Perdu entre plusieurs mondes et plusieurs époques, loin des modes mais jamais loin de la vie et de ses dépendances. A écouter donc. Au moins une fois, pour paraphraser Vade.
fab


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A écouter : "Emily" et "Cosmia".



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The Pharcyde - Bizarre Ride II The Pharcyde

1992. Dr Dre lance "The Chronic", sa première bombe. A l'est, Redman , épaulé par EPMD, commets aussi son premier assassinat sonore, "Whut? Thee Album". Epoque sacrée pour le hip-hop US, donc. Les Pharcyde, quatre adolescents de LA qui passent leur temps à breaker, sortent alors un premier disque qui contraste fortement avec l'ambiance gangsta régnant sur la West coast. "Bizarre Ride II The Pharcyde" est un classique absolu du hip-hop jazzy. Produit par J-Sw!ft , il est porté par les flows élastiques et chantants d'Imani, Booty Brown, Fatlip et Slim Kid Tre. Une ambiance festive et euphorique, à l'image de la pochette, imprègne chaque track, du sauvage "Oh shit!" à l'enfumé "Pack the pipe". Les lignes de contrebasse rebondissantes rappellent l'origine Californienne des comparses, tandis que les samples jazz-funk et les paroles surréalistes évoquent davantage le son New-Yorkais des Native Tongues, célèbre équipe de soulbrothers regroupant notamment De La Soul et A Tribe Called Quest.
L'album suivant, "Labcabincalifornia" (1995) , n'obtiendra pas, malgré les beats incroyables de feu Jay Dee, le même succès que "Bizarre Ride", disque d'or dès sa sortie. Du coup, Fatlip et Slim Kid quitteront le groupe à la veille de la sortie du 3ème opus pour se lancer dans des carrières solo plus ou moins réussies.
Aujourd'hui, les Pharcyde ne sont donc plus que deux. Leurs dernières livraisons, "Plain Rap" et "Humboldt Beginnings", pâtissent d'une production trop lisse et convenue, mais restent agréables à écouter. Le duo continue à tourner, souvent accompagné d'une section rythmique, et passe régulièrement par la France. Sur scène, il déploie une énergie digne des débuts. Concert à ne pas manquer, donc, si vous en entendez parler.

Restés dans toutes les mémoires aux États-Unis, les Pharcyde sont injustement méconnus en France. Alors réparons cet outrage, et célébrons comme il se doit les quinze ans de leur mythique premier album, en prenant une grosse bouffée de bon old-school qui fait tousser.

Le hit de "Bizarre Ride" est sans hésitation "Passin' me by", dont l'instru reprend le thème de "Summer in the city", de Quincy Jones. Premier titre enregistré par le quatuor avec l'appui des Brand New Heavies, "Soulflower", ici en version remixée, est un autre moment fort, avec ses cuivres en fanfare et les débits impressionnants des rappeurs. Plus anecdotique, "Ya mama" est un délire juvénile où les Californiens vannent leurs mères respectives.
A noter, une version instrumentale existe en CD et Vinyl. Et un DVD datant de 1997 reprend l'essentiel des clips des deux premiers LPs, dont la vidéo de "Drop" par le maître Spike Jonze (Cydeways, The best of The Pharcyde, chez Delicious Vinyl, réédité chez Rhino en 2002).

Le dernier titre, "Bullshit", est tiré du deuxième album :




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06 février 2007

The Bees - Free the Bees

The Bees c’est une sacrée bande de gai lurons issus de l’Ile de Wight (je vous entends déjà : "c’est où ça ?") à contre sens complet de ce que l’on a l’habitude d’entendre ces derniers temps. Sorti en 2004 et deuxième opus des compères Paul Buther et Aaron Fletcher après Sunshine hit me en 2002, Free the Bees est un album indépendant inclassable et incontournable qui sonne résolument sixties. Et pour cause, enregistré en trois semaines dans le temple de la musique anglaise, j’ai nommé le petit studio (studette ?) d’ Abbey Road où sont passés d’autres groupes aux noms de bêtes ("Ha bon qui ça ?"), Free the Bees sent bon la pop rétro et fleurie. Complètement débridés, ces sept néo babas travellers barbus s’en foutent de ne pas être "hype" et continuent à rendre un hommage moderne aux Kinks, Byrds et autres Who. A la fois rock, pop, soul et même reggae, ces drôles d’abeilles s’autorisent toutes les fantaisies dans une fin d’album à tomber par terre. Comme je l’avais lu quelque part lors de sa sortie, "Dans un monde idéal, chaque chanson de cet album serait un tube", mais la concurrence est rude et le monde du rock cruel. C’est sans doute pour ça que ces abeilles ne connaîtront sûrement jamais la notoriété des "singes arctiques" mais je pense qu’ils sont très bien comme ils sont, sur l’île de Wight, parmi les moutons. Alors Please, ne passez pas à côté de ce joyau de la couronne pop.

Du côté des titres, on assiste à une telle diversité des genres que c’est dur de sélectionner. Pour ma part les titres de deuxième partie d’album son meilleurs. Ma préférence revient pourtant à "The Russian", peu représentative du groupe (si tant est qu’il puisse être représenté) mais au riddim reggae profondément jouissif. A écouter en direct le titre "Chicken Paybac" repris dans une publicité pour assurance.


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04 février 2007

Marc Leclair - Musique pour trois femmes enceintes

Le Québecois Marc Leclair, plus connu sous le nom d'Akufen, est l'un des instigateurs du "clicks n'cuts" (ou "beats n'clicks"), une électro truffée de craquements, crépitements et autres bruitages industriels. Découvert lors du festival Montréalais Mutek en 2000, il enchaîne les EPs sur les labels les plus prestigieux (Perlon, Hautec, Trapez...) et travaille avec de nombreux DJs Européens, de Ricardo Villalobos aux Français de l'écurie Katapult. C'est en 2002 que sa carrière explose avec la sortie de "My Way", son imposant premier LP. Des sons bidouillés sortis de nulle part y côtoient des basses rondes et funky sur une rythmique house. Les productions suivantes ont beaucoup déçu, Akufen appliquant encore et encore la même recette, au point de se parodier lui-même... jusqu'à la sortie de "Musique pour trois femmes enceintes".

A l'origine, il s'agissait d'une pièce expérimentale qui a donné lieu à une performance, en 2003, à la Tate Modern Gallery de Londres. Conçue pour accompagner la grossesse de sa femme et de deux de ses amies, elle est devenue un album de neuf titres ("1er jour", "33ème jour"...) pour autant de mois de gestation.
S'affranchissant de la dictature du dancefloor, Marc Leclair nous replonge dans le ventre de maman en tissant une trame émotionnelle faite de longues plages éthérées et de samples d'échographie. A mesure que le corps se modèle et que les fonctions vitales apparaissent, la musique se complexifie, s'épaissit, et la cadence augmente comme celle d'un coeur. Pour moi, ce concept-album redonne vie à l'ambient, genre qui semblait condamné à orner les rayons de Nature & Découvertes.

Si vous voulez connaître la sensation que procure un voyage en sous-marin dans le liquide amniotique, "Musique pour trois femmes enceintes" vous en donnera une idée. Une naissance à écouter seul, d'une traite, chaudement recommandée aux aquariophiles et aux nostalgiques du placenta.



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Peter Tosh - Stepping razor (DVD)

Peter Tosh, de son vrai nom Winston Hubert McIntosh, est l'une des figures les plus respectées du reggae jamaïcain. Et pour cause, fondateur des Wailers avec Bunny Wailer et Bob Marley, il a marqué l'histoire de la musique jamaïcaine à jamais. Il s'est aussi imposé comme une des figures de proue du mouvement rastafari en Jamaïque. N'hésitant pas à interpeller les hommes politiques de l'île pour s'indigner de la pauvreté du peuple, de la répression à l'égard des rastas, de la corruption ou encore pour affirmer la nécessité d'un soulevement de la population noire.

Ce DVD que j'ai trouvé tout à fait par hasard en flânant dans les rayons ce cette bonne vieille Fnac d'Avignon a plutôt été une bonne surprise. Réalisé par un journaliste anglais, ce documentaire est relativement bien construit (sans être génial je l'avoue) et permet aux amateurs de musique jamaïcaine de se fondre dans l'ambiance des ghettos (les fameux "Trench town") de Kingston et de redécourvrir le personnage de Peter Tosh, un des grands de la reggae music.

Le film s'appuie sur de nombreuses images tournées en jamaïque dans les quartiers populaires mais aussi sur les "Red X" tapes de Peter Tosh, sorte d'autobiographie audio enregistrée par le chanteur lui-même avant sa mort tragique en 1987.
A ce propos, Nicholas Campbell, le journaliste réalisateur, revient largement sur le combat de Tosh pour l'émancipation du mouvement rastafari et de la population noire jamaïcaine. Bien évidemment, il ne manque pas de nous livrer les images mythiques du "One Love Peace concert", concert organisé entre autres par Bob Marley en 1978 à l'occasion du 12e anniversaire de la visite officielle de Hailé Sélassié Ier en Jamaïque. Les artistes réunis pour l'occasion avaient pour but de célébrer la paix et de mettre fin à la guerre civile qui ravageait le pays. Cet évènement est resté dans les mémoires pour ce moment historique où Bob Marley joignit les mains de Michael Manley et Edward Seaga, les deux opposants politiques de l'époque et responsables en grande partie de la violence dans le pays. A l'occasion de ce concert, Peter Tosh s'était montré très véhément, s'adressant directement depuis la scène aux deux hommes politiques avec violence. Beaucoup pensèrent ensuite que la mort de Tosh était la conséquence directe de ces réprimandes publiques et surmédiatisées lancées aux deux hommes.

En effet, Peter Tosh, agitateur publique et polémiste notoire, sera retrouvé mort le 11 septembre 1987, une balle dans la tête. Vérité officielle : Peter Tosh a été abattu par des voleurs qui étaitent venus le braquer à son domicile. A noter : Les voleurs n'avaient rien volé (bizarre) et une seul des trois suspects a été incarcéré. Il clame toujours son innocence plus de 20 ans après les faits.

Un DVD tout à fait honnête pour comprendre la légende Peter Tosh. Sans mythification et sans artifices on découvre ou redécouvre un musicien de talent qui a fasciné ses contemporains (Mick Jagger était notamment un de ses plus grands fans) mais aussi un homme d'action, activiste rasta et alter ego plus sombre et violent de Bob Marley.

Je vous laisse avec un titre de Monsieur Tosh, preuve, s'il le faut, de son engagement.


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Klaxons - Gravity's rainbow

Et bien mon petit Ju, je suis bien content que tu nous aies livré tes impressions sur le très attendu album des Klaxons Myth of the near future. Effectivement, cette sortie, le 29 janvier, était certainement une des plus préparée et commentée de l'année. Les Klaxons avaient pris le soin de distiller bon nombre de singles avant de balancer leur disque dans les bacs.
Après avoir découvert ce phénomène anglais dans une compile démo des Inrocks, j'ai fait des pieds et des mains pour trouver quelques morceaux à me mettre sous la dent. C'est pendant mes dernières vacances irlandaises que je me suis finalement procuré le vinyle "Gravity' rainbow". S'il ne vaut pas particulièrement le détour pour l'écoute de ce titre déjà "hitifié", il s'avère tout à fait intéressant pour les trois remixes proposés. En l'occurrence, je n'ai pu réfréner mon bonheur lorsque j'ai découvert la présence sur le vinyl du "Van she remix" de "Gravity's rainbow". Vous allez me dire le "Van she remix" super ! Mais c'est quoi cet obscur remix ? Ben c'est pour moi le meilleur morceau des britanniques que j'ai pu entendre pour le moment.
A vous d'en juger maintenant grâce à la complicité de radioblog, mais ne me dites pas que votre corps ne fourmille pas à l'écoute de ce son et que l'envie de fouler les dancefloors ne se fait pas ressentir. Ne serait-ce qu'un peu...
Fab.



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02 février 2007

Klaxons - Myth of the near future (2007)

Oubliez tout ce que vous avez écouté jusqu’à présent… ou presque. L’un des albums indie les plus attendus de l’année est enfin dans les bacs. Au programme, un savant mélange de pop 80’s et de rave 90’s, qui nous donne aujourd’hui… la new rave ! Après il faut faire la part des choses entre l’effervescence médiatique (des deux côtés de l’atlantique) et la réalité. Oui cet album est une véritable machine à danser, oui la majorité des chansons déjà reprises par les stars du dancefloor sont imparables, mais bon, d’autres groupes ont déjà franchi le pas du mélange électro / rock avant eux. On pense à LCD soundsytem, The Killers, The automatic ou encore les excitées de CSS. Comme les Artic Monkeys il y a deux ans, l’originalité vient du fait qu’ils ont été découverts sur le net, puis par l’excellent EP Magick (dont certaines chansons auraient mérité de se retrouver sur cet album). Ces trois anglais âgés de 26, 24 et 23 ans ont désormais tous les regards portés sur eux et se disent concentrés pour réussir le virage délicat du deuxième album. Souhaitons leur bonne chance, le rock fluo ne s’en porterait que mieux !

LA chanson à écouter c’est bien évidemment "Atlantis to interzone" qui sirènes hurlantes dès le début n’a pas fini de vous faire sauter dans tous les sens. Ensuite ma préférence revient à "Totem on the timeline" qui peut rester dans la tête de longues heures après écoute. Difficile de ne pas penser à Prodigy dans l’intro "Two receivers" qui vire ensuite au rock plus classique on va dire. Pour moi, la fin de l’album est légèrement plus faible. De toute façon une incroyable énergie rock de bout en bout. A écouter d’urgence en sautant sur son canapé le samedi soir avant de sortir.

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01 février 2007

Oxmo Puccino et les Jazz Bastards - Lipopette Bar


Abdoulaye Diarra est né en 1974 au Mali. Il arrive à Paris un an plus tard avec sa famille. Il habite le 19e arrondissement. C’est sous le nom d’Oxmo Puccino que nous le connaissons aujourd’hui. De ses premiers projets sous le label Time Bomb à ses albums solo Opéra Puccino, L’amour est mort ou encore Le cactus de Sibérie, l’homme incarne un rap français poétique de qualité. Un de mes rappeurs français préféré sans aucun doute.


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