16 mars 2009

Alain Bashung - Novice (1989)


Novice, Alain Bashung né Baschung, ne l'est plus tout à fait lorsqu'il publie son 6ème album. Car si cela fait 20 ans qu'il fait carrière, celle-ci n'a pris un tour populaire qu'en 1979 par la grâce d'un tube roué, la méga-connue "Gaby Oh Gaby", depuis longtemps reniée par son interprète, et suivie de près par l'indispensable et également tubesque "Vertige de l'Amour".
Mais le succès à tout crin qui d'ordinaire fait tourner la tête à plus d'un artiste de variété (osons le mot), ne porte pas ombrage à Bashung, qui décide assez vite de poursuivre l'aventure "commerciale", en pondant certains de ses albums les moins accessibles. Ce sera d'abord le très new-wave Play Blessures (1982), puis sa copie carbone (et comme toute copie...) faussement guillerette, Figure Imposée (1983). Après une concession à l'audimat et aux chiffres de ventes avec le pataud Passé le Rio Grande (1986), l'Alsacien revient à un niveau de production plus conforme à son talent, en offrant les ambiances glaciales (ou brûlantes, c'est selon...) de son nouveau disque.

Quelque peu plombé par des sons de synthés aigrelets et définitivement passés en 2009, ce petit frère de Play Blessures retrouve l'inspiration de son illustre devancier. Un détail qui ne trompe pas quant à la qualité de Novice, c'est qu'un de nos chouchous, Colin Newman de Wire, fait ce coup-ci parti du casting. On note aussi les présences aux guitares de Phil Manzanera, du fidèle Olivier Guindon, dépositaire du si fameux son Twang, entre surf et cold.
Jean Fauque, lui, supplée Boris Bergman aux textes.

Cet album est noir, sépulcral, comme sa pochette, magnifique portrait de l'artiste en gros plan. Dès "Pyromanes", s'instaure une ambiance de soufre. On n'est pas là pour rigoler, pour faire dans l'entertainment ; d'ailleurs Bahung s'est mis au vert : No drugs, no alcohol, no vice ? Et là où les sonorités surréalistes de Bergman, les calembours les plus absurdes de Gainsbourg ("Scène de Manager", "Trompé d'Erection") désacralisaient les climats les plus polaires initiaux ; le sourd nihilisme poétique d'une majorité des titres de Novice exigent de l'auditeur une grande disponibilité. "Intrépide Malgré la Fièvre", "Alcaline", sont tout sauf des titres faciles ; les sons Midi tribaux de "Tu M'as Jeté" et "Elle Fait L'avion" ne sont pas à proprement parler sexy.

Et puis, quand on pense qu'un truc comme "Bombez !" est sorti en single ! On devine l'indépendance dont jouit Bashung vis-à-vis de sa maison de disques, et les têtes des représentants de celle-ci quand ce dernier leur amenait les bandes de ses albums. Bashung n'a peur de rien, ne recule pas devant l'emphase, la diction outrée sur le très beau titre qu'est "Etrange Ete". Si Play Blessures conviait à la traversée d'un brasier rougeoyant, Novice n'en est plus que le no-mans land désolé sur un tapis de cendres. Brrrrr...

En bref : pas l'album le plus vendeur ni donc le plus connu de son auteur. Mais un monument de noirceur, de sons irréels, à mi-chemin entre la new-wave, l'indus et la chanson française. Le disque qui clôt - et de quelle magistrale manière - un cycle.




Le site off


"Pyromanes"

1 Comment:

Dave said...

A signaler, l'initiative d'un fan pur et dur qui a réagi à la mort de l'artiste... en ouvrant un blog tout entier voué au culte du sieur Bashung !
http://monsieurbashung.hautetfort.com/