26 juillet 2008

Mathilde Monnier / Philippe Katerine - 2008 Vallée - Festival d'Avignon


 Après le faste des costumes princiers des grandes tragédies, la revanche dépouillée, des sous-pulls roses et des éclairages monochrome.

Ce soir, nous est donnée l'occasion d'aller à la rencontre de deux artistes décalés, Mathilde Monnier et Philippe Katherine dont la chorégraphie on ne peut plus moderne et la pop excentrique frayent respectivement leur chemin dans un lieu mythique entre tous, j'ai nommé la Cour d'Honneur du Palais des Papes.

Si l'on connaît surtout e la première le parfum sulfureux drainé par ses précédentes créations en Avignon,  l'univers pop et loufoque du nantais est bien familier ; il est du reste ce qui motive notre présence en ces lieux, ainsi que celle de Domi et Nini.

Pas grand chose à dire de ce spectacle écrit en 2005 et présenté pour la première fois un an plus tard, et dans un sens tant mieux ; celui-ci est de fait inspiré de la genèse du très roboratif Robots Après Tout (2005), l'album qui a véritablement révélé Katerine au grand public.

Ceux l'ayant usé jusqu'à la corde (enfin, jusqu'au sillon !), savent de quoi il retourne lorsque les 5 danseuses et danseurs vêtus de noir se mettent à psalmodier sur cette scène vaste pour eux, des bribes d' "Etres Humains". Tout ce curieux ballet, à la fois anachronique et disparate, mais sans doute très étudié sous ses airs "libres", consiste en un télescopage sans fin des musiques et textes de Katerine pour l'essentiel issus de Robots... - on distingue aussi une citation de "Jésus Christ Mon Amour" mais hélas pas de "Je Vous Emmerde" (NDA)- le tout dans une osmose perpétuelle des corps, des voix de ces danseurs improvisés (plutôt bien !) chanteurs, tandis que Katerine s'adonne sans retenue aucune, tout en assumant parfaitement un embonpoint naissant, à certaines gesticulations, roulades et autres pas.

Pour déroutant que soit le spectacle qui s'adresse avant tout aux aficionados du chanteur -j'y reviens à la fin de cet article- on se laisse porter, passés les premiers instants de rigolade bouffonne un peu gênants, et même transporter par ces enchaînements de mots mettant en scène la vie de tous les jours. Les paroles de Katerine, sur des bandes-son, nouveaux arrangements ou simples accompagnements rythmiques, confinent à l'absurde, en une forme de mise en scène dérisoire et poétiques de nos vies.

C'est en ce sens que le spectacle revêt plus d'attrait au fur et à mesure de son déroulement, certains titres fonctionnant sur le mode du cut-up, s'enchevêtrent en des non-sens fascinants - l'on pense au "Variations sur Marilou" de Gainsbourg, lorsque sur le fameux "Louxor j'adore", Katerine décline de manière un peu trop complaisante il est vrai (car la version très étirée en devient assommante) son texte. Là, deux textes de chansons se superposent, ici le bourdonnement rythmique de "Borderline" emprunte les paroles du "20-04-2005", soit l'inénarrable "Marine Le Pen Non, Non/Tu le Crois Pas, Tu le Crois Pas".

L'un des passages les plus intéressants reste celui où sur "Numéros" - Katerine qui se dit fâché avec les dates et les chiffres a sans doute voulu exorciser quelque chose, car son oeuvre en est truffée ! -  à l'unisson, les danseurs accompagnent la mélodie du chant, litanie de chiffres, en faisant eux-mêmes l'accompagnement rythmique d'ordinaire dévolu aux claviers.

Le spectacle se termine sur un curieux matelas gonflable sur "78-2008", seul morceau diffusé en play-back sur lequel Katerine et ses ami(e)s essaient de reconquérir un équilibre précaire sous fond de mer déchainée, chacun y verra l'interprétation qu'il veut, y compris un libre démarquage d'Intervilles (!) ; ce morceau, l'un des plus réussis de son auteur, est une vision très récente d'un progrès incertain (mais 1984 n'a-t-il pas été écrit en 1948 ?) 2008 Vallée est empreint d'un fort narcissisme, mais on retient avant tout qu'une très large majorité du public rit et se délecte d' une musique qui lui est familière. N'est-ce pas là le plus important ?

A ce titre, la présence d'un public très coincé et rompu aux oeuvres classiques, conduit régulièrement à des échos hilarants de festivaliers outrés par le non-académisme du spectacle. Pas fan de Katerine, s'abstenir !


Pour en apprendre plus sur le projet et sur Katerine

Pour donner toute la dimension d'outrecuidance et de folie du projet, cette bribe piochée sur YouTube...



Ainsi que cette belle et très glam interprétation de 78-2008:

2 Comments:

Ju said...

Ah ce bon vieux festival d'Avignon, il nous réservera toujours des surprises. C'est moi ou sur la deuxième vidéo c'est le fauteuil d'Emmanuelle?
A+
Ju

Brigetoun said...

mais justement il n'était pas là- et j'aurais préféré Katerine tout cru.
Monnier a-t-elle toujours besoin de se raccrocher à un autre créateur ?