05 décembre 2008

Danielson - Ships (2006)

Je vous avais parlé il y a quelques jours de la densité inouïe du Wowee zowee de Pavement qui déjà en 1995 flirtait avec la saturation d’informations. Onze ans plus tard, les temps changent, les folkeux à barbe (Devendra Banhart, Bon Iver, Palace, Destroyer…) ont remplacé les branleurs à chemise à carreaux sur le devant de la scène indé. Ca se passe toujours au pays de l’oncle Sam, et le chef d’orchestre de cet autre disque plein jusqu’à la gueule se nomme Daniel Smith. Sommité de la dite scène, vous avez peut-être déjà croisé son chemin sous les pseudonymes Brother Danielson, Danielson Famile ou Tri-Danielson, le jeune homme ayant l’incestueuse tendance d’embarquer sa famille dans l’histoire. En 2006 il va plus loin que ça en convoquant dans son studio de Clarksboro amis et anciens collègues "de boulot" pour donner vie à ce qu’il aura mis plus de deux ans à écrire. N’ayant que la surenchère comme sacerdoce, ce sont pas moins de 34 musiciens qui ont répondu à l’appel de la forêt, dont les noms les plus connus (Sufjan Stevens, Josiah et Yoni Wolf, Steve Albini, Deerhoof) devraient suffire à titiller la curiosité de tout folk freak digne de ce nom.

Ships en ce sens fait office d’arche de Noé du folk indé, récupérant à son bord tous les ingrédients nécessaires à sa salvation. Toutes voiles hissées, les onze titres qui en découlent impressionnent et forcent le respect. Tout comme dans le St Pepper’s Lonely Hearts Club Band de qui vous savez, le projet est massif et l’hystérie collective. Ca part dans tous les sens et du déluge sonore qui semble sans ordre convenu émergent dans de nombreux instants de magie des mélodies contagieuses. Je vous entends venir, Danielson n’est pas les Beatles et son ambition n’est pas aussi pop. Et il faut s’accrocher au ponton pour pouvoir suivre ces digressions tout azimut. Changements de rythme, instruments maltraités, breaks inattendus, chant à la limite du suraigu, la tempête bat son plein. Et si le premier voyage peut donner le mal de mer, les suivants ne seront plus que jouissance contagieuse.

Tout en rupture et contrastes, Daniel Smith dirige instruments à vent en veux-tu en voilà, instruments jouets, chœurs de maternelle, glockenspiels et autres bizarreries en autant de titres voguant entre pop théâtrale et folk forain. Du déjà vu me direz-vous. Peut-être mais avec ce je ne sais quoi en plus, qui fascine et ensorcelle à chaque écoute. Parmi les sommets de ce disque, laissez vous aller à découvrir "Ship the majestic suffix", "Bloodbook on the half shell" ou "Five stars and two thumbs up". Si vous êtes pressés, contentez-vous de "Did I step on your trumpet", simple chef d’œuvre qui ne me rappelle à rien d’autre. Croisement total des genres, emphase, chœurs, final explosif, sensationnel ! C’est pas pour dire mais Pitchfork avait noté cet album 9,1. Ca ne veut rien dire mais bon, quand même… A noter que Danielson est revenu cette année avec Trying hartz, une double compilation à laquelle je n’ai pas encore jetée l’oreille.

En bref : Manifeste freak folk d’un artiste à son sommet. Difficile d’accès mais véritable caverne d’Ali baba pour ceux qui y reviennent.
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Le site officiel et le Myspace du garçon

A lire aussi : The Decemberists - Picaresque (2005)

Bien évidemment, le clip de "Did I step on your trumpet" :

1 Comment:

Dave said...

Les folkeux barbus ne sont-ils pas souvent des branleurs en chemises à carreaux ?