07 octobre 2009

John Sellers - Perfect From Now On, How Indie Rock Saved My Life (2007)

"Je hais Bob Dylan". Ainsi débute le livre de John Sellers, journaliste freelance américain vivant à New-York et spécialiste de la pop culture. Alors pourquoi tant de haine dans un recueil en forme d’hommage à la musique alternative ? Parce que pour Sellers, appartenant à ce que l’on appela à l’époque la génération X, et ayant passé son adolescence au milieu des années 80, Dylan représente tout ce que son père aime. Et Sellers veut tuer le père. Et Sellers, pour situer, c’est trait pour trait le héros du High Fidelity de Nick Hornby. Un Rob Fleming personnifié, authentique geek devant l’éternel, à la fois obsessif, snob, mais terriblement humain. Dans un style post gonzo rock, telle une conversation, l’auteur ne fait rien de plus que raconter comment il aime et écoute la musique. De son enfance à Grand Rapids, Michigan jusqu’à aujourd’hui en passant par ses années universitaires, rien ne nous est épargné. On apprend au cours d’anecdotes forcément savoureuses comment Duran Duran est devenu son premier coup de foudre musical, puis comment Joy Division, New Order, The Smiths, U2 et j’en passe ont pris le relai. A chaque fois un détail, une expression, une situation qui font mouche pour tout fan de rock indé. Moi aussi j’ai déjà vécu cette situation se dit-on un sourire aux lèvres. Comme le choix délicat du premier album que l’on passera dans sa nouvelle collocation. Quelle image veut-on donner de soi à travers la musique que l’on passe. Une valeur sûre ? De l’expérimental ? Qu’importe. Car comme le dit le journaliste Chuck Klosterman en quatrième de couverture : "Perfect From Now On est intelligent, intéressant et sincère, et je suis en total désaccord avec tout ce que l’auteur dit".

Mais ce que j’ai le plus aimé dans ce livre, c’est peut-être son côté américain. Parce qu’après la salve anglaise des années 80, Sellers s’est tout naturellement tourné vers la scène alternative de l’Oncle Sam. Ainsi Dinosaur Jr, Pavement, Sebadoh, Built To Spill et Guided By Voices ont pris ses goûts musicaux en otage. Parce que je ne l’ai pas encore dit, mais Sellers voue un culte absolu au fameux groupe de Dayton et à son front man Bob Pollard. Une adoration presque mystique qui le pousse à se creuser les méninges sur la notion de fan, sous tous les angles, avec des réflexions que tout le monde a déjà eues, rapportées ici avec humour et passion, du genre "je suis le seul à ressentir ce morceau comme ça ?" ou encore "suis-je normal d’aimer ce groupe à ce point alors que personne n’en parle?". Une obsession pour GBV qui le poussera d’ailleurs très loin, jusqu’à rencontrer son idole et à se brouiller avec lui à cause du livre. Une longue déprime s’en suit, qu’y a-t-il de pire que d’être haï par l’être que l’on adule plus que tout ? Pourtant si vous êtes attentif, Sellers a choisi d’intituler son essai selon le titre de l’album de 1997 du groupe de l’Idaho Built To Spill, un autre de ses protégés. A noter enfin qu’en tant que parfait geek, Sellers accumule les notes de bas de page, les rendant presque aussi longues que les vrais chapitres, comme un livre dans le livre, comme un aparté dans une conversation. Pire que tout, et là ça devient génial, Sellers termine son bouquin par les traditionnelles listes chères aux passionnés. Parmi elles citons "Top 5 des albums souvent cités que je n’ai jamais écouté", "Top 9 des pires noms de groupes", "Top 12 des meilleurs guitaristes alternatifs", "Top 5 des meilleurs power trios", "Top 8 des meilleures dernières chansons d’un dernier disque d’un groupe", sans compter 189 autres artistes à écouter, la liste exhaustive des concerts qu’il a vu, des formules mathématiques saugrenues pour calculer la qualité d’un groupe… un travail de fou. Pour tous les fans, anglophones, fallait-il le préciser ?

Le site de John Sellers

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En fond sonore pour la lecture de cet ouvrage, "I am a scientist" de Guided By Voices et "Twin falls" de Built to spill :



3 Comments:

Paul said...

Je vois comment je pourrais m'empêcher d'acheter un livre avec un titre pareil.

M.Ceccaldi said...

style post gonzo rock.....tout un programme.....

SD said...

Wow très bon article, je ne connaissais même pas John Sellers. Je suis en phase digestive du nouvel album de BTS que j'ai chroniqué, ca n'a pas l'air énorme comme dans le passé, mais délicieux suffit.