10 juillet 2009

The Dodos - Visiter (2008) / Time To Die (2009)


Dieu seul sait pourquoi, j’avais complètement omis l’an passé de vous parler de ce passionnant duo originaire de San Francisco alors que Visiter son deuxième opus après un anecdotique Beware Of The Maniacs en 2006 m’avait occupé les oreilles quelques paires d’heures. A ne pas confondre avec les plus sages Toulousains The Dodoz avec un Z comme Zorro, le binôme formé par le chanteur guitariste touche-à-tout Meric Long et le percussionniste de haute précision Logan Kroeber fait partie de ces formations folk-freaks qui expérimentent. En positionnant dans une complicité maîtrisée les percussions acoustiques sur un même pied d’égalité que les fingerpickings de guitare, les deux drôles d’animaux atteignent assez vite une sorte de transe afro-folk extrêmement riche et mélodique. C’était évident sur Visiter, ça l’est peut-être encore plus sur Time To Die. Retour en deux actes sur l’élaboration de ce prototype pop-folk déjà cher à Islands, Yeasayer, et bien entendu Animal Collective.

Nous sommes en 2008, deux amis hirsutes un peu foldingues décident de remettre au goût du jour le power duo minimaliste en plaçant la guitare au centre de l’album et en l’accompagnant de percussions africaines quasi kraut-rock. Au bout du compte, sans vraiment avoir fait exprès, les Dodos pondent 14 titres extraordinaires tout de même notés 8.5 chez nos amis Pichefolk. Utilisant différents accordements, des arrangements camouflés et un mixage de qualité (l’écoute au casque donne évidemment le tournis), ce disque en deux parties est porteur d’une jolie ferveur infectieuse. Il n’y a qu’à écouter, allez au hasard, "Fools", pour se sentir entraîné par des morceaux affichant une bonne vitesse au compteur, plutôt rare pour du folk expérimental.

Sur "Joe’s Waltz" il ne faut pas aller chercher bien loin pour retrouver la filiation Animal Collective. On y trouve des moments abstraits et primitifs, mais aussi des moments de fulgurance électrique (à 4’40"). Un peu plus tard il ne faut pas s’étonner si l’on trouve mandoline (un "Winter" d’anthologie), glockenspiel, toy piano, basse fuzzy ou encore harmonies féminines. Economie de moyens Ok, mais à aucun moment on ne fait l’impasse sur les idées mélodiques. Il y a définitivement peu de ratés sur ce disque qui emprunte autant à Akron/Family ("Jodi") qu’à Sufjan Stevens ("The season") en passant par les séminaux Magnetic Fields (l’énorme "Paint the rust"). Un coup de maître !

A peine un an plus tard, et en septembre prochain sur nos terres tricolores (le 15), ils sont de retour en mode trio cette fois-ci, s’étant octroyé les talents de Keaton Snyder, vibraphoniste électrique émérite. Un instrument en plus qui fait sonner la bande davantage comme un groupe. Et à l’écoute de ce nouvel opus une chose est sûre : on y retrouve beaucoup d’ambition et de production. Côté manettes, c’est Mr Phil Ek qui s’y colle. Largement connu et reconnu pour ses collaborations avec Built to Spill, The Shins, Fleet Foxes ou encore Band Of Horses, il est pour beaucoup l’auteur de cette "renaissance" du groupe (pas mal pour un Time To Die). Là ou en 2008 on pouvait encore prendre The Dodos pour une sympathique formation lo-fi communautaire, en 2009 on en est bien loin et nos deux (allez, trois) gentils oiseaux sont dorénavant au niveau de Grizzly Bear par exemple.

C’est flagrant sur "Longform", tant dans la voix que sur les arrangements luxuriants. Egalement sur "Fables" au doux refrain destructeur. Si les titres sont toujours aussi longs (entre 4 et 6 minutes en moyenne), ils sont en revanche bien moins nombreux (9 contre 14 sur Visiter). Manque d’inspiration ou volonté de revenir à un format d’album plus court et plus direct ? Pour ma part je n’ai aucun doute, spécialement à l’écoute de "Two medicines" l’un des sommets de ce nouveau disque, à la fois carillonnant, créatif et maîtrisé, et mené à une cadence des plus entraînante. Peut-être peut-on seulement être déçu par une fin d’album un peu sage, et un certain polissage de l’ensemble sonnant beaucoup moins fanfare chamanique qu’avant, sans doute le prix à payer sur le chemin de la professionnalisation.

En bref : en provenance de San Francisco, deux puis trois drôles d’oiseaux encore en plein apprentissage de leurs moyens livrent en seulement deux ans deux albums de proto folk denses et excitants dont on attend le successeur (disons en 2010 ?) avec impatience. A découvrir d’urgence si vous appréciez les noms cités plus haut.



Le site officiel, le Myspace , Visiter en streaming et Time To Die aussi

A lire aussi : Grizzly Bear - Veckatimest (2009)

Le monumental "Fools" issu de Visiter et "Acorn factory" issu de Time To Die :



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