26 juillet 2009

Frida Hyvönen - Until Death Comes (2005)

Avec cette chronique très juste de la dernière pièce montée de Jens Lekman, Ju me replonge sans le vouloir dans mes trésors de pop suédoise (...oui d'accord, je ne les ai jamais quittés). Frida Hyvönen a atteint l'an passé, exactement comme ce cher Jens en 2007, des sommets de pop orchestrée avec le mélodramatique Silence Is Wild sorti comme par hasard sur le même label Secretly Canadian. Sur cet « album au cheval » (cf la pochette), Frida Hyvönen se livre au même « numéro d'équilibriste » (dixit Ju) vocal et stylistique que son compatriote : on y retrouve le même sens du patchwork, le même goût pour le mielleux, la même grandiloquence, et surtout la même excellence dans l'écriture. Mais à ceux que la guimauve écœure, à ceux qui n'aiment pas que l'on joue avec le feu (=le kitsch en langue indie), je propose un retour au moment où Frida est apparue sur la « scène », dans des atours bien plus minimalistes.

2005 en Suède, un an de retard dans le reste du monde donc, c'est « l'album au piano », Until Death Comes. L'album est comme son titre, sec comme un coup de trique. Une demie heure à tout casser, d'un minimalisme à la limite de la violence. La griffure d'une Lucio Fontana qui croirait dur comme fer en sa toile. Frida ne semble pas très bonne pianiste. La main est maladroite, et le pied donne de grand coups de pédales. Et on entendra que ça, où presque : des à-coups de piano, des silences et des coups donnés sur les pédales. Au contraire, le chant, lui, est tout à fait précis, parfaitement bien placé sur des mélodies finement écrites. Et le choc est là déjà, entre la voix et l'instrument.

Ainsi commence Until Death Comes : dans le piano-folk métronomique de "I Drive my friend" et "Djuna!". Ensuite, "You never get me right" et "Once I was a serene teenaged child" frappent là où ça fait mal. Frida est l'héroïne schnitzlérienne du polaroïd de couverture, névrosée jusqu'aux cheveux, dont la névrose nourrit les chansons plus qu'elle ne s'y exhibe. Plus apaisés, les "Valerie", "N.Y.", et "Straight thin line" sont si bien écrites et interprétées qu'elles réussissent la prouesse de nous faire accepter leurs envolées lyriques, de celles qui inspireront tant Frida par la suite, dans « l'album au caniche » (la bande-son d'une pièce de danse contemporaine, Pudel, 2007), et l'ambitieux Silence is wild. Elles sont ici toujours contrebalancées par la sécheresse de l'instrumentation. Frida double sa voix sur le refrain de "The Modern" : cette seule voix donne toute son étrangeté à la chanson (et la replace par ailleurs dans le contexte d'une scène suédoise : cette voix enfantine façon Stina Nordenstam va bientôt devenir un cliché).

Pour Frida Hyvönen en 2005, les idées les plus simples sont les meilleures. En 2008, elle appliquera le principe diamétralement opposé avec tout autant de réussite. Mais pour le moment, Until Death Comes joue l'austérité. Et dans un tel contexte, "Come another night" impressionne à sa manière : avec trois fois rien, Frida Hyvönen se paie le luxe d'une chanson pop sixties et rhythm 'n' blues lumineuse, avec climax de cuivres à la clé. Et achève de nous émouvoir. Cela pourrait déjà être la fin, au bout de vingt minutes. Mais non : discrètement, "Come another night" contamine les dix dernières minutes. "N.Y.", "The Modern", et "Straight thin line" acceptent une instrumentation (à peine) plus riche, et des mélodies plus mielleuses. A ses radicaux débuts déjà, Frida Hyvönen joue avec le plus et le moins, avec la douceur et la sécheresse, et ce avec une étonnante réussite.

En bref: de la pop rachitique, dont les notes de piano sont si sèches que, malgré la fluidité des mélodies, elles s'embrasent et se consument en moins de 30 minutes.







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