28 avril 2009

The Dead Kennedys - Frankenchrist (1985)

Coupons court au débat, l’intérêt porté au troisième album des californiens sauvages va bien au-delà de la simple polémique dont il a fait l’objet. Mais ne pouvant évoquer le disque sans décrire le contexte, je me vois contraint de résumer les faits : ici ce ne sont ni la pochette - au demeurant géniale, présentant une parade de l’AAONMS, une organisation franc-maçonne américaine - ni le gatefold qui furent mis en cause, mais bel et bien le poster originellement glissé à l’intérieur qui provoqua le procès fatal à la carrière des Dead’s. Celui-ci représentait une peinture de l’artiste H.R. Giger, intitulé The Penis Landscape, une boutade qui déplut fortement à l’état de Californie qui entama alors un long procès pour pornographie, pour finalement arriver à un non lieu.



Mais les Dead’s ne survécurent pas à la procédure, et Frankenchrist est leur dernier album (sans compter Bedtime For Democraty, une compilation et deux lives). Le groupe, considéré comme pionnier dans le punk hard-core californien, mettait alors à mal le rêve américain. Déjà coupable d’un premier album dantesque (Fresh Fruit For Rotting Vegetables) et d’un deuxième tout aussi puissant (Plastic Surgery Disasters), le groupe de San Francisco emmené par le génial Jello Biafra allait poser les bases d’un genre à part, la musique gauchiste faite par des gens intelligents pour faire réfléchir des idiots. Contre le business de la musique, contre le capitalisme, contre les médias, contre la politique, contre la censure, les Dead Kennedys sont contre et le font savoir.
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Là où l’objet aurait pu se transformer en fourre-tout violent et joué à la va-vite, il n’en est rien. Plus lent mais plus long que ses prédécesseurs, Frankenchrist ne cache désormais plus son côté psyché voir progressif. Intégrant le meilleur du punk britannique des 70’s et annonçant le punk hard-core américain des 80’s, l’album est pourtant musicalement simple. La section rythmique est assurée par la batterie entraînante de D.H. Peligro et la basse malsaine de Klaus Flouride. Plus en avant, vous trouvez l’impressionnant jeu de surf guitare de East Bay Ray’s, et surtout le chant d’Eric Boucher alias Jello Biafra, véritable star du band. Egalement producteur du disque, c’est lui qui crée leur label Alternative Tentacles (qui hébergera Bad Brains) et qui s’essaye à de nombreuses reprises à la politique, se présentant notamment comme candidat à la mairie de SF et terminant 4ème sur 10.

Les paroles, à destination des fascistes et du gouvernement Reagan sont une véritable satire de la société américaine et semblent avoir été écrites aujourd’hui. Les titres phares de ce disque sont le désormais classique "MTV Get Off The Air", "Hellnation", "Jock-O-Rama", ou encore le très new-wave "Soup Is Good Food". Aucun name-dropping possible, à ce moment-là les Dead Kennedys sont en haut de l’affiche.
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En bref : album politique et controverse s’il en est, Frankenchrist est peut-être le meilleur d’un groupe un peu trop oublié, pourtant souvent copié, rarement égalé.


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A lire aussi : The Jesus Lizard - Shot (1996)

Le site officiel et l’album en streaming

"Soup is good food" et "MTV get off the air" en live :

4 Comments:

Nickx said...

Incroyable, cette chronique qui me replonge plus de 20 an arrière, avec le Penis Landcape, mais sans le gate-fold (?).

Groupe génial, album génial, propos virulent et anti-con qui enfonce tous les RATM de la terre !

Il est salutaire, à tous les niveaux de voir cet album mis en lumière en 2009, car la censure des artites engagés était déjà énorme sous l'époque reaganienne - en fait, tous les stickers Parents Explicit Lyrics, etc sont partis de là, comme je l'expliquais dans telle chronique, j Jane's Addiction me semble-t-il !

Et puis, merci de souligner le contraste entrela violence des DK et ce son de guitare très surf et noyé d'écho, sans a moinre once de distorsion !
Bien joué, Ju !

Ju said...

Pas de gatefold effectivement, c'était juste pour préciser que le Penis Landscape était un poster, et non un gatefold.

Qui plus est, j'avoue ne pas posséder l'édition originale (que tu dois certainement avoir cher Nicx) mais la réédition récente par Manifesto, déniché chez Gilbert à Paris pour 9 misérables euros.

A+
Ju

M.Ceccaldi said...

Super chronique
il faut absolument exhumer les perles de cette époque.
au passage ce serait chouette de proposer des classemements historiques, du genre les cinq meilleurs albums du punk rock américain des années 80. et les chroniquer
bises

Nickx said...

La réécoute de ce disque essentiel, ainsi que celle de son petit frère l'incroyablement mal produit mais gigantesque "Fresh Fruit for Rotting Vegetables" (avec le classique "Holiday in Cambodia") s'impose en 2014.

Un spectateur heureux d'avoir enfin vu la légende !