09 février 2008

Four Tet - Dialogue (1999)

Kieran Hebden n’a jamais éprouvé le besoin de quitter son île. Il s’est aménagé un petit carré de terre ferme sur lequel il peut cultiver et labourer à l’envi sa parcelle musicale. Pas isolé et reclus pour autant, il emprunte aussi bien au hip-hop, à la pop en passant par la musique contemporaine. Les réalisations au sein ou au-dehors de Four Tet illustrent son goût pour l’expérimentation, pour une pratique variée des matériaux musicaux.

Avec ses potes de lycée Adem Ilhan et Sam Jeffers. il forge ses outils avec Fridge, groupe de post-rock. Parallèlement, Il crée le projet Four Tet, dont il est le seul membre. En 1998, il enregistre, non sans un certain humour, un morceau de 36 minutes et 25 secondes, "Thirtysixtwentyfive" sur le label britannique indépendant de Trevor Jackson, Output Recordings. Musique électronique « extatique », il développe un style particulier dans lequel il sample des sonorités venant du hip-hop ou du jazz. Hebden sort au sein de différents labels une tripotée de remixes allant de Radiohead à Aphex Twin en passant par Madvillain et le précurseur du minimalisme, Steve Reich. En 2006, une collaboration avec le percussionniste jazz Steve Reid débouche sur deux albums, The Exchange Session vol. 1 et 2, aux sons grinçants et grouillants, totalement flippés. Dialogue, premier album en tant que Four Tet, dégage une ambiance ouatée, plus confortable.

Premier morceau de l’album, "The Space of Two Weeks" ouvre l’espace des possibles : dialogue avec un objet de contemplation invisible. Les cordes aménagent une introduction douce vers des compositions enlevées. Les cordes caressent les battements de la percussion. La morphologie du morceau suggère, laisse à peine deviner, mais l’objet finit toujours par s’échapper. Les pistes sont constamment brouillées. Du torturé "3.3 Degrees from the Pole" au soulagé "Misnomer", on hésite mais la curiosité reprend le dessus. La chose est polymorphe : elle se transforme encore sur "Liquefaction". "Calamine" souligne l’entrée dans un élément incertain, volatile, éthéré. Vingt milles lieues sous la mer, perdu dans l’espace. Seul dans le noir, on aperçoit une faible lumière, lointaine. Near-Death Experience and the Afterlife ? Va savoir. Pourtant il me semble bien l’avoir aperçu, cette lumière.

En bref : Assez progressif, le premier album de Four Tet chemine sur des sentiers molletonnés formés par des percussions hip-hop et des samples jazz.


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