05 mars 2014

Beck - Morning Phase (2014)

12 ans après le fabuleux Sea Change, Beck entend de nouveau secouer nos âmes par son flegme sans pareil, pour développer une folk aérienne, proposition enchanteresse pour se délivrer des maux terrestres les plus incrustés en ce bas monde.

Plus d'une décennie après Sea Change et deux derniers essais peu inspirés Guéro (2005) et Modern Guilt (2008), Beck délaisse ses expérimentations électroniques pour renouer avec le songwritting, à l'origine de morceaux à la beauté évanescente tels que "Morning Phase" ou encore "BlueMoon". Sur un autre versant, la catharsis du californien se chargera d'apporter une onde plus sombre à certains passages du disque comme sur "Wave". Cette dernière piste affirme l'ambivalence d'un musicien qui délivre ses meilleures compositions dans une verve nonchalante et mortiférée par les turpitudes de l'âme, comme un principe ontologique initié depuis "Looser".

C'est ainsi dans l'extension de cette émotion que Morning Phase résonne le plus clairement à l'oreille. Si le disque est dirigé par un jeu de corde minimal à la senteur country réaffirmée, on appréciera cà et là les quelques aspirations "violonesques" et les nappes de piano qui viennent contraster le climat relativement ensoleillé de cet opus.

Si l'onde sonore dégagée par ce Morning Phase se reflète aisément dans celle de son ainé, c'est en partie dû au fait que cet album est le prolongement de sessions d'enregistrement initiées sous la houlette de Nigel Godrich mais que Beck avait égaré. On ressentira aisément cette influence dans les intonations de piano de "Unforgiven" qui renvoie au titre "Codex" de Radiohead, et sur la montée disgressante de "Wave", qui elle évoque la période Amnesiac des anglais, datée du début des années 2000.

En définitif, Morning Phase réussit à créer une continuité temporelle avec son aïeux Sea Change, et c'est là sa plus grande qualité. Mais au-delà de ça, il ne parvient pas à en reproduire l'éclectisme ni même à faire voltiger une folk, qui si elle reste de bonne facture, a perdu de sa superbe et trompe rarement l'ennui. Le vertige n'est clairement plus au rendez-vous et les mouvements qui articulent les morceaux agacent par leur prévisibilité et lâchent du lest expérimental... pas pour le meilleur. Arrangements déjà vus, mesures quasiment dupliquées, on ne peut en toute sincérité ne pas comparer les deux œuvres tant la première résonne dans la seconde. Du champ de roses au champ de blé la senteur n'est évidemment plus la même, et pour ceux qui ne connaitraient pas l'oeuvre la plus aboutie de la tête blonde californienne, jetez-y une oreille en amont de ce disque, et découvrez-y la grâce de ses élans romantiques.

En Bref : si Morning Phase n'est pas un mauvais un disque en soi, il lui est difficile de retrouver les sommets atteints par Sea Change. N'en restent pas moins quelques morceaux lumineux, touchés par la sensibilité photovoltaïque de Beck.





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4 Comments:

Ju said...

Complètement d'accord avec toi, pas dégueulasse voir très sympa à l'écoute, mais n'apporte pas grand chose à sa discographie au final. Une bonne compilation de faces B quoi..

Nickx said...

OK également avec Bouddha et Ju !

Un son et un esprit quasi identique au monstrueux Sea Change, un des disques les plus sous estimés au moment de sa sortie, mais qui n'en restitue nullement la magie.

Moi qui adore pourtant ce versant folk baba de Beck, Morning Phase est sans doute le premier disque de sa plantureuse discographie que je ne vais pas acheter ; l'écoute de l'album ayant malheureusement conforté l'impression initiale des deux titres écoutés en ligne.

Même si ce nouvel essai est tellement meilleur que ses plus récents (quoique tu oublies le très éclectique et estimable The Information de 2006) et notamment l'atroce Modern Guilt, il n'empêche qu'on parle de Beck quoi, le mec qui a écrit Mellow Gold, Odelat et surtout Mutations et Sea Change !

Y'a quoi voir, le premier morceau est un calque (trop) ,parfait de "The Golden Age" pour qu'on s'y laisse prendre.

Attendons de voir ce que donnera le second disque annoncé pour cette année, et retournons écouter les récents singles.

Anonyme said...

La basse est beaucoup plus présente sur Sea Change...

Nickx said...

Je préfère aussi la production très "gainsbourgienne" et les chansons (ça va de soi) de Sea Change, mais force est de constater que le son des deux disques est quasi identique.

Normal vu la genèse ancienne de ce disque que rappelle Bouddha !

Et c'est du même coup ce qui renforce l' évaluation de ce disque hélas sans appel !