21 mars 2020

Music Emporium - s/t (1969)

L'unique album de Music Emporium - magnifique pochette découpée - n'est pas uniquement connu parce qu'il représente le Graal de l'incunable psyché. Et que de fait, l'un de ses 300 exemplaires originaux s'échange autour du millier d'euros. De toute façon, maintes fois réédité, l'objet musical en tant que tel n'est pas impossible à écouter et demeure malgré ce, plus localisable que tous les private press britanniques édités à 99 exemplaires pour échapper aux taxes alors en vigueur.

Voilà le type même de disque tel qu'il s'en est produisait des quantités industrielles à la divine époque du garage band US, dans un enrobage finalement pas si psyché que ça. Deux gars dont un membre, Casey Cosby, de l'UCLA (l'University of California Los Angeles) qui selon la formule éprouvée compose quasi tout, aux guitares et à l'orgue, deux filles à la section rythmique avec la bassiste qui chante aussi. Et ce son aigrelet de Farfisa omniprésent qui concourt au son liturgique de l'album et qui en fatiguera certains - les allergiques au son garage.

Alors on se fiche pas mal des niaiseries hippies communautaires que peuvent bien célébrer "Nam myo ho renge kyo" qui ouvre l'album. On se doute bien qu'ici ou là ("Prelude" ?), le son a pu être accéléré ce qui rajoute encore à l'effet pilonnant de l'orgue. On s'en fout :  Music Emporium n'est peut-être pas, n'est même sûrement pas l'album le mieux écrit ni même le plus original d'une époque et d'un genre à la créativité et à la productivité sensationnelle.

Il n'empêche qu'il y a cet effet Madeleine de Proust ; il faut appréhender ce disque comme une time capsule de l'épopée psychédélique des sixties finissantes. Un genre éminemment recherché et collectionné pour lequel n'existe aucune réelle logique quand à la cherté, la rareté. Cependant le groupe dispose de certains atouts.

Certains titres sont en effet formidables et mettent les sens en éveil : le titre d'ouverture, "Catatonic variations" qui fout les jetons, le très incantatoire "Cage" qui fier de ses 5 longues minutes (l'album atteint tout juste la demi-heure, ce qui était le canon du genre), la superbe "Gentle  Thursday", susurré par Carolyn Lee. Une sorte de douceur baba onirique que n'aurait pas renié Love ou Jefferson Airplane à leur plus alangui. Music Emporium n'est pas un simple avatar, qu'on se le dise.

Et ce qui est toujours touchant et typique de l'époque reine : certains membres peuvent à l'occasion intervenir sporadiquement sur les chats des réseaux sociaux et avancer à l'occasion leur explication de l'époque.

En bref : la destinée d'un disque culte. Qui encapsule un âge d'or, celui du garage band psyché US. Tout ce qui est rare peut être cher... et recommandable.

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