05 septembre 2016

Ukandanz - Awo (2016)


La musique éthiopienne est un virus redoutable, surtout dans ses hybridations rockn'roll, qui savent toucher les petits blancs que nous sommes (The Ex avait déjà réussi à débaucher le grand Getatchew Mekuria,voir dans ces colonnes, "king of the ethiopian saxophone"). Car  Ukandanz n'est pas un groupe natif d'Addis Abeba : c'est à la base des gars qui font du noise/math rock, de la musique un peu barrée et inventive, qui exige d'un guitariste qu'il connaisse un peu plus que sa pentatonique mineure et ses plans blues piqués à Keith Richards ou Clapton.

Le batteur, Guilhem Meier, est un tueur en son genre, qui officie au sein de Poil, projet suffisamment atypique pour être invité au RIO, Rock In Opposition, festival de trés haute volée fondé par Fred Frith et parrainné par Robert Wyatt. Avec ça une guitare électrique, une basse, un sax ténor aux intonations brûlantes, et un vrai de vrai chanteur éthiopien, Asnaqué Guebreyes, star en son pays (et oui, nous on a Johnny...), et qui nous rappelle que la vitalité libre et rebelle dégagée par le punk ou le hardcore caractérise depuis toujours les musiques traditionnelles. Ce groupe c'est vraiment le pied : c'est comme si un amateur de punk DIY, de noise rock virtuose à la Ruins ou Nomeansno, de hardcore haut de gamme à la Naked City, et passionné par ailleurs de musiques trad, de chants de gorge inuit ou malgache, de gammes non occidentales, de musiques pas bien tempérées, créait un super groupe de rêve !


UKANDANZ [ethiopian crunch music, ethiopie, fr] - HYPERCULTE ...


Au menu de ce petit LP, des morceaux du répertoire éthiopien traditionnel, électrifié et dynamité, c'est-à-dire, arrangé par Damien Cluzel, le sax ténor. On retiendra surtout le démarrage tubesque et à fond les ballons "Tchuhetèn Betsèmu", avec ses crescendo de folie, ses explosions brutales, les intonations de voix bien écorchées. Et surtout le dernier morceau "Ambassel to Brussel" sa maîtrise des polyrythmes, sa mélodie de sax, le passage a capella tout en mélismes et microintervalles, où une note du mode est mise en valeur par de délicats ornements.

En Bref : plus heavy, punk et rockn'roll que le précédent, le deuxième album de Ukandanz bouleverse les frontières entre éthio-jazz et rock méchant/barré. Ethio-crunch!!! 




2 Comments:

Nickx said...

Bien, bien de s'ouvrir à ces musiques africaines encore trop en friche pour les pauvres petits blancs becs que nous sommes.
Par contre, et tu le sais, je n'admets pas le commentaire dépréciatif sur Johnny !

M.Ceccaldi said...

sans entrer dans le débat sur johnny, je voulais dire que les stars de la variété extraoccidentale me semblent mille fois plus estimables que nos stars à nous ; il suffit de jeter une oreille sur la variété turque, c'est kitsch à mourir, ça reste de la variété, mais les processus d'acculturation sont bien moins avancés que chez nous, et le niveau musical d'ensemble est bien supérieur. un chanteur de variétoche en éthiopie ou en turquie c'est mille fois plus beau que céline dion et lara fabian. par exemple impérial tiger orchestra (from annecy ! ) s'est produit avec une star de la variété éthiopienne, qui s'est acclimatée sans problème à leur jazz/rock exigeant , alors que je ne vois pas johnny chanter avec un orchestre de john Zorn, ou avec Zappa... zut j'avais dit pas de débat sur Johnny!!!!
bises