29 juin 2025

TINALS - An 8 - Paloma (Nîmes) - 28/06/25

 

INFECTIOUS GROOVE

Moins d'occasions de s'enthousiasmer en ce deuxième et dernier jour de TINALS 2025.  Une fois encore, les meilleures choses se passeront en intérieur. Car une fois passé sous une chaleur accablante le set un peu pute de Almost Monday - le monde a-t-il vraiment besoin de nouveaux Arctic Monkeys dans leur virage rock de stade - retour en intérieur pour goûter à la soul jazzy gentiment ourlée de MRCY (photo ci-dessus), émanation d'un binôme chanteur et producteur. 
Un colosse du nom de Kojo Degraff-Johnson aux faux airs de Cee Lo Green distille une soul très roborative et finement exécuté par un aréopage d'excellents musiciens. Les nouveaux Gnarls Barkley ?


"C'EST SYMPA D'ETRE VELUS"

Gros barouf autour de l'une des dernières sensations noise de la scène britannique. Le public se précipite donc en masse pour voir DITZ, quintette de Brighton. Si les deux premiers titres entretiennent l'illusion, on s'ennuie assez vite car côté chansons, cela tourne en rond. Et on pose la question qui fâche : si le chanteur ne s'habillait pas en femme et n'avait pas l'idée joyeuse d'escalader la rampe de projecteurs, le groupe déchaînerait-il autant les passions ? Rien n'est moins sûr.

Le quatuor teuton Kadavar a fait sienne la devise de Manowar qui est que "même les sourds les entendent". Dès les premiers coups de grosse caisse de Tiger Bartelt, une déflagration nous percute le plexus. Ce dernier vêtu d'un seyant tee shirt filet sur poils envoie la purée tout comme ses acolytes bassiste (croisement improbable d'un Danyel Gérard longiligne et d'un Demis Roussos efflanqué) et le duo de bretteurs dont la présence ne déparerait pas au Hellfest. Il s'agit là d'un métal assez gras, serti de riffs bien juteux ; les voix sont limite pop et friendly, bien loin d'un doom stoner méchant que pourraient susciter leur dégaine. C'est convenu mais à vrai dire....assez jouissif.



SAVAGE OR WHEN THE WILD GOES MILD

A. Savage est la grande claque et l'une des rares satisfactions intégrales de ce TINALS. Déjà présent la veille pour un set acoustique, il se retrouve à nouveau dans un patio bondé et poisseux de sudation pour un medley de ses oeuvres solo. Si l'on soupçonnait l'un des hommes forts de Parquet Courts (ci-devant l'une des plus belles choses qui soient arrivées au rock indé ces 15 dernières années) d'être un mélodiste et un parolier de talent, on s'en veut un peu d'avoir passé sous silence son virage folk.
Armé d'une seule guitare, Andrew tient en haleine un patio hélas dissipé (effet de cuvette sonique oblige) et se révèle captivant de bout en bout au travers de morceaux qui sonnent déjà comme des classiques ("Hurtin' or healed", "Elvis in the army", "Thawing dawn"....)
Et de regretter qu'un si beau répertoire n'ait pas eu l'heur d'une Grande Salle sans doute plus adaptée pour son light-show intimiste qui eût forcé le festivalier à plus d'attention.
On reparlera d'A Savage et des Parquet Courts.
That's all folks.


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TINALS - An 8 - Paloma (Nîmes) - 27/06/25


THE SIX YEARS ITCH

Revenu d'un hiatus et d'une réflexion de près de 7 ans, le TINALS festival incontournable de la cité gardoise renaît de ses cendres. Affublé curieusement de l'extension "Beau weekend", le TINALS  a réduit la voilure, ne propose plus que deux jours de programmations, lesquels ne comportent plus de noms ronflants.
Qu'à cela ne tienne, une part belle a été accordée à l'éclectisme.
Très tôt, des jumeaux suédois Deki Alem (photo ci-dessus) de Göteborg affiliés à la maison Talent Boutique se proposent d'ambiancer la Grande Salle qui sera le théâtre de jolis moments. Et ils y parviennent par leur flow souple, arpentant la scène et secondés par un batteur très carré. Mélodique et aguicheur, leur rap enlevé est le premier coup de coeur de ce festival.

La soirée s'annonce bien. Qu'est-ce qui fait donc que les sets successifs en extérieur de BDRMM, Ghostwoman et des très attendus irlandais de Murder Capital nous laissent ainsi de marbre ? Un seul mot, les chansons. Ou plus exactement l'absence de chansons marquantes qui empêchent par exemple Murder Capital d'être les nouveaux Fontaines D.C. Enfin, on parle des Fontaines D.C punks énervés qui avaient enchanté la dernière édition du Festival. Pas de la baudruche de stade qu'est devenu ce groupe.

Rien à voir nonobstant avec le (nouveau) naufrage intégral de la tête d'affiche du jour DEATH IN VEGAS trahie par une scénographie forcément molle, un nouveau répertoire peu convaincant et surtout une ingénierie déficiente qui contraint le groupe ou plutôt ce qu'il en reste, à abandonner la scène pendant une bonne dizaine de minutes tandis que l'assistance déjà se clairsème.
Cette musique n'est définitivement pas l'apanage du live.


ROCK EN -SEN

On n'avait jamais entendu parler de Heave Blood & Die (photo ci-dessus). Ce très jeune groupe - la bassiste bondissante  toute menue a l'air d'avoir 14 ans - dispose de déjà quatre albums au compteur. Et dans une grande salle qui s'est quelque peu vidée, son rock inquiet aux ambiances assez paranoïaques ("Stress city", "Things that hurt", "Heatwave 3000") fait son petit effet. Avec son Korg obsédant et le chant enfiévré de Karl Loftingsmo Pedersen, ces norvégiens habités tiennent leurs promesses. 



PA BAYOU PA BAYOU PA BAYOU PA BAYOU LE LE

Mais la grande claque de ce premier soir fut incontestablement la prestation de l'admirable septuagénaire protégé de Dan Auerbach (Black Keys), Robert Finley (photo ci-dessus).
L'histoire de ce vétéran ancien technicien dans l'armée et auteur de son premier album à la soixantaine bien pesée, fait écho à celles des incroyables Lee Fields, Charles Bradley ou Naomi Shelton également célébrés en ces lieux.
Flanqué d'un jeune groupe et d'une Aretha grandeur nature à la voix de dingue au tambourin ; et dont on  apprend assez vite qu'elle est la fille aînée du maître de cérémonie, Robert Finley qui à défaut d'avoir une carrière longue comme le bras a dès son plus jeune âge chanté et joué de la musique dans sa Louisiane natale et par-delà, subjugue l'assistance. Nourri au blues et au gospel comme tant de musiciens noirs qui ont compté, le vieil homme fait valoir un tremolo de baryton qui n'est pas sans évoquer la profondeur de celui d'Isaac Hayes (!) quand dans les aiguës et avec plus de force, son timbre incroyable réveille le fantôme d'un Al Green pas moins.
Le show d'une grande musicalité venge tous les chants atones et les à-peu-près entendus précédemment.
Et on en ressort en se disant qu'on devrait interdire le falsetto aux blancs-becs qui n'en ont pas les capacités vocales. Ici l'authenticité prévaut. Merci Monsieur Finley et indirectement, merci Monsieur Auerbach !

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13 juin 2025

The Beach Boys - Sunflower (1970)

Avant que l'affaire ne tourne au sale avec les inévitables fâcheries fratricides, une inspiration en berne et l'irruption dans la saga Wilson du redoutable Dr Landy, voici l'un des derniers grands actes de bravoure des Beach Boys. Après cela il restera le sommet Surf's Up (71), Holland (73) et ce sera à peu près tout. Tous les membres du groupe sont photographiés dans un bel et rare unisson ; ce qui est rare. Al Jardine manquait à l'appel sur les premiers albums surf et était remplacé par David Marks. Entre temps revenu de ses années d'étude, le même Jardine manquait à nouveau la photo d'illustration sur le voilier pour Summer Days (and Summer Nights!!) de 1965 pour cause de dysenterie.
Brian absent des tournées du groupe dès 1965, n'étant pas davantage préoccupé par les visuels, se révélait absent de ceux de 20/20 en 69, l'une des nombreuses réussites des apprentis surfers postérieures au trauma Smile.

Et cette atmosphère idyllique et d'harmonie familiale retrouvée est présente dès le recto : les 6 membres d'alors dans un mood hippie de circonstance se font tirer le portrait avec les enfants de chacun. Tout le monde participe à l'écriture. Brian Wilson même en retrait depuis quelques années, parvient toujours à caser son brelan de merveilles. Ici celles-ci s'appellent "This whole world"; mini symphonie de poche d'à peine 2 minutes avec carillons, rupture harmonique étonnante et magnifiée par Carl devenu depuis "God only knows" puis l'album Wild Honey (67) l'emblématique chanteur lead. Puis c'est "All I wanna do" composée à l'ancienne avec Mike Love, ballade douce-amère où le timbre flûté et métallique du cousin fait à nouveau le métier. Puis "Cool, cool water" en ces années de conversion baba écolo clôt le 16ème opus de façon légère
Dennis qui non content de battre, chante et compose divinement depuis peu, signe et interprète l'inhabituellement enjoué "Slip on through" introductif. Mais tout le monde se souviendra de la déchirante "Forever" annonciatrice des  "4th of July" et "(Wouldn't it be nice (to live again)" à venir et de son Pacific Ocean Blues (77). Impossible de passer sous silence non plus "It's about time" également amenée par le plus SWAG des frères Wilson. Et que tous ceux qui sont toujours restés dubitatifs devant la puissance de rockeurs des Garçons de la Plage écoutent prioritairement ce titre dont il existe plusieurs versions live incendiaires sur Youtube. Et une nouvelle fois la puissance vocale de Carl emmène le titre très haut.
Album préféré de Bruce Johnston et il y a probablement lien de cause à effet; ce dernier se voit confier 2 titres. "Deirdre" est une ballade délicate co-chantée avec Brian et préfigure la tendre "Disney girls (1957)" d"un an plus tard. "Tears in the morning" inaugure les-chansons-des-Beach-Boys-qui-ne-sonnent-pas-comme-des-chansons-des-Beach-Boys telles qu'on on en retrouvera notamment dans Holland.  Mélancolique, douce-amère et soulignée d'accordéon, c'est peu dire que ce titre détonne. Il est arrangé par notre Michel Colombier national, tout comme le rageur "Got to know the woman" de Dennis et "Our sweet love" titre mineur d'Alan Jardine.

Album disparate et beaucoup plus hétéroclite que ne le sera son grand frère Surf's Up, un petit peu foutraque aussi, Sunflower est néanmoins un album terriblement attachant et qui encapsule très bien la diversité et le talent hors du commun en ce qui concerne le songwriting de ce groupe à nul autre pareil qu'était harmoniquement et vocalement les Beach Boys.
Et révèle définitivement un groupe sachant rocker; bien loin des sages chemises à rayures des années surf.

En bref : album sonnant comme une véritable compilation mais n'en étant pas une. Tout le talent d'écriture des Beach Boys et de ses divers membres se révèle ici avant de réapparaître de manière encore plus éclatante avec Surf's Up l'année suivante. Hippie Hippie hourrah.

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07 juin 2025

The Jesus Lizard - Epicerie Moderne (Feyzin) - 04/06/25

(de gauche à droite ; David Wm. Sims, Mac Mac Neilly, David Yow et Duane Denison)
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Dans la foulée de l'excellent Rack leur album de reformation célébré en 2024, les mythiques Chicagoans de The Jesus Lizard s'offrent une belle tournée européenne. La France n'est pas ignorée : c'est ainsi qu'après une date à l'Elysée Montmartre, c'est au tour de la Capitale des Gaules et plus exactement sa banlieue d'être visitée.
Et l'on constate très vite que bien que sexagénaires bon teint; ces dépositaires hard core aux sonorités jazz uniques n'ont rien perdu de leur superbe. Puisque dès le 3ème titre ("Mouth breather"), les premiers rangs sont déjà imbibés de bière et que l'ineffable et très alcoolisé David Yow fait le show. Bien qu'abîmé comparé à ses trois comparses qui portent beau,  et assagi (il ne pisse plus sur le public), Yow a très vite un nombre déraisonnable de slams à son actif. Vociférant et à grand renfort de glaviots, il ouvre le set avec "Puss" un vieux classique qui a fait la gloire du groupe lors d'un split single avec Nirvana.
Les "Fuck Trump" abondent forcément, le son est nickel ; en particulier les riffs incendiaires que cisaille Duane Denison qui demeure l'un des plus brillants bretteurs de la scène punk US, le JJ Burnel de la six-cordes pour le port même si moins exubérant. Avec 7 titres, Rack est forcément à l'honneur avec une mention spéciale pour "Grind" et "Alexis feels sick". Tous les albums sont passés en revue à l'exception notable et justifiée de Blue (1998); sans doute l'album le moins réussi du quartette. Et surtout le seul orphelin de Mac Mc Neilly, le très racé batteur parti à l'époque sous d'autres cieux. Avec David Wm. Sims il forme une section rythmique démoniaque.
Les trois musiciens ne laissent que peu de répit à David Yow pour s'adonner à ses frasques car tel un Panzer, la machinerie des ex-acolytes de Steve Albini ne faiblit pas et enchaîne. L'incroyable limpidité du jeu de Denison fait d'harmoniques, d'écarts de phalanges et de glissandos au bottleneck particulièrement sur 'Blue shot", "Thumper" et "Thumbscrews" de ce qui demeure leur sommet - l'album Shot de 96 - fait merveille.
Et de ressortir rincé d'un show de 23 titres long de deux heures et ponctué de deux rappels placés sous ls signe du stupre et de la sueur. A aucun moment on ne leur en voudra de ne pas avoir joué "Dancing naked ladies".
Quel groupe.


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