18 septembre 2018

Ultimate Spinach - Behold & See (1968)

Toujours se méfier des groupes de la fertile scène psychédélique américaine drivés par un leader unique. Qu'il s'agisse d'un démiurge interne ou extérieur au collectif, c'est généralement là que l'on trouve les meilleures pioches. Ceux qui commettront plus que le single Nuggets de rigueur, et transformeront l'essai long format. Parfois même comme pour la bande qui nous occupe, il y aura plusieurs Lps.


Et pour peu que l'esprit communautaire d'alors prévale, et que l'on ait affaire à un groupe mixte avec une chanteuse aux affaires (même partielles), les sommets sont atteints.
Peu de risque donc d'écouter un disque composé à 70% de reprises ; ici tout sera écrit de A à Z. Voila pour le pedigree. Bien sûr, même sous ce line-up, l'époque fantasmée fourmille de groupes barbants, de logorrhées hippies pénibles - le syndrome de la vocaliste bêlante. OK, il est souvent question de SF, de magie noire, de légendes, d'elfes, d'horoscopes ou autres âneries. Et en général, le patronyme est à l'avenant ; en l'occurrence Ultimate Spinach, ça se pose un peu là.

Mais ces Bostoniens sont emmenés par un multi-instrumentiste Ian Bruce-Douglas qui compose tout, une chanteuse ayant du coffre et qui évoque jusqu'à Janis Joplin. D'ailleurs Ultimate Spinach partagera une tournée avec Big Brother and The Holding Company.
Sur "Gilded lamp of the cosmos" et "Where you're at", cette influence est bien présente et évoque aussi l'hédonisme californien. L'esprit jam, on le retrouve sur la majeure partie de la première face par des morceaux longs dans lesquels on se perd. Le morceau de bravoure s'intitule "Mind flowers" et déclamé par Bruce-Douglas, il demeure l'un des grands classiques underground psyché de la période, de ceux que l'on compile amoureusement dans les anthologies. D'abord doucereux puis déchaîné, il s'agit d'une tournerie irrésistible à grand renfort d'échos et bandes filtrées.

Ce qui fait que le groupe bascule, c'est la finesse plus seulement jazzy et instrumentale dont il a fait preuve jusque là, qui s'affirme aussi dans l'esprit choral de la bande. Une longue suite divisée en quatre parties lumineuses et liturgiques se déroule ("Suite : genesis of beauty") ; le morceau est d'une grande inventivité et justifie à lui seul la possession de ce disque. Les deux morceaux suivants reproduisent toute proportions gardées le même schéma instrumental (notamment "Fifth horseman of the apocalypse").
Pas d'esbroufe ici comme on en voit plus souvent qu'il ne faut chez les exécutants virtuoses. Il y a chez Ultimate Spinach la légèreté bucolique des Mamas And The Papas, l'esprit d'avant-garde de Jefferson Airplane. Et le groupe qui a connu un succès d'estime lors des premiers singles et dont l'un des trois albums fait partie du Top 50 psyché, aura peu à peu gagné en renommée chez les initiés comme ses contemporains voisins de Beacon Street Union. Il  s'est vu réédité et complété. Ce qui n'est rien moins que de très normal.

En bref : de ce puits sans fond qu'est la nébuleuse psyché des années soixante, l'un des plus flamboyants et doués représentants US. Behold and listen !





https://www.youtube.com/watch?v=l3VsIQnyuJU

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