31 janvier 2009

Yuksek - Away from the sea (2009)

J'ai eu beau traîner mes guêtres à un concert des gamins débraillés de Late of the pier ou encore m'enthousiasmer pour les productions du jeune Ecossais Calvin Harris ou du Lyonnais Danger, je vous l'affirme sans hésitation : je ne suis pas un fluo kid. Il n'y a qu'à me détailler rapidement pour s'en rendre compte. Pas assez trendy, trop casanier, un tantinet old-school pour cette mode teenage débridée.


Néanmoins, je ne pourrai nier mon penchant pour les sons électroniques abrasifs et dopés à la basse saturée tels que nous en abreuvent régulièrement les labels Ed Banger, Kitsuné, Institubes et autres Ekler'o'shock. A croire qu'un jeune clubber surexcité sommeille finalement toujours en moi, ne demandant qu'à être rudoyé par un bon beat house breaké et une volée de synthétiseurs. Aussi, je ne pouvais résister à la tentation d'écouter le premier album de Pierre-Alexandre Busson, alias Yuksek, annoncé depuis quelques mois comme le nouveau messie de la musique électronique française.


Yuksek, qui soit dit en passant signifie « hauteur » en turc, a fait ses armes dans la musique pop après avoir étudié le piano classique au conservatoire de Reims. Biberonné aux Beatles et à Gainsbarre, mais également aux premiers rap west coast de NWA ou De La Soul, il s'illustre au sein de formations pilliers de la scène rémoise : The Bewitched Hands, Alb puis Brodinski and The Shoes. Peu à peu, il s'oriente vers l'électro, emballé comme beaucoup par cet espace de liberté à défricher. Signé par le label de Birdy Nam Nam, il remixe Mika, Kaiser Chiefs, Ghosface Killah ou Tahiti 80, se laissant ainsi aller à son goût prononcé pour la pop. C'est véritablement en live, à grands coups de synthé vintage, qu'il acquiert une jolie notoriété et parfait sa mue vers une house discorock se rapprochant des canons de notre époque.


Comme le laissait présager les trois titres du maxi “Tonight”, sorti en septembre dernier, Yuksek fait avec Away from the sea oeuvre de patchwork, piochant tour à tour dans des registres musicaux divers et variés. Groove disco, riffs postpunk, beats house, guitares rock ou encore scansion rap incisive (Amanda Blank de Spank Rock sur le titre “Extraball”). La dominante demeure électronique et l'ensemble, malgré quelques impairs (il s'agit là d'un premier disque), dévoile une bonne dosette d'hymnes galvanisants à faire danser jusqu'à plus soif. Pas de doute, conformément à la rumeur, Yuksek est taillé pour le club.


“Break ya” nous reçoit comme il se doit avec une rafale nourrie de breaks aux atours acides claquée à même nos jolies joues pourprées. D'emblée, l'atmosphère s'annonce transie et transpirante. “Tonight” déroule ensuite ses vocaux siglés “French touch” et ses montées vertigineuses de claviers. L'entrée en matière est honorable sans pour autant déborder d'originalité. L'enchaînement qui suit, avec la balade pop rebondissante “A certain life”, le nasty rap “Extraball” et le déferlement de synthétiseurs métalliques de “Take a ride”, s'avère par contre totalement irrésistible. Yuksek nous pond trois modèles d'électro-house vintage, successivement teintés de funk, de hip hop et de techno. Le Rémois capte évidemment un certain air du temps, nous rappelant à maintes occasions les nombreux rejetons des Daft Punk, mais la composition est bien branlée et les mélodies imparables.


Sur la durée, le disque s'avère cependant quelque peu difficile à encaisser. Bien que largement alimenté en infuences, il s'avère au final trop stéréotypé dans sa structure et par moment redondant. En fin de compte, c'est une série de maxis que propose Yuksek, plus qu'un véritable objet album. Si le garçon ne marquera pas l'histoire de la musique électronique avec ce premier opus, à n'en pas douter, il pourra retourner n'importe quel club de France et de Navarre avec ses hits house disco-rock frénétiques. Ce n'est déjà pas donné à tout le monde.


En bref : Une succession de maxis électro-house trépidants sous influence pop, plus qu'un véritable album. En dépit de quelques ratés et de l'expérience difficile de la durée, l'exercice vaut le détour, ne serait-ce que pour son sens inné du dancefloor et de la mélodie. Ainsi que pour les quelques coups de bambou électronique qu'il nous assène.




Le myspace de Yuksek


A certain life.mp3

Extraball.mp3


“Tonight” :


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30 janvier 2009

April March & Bertrand Burgalat - Tournée d’adieux à Bordeaux le 29/01/09


On ne reconnaîtra jamais assez le talent de programmation d’Allez les filles. Une semaine à peine après Sporto Kantès, c’est le génial et définitivement inclassable Mr Bertrand Burgalat qui est invité à l’Espace Tatry pour sa tournée d’adieux à la scène. Personnalité des plus iconoclastes, impossible à cerner, le Phil Spector français comme on l’appelle, affiche l’un des CV les plus complets qui soit. Né en 1963, il devient par la suite musicien, compositeur, producteur et interprète. Il fut entre autres responsable des arrangements pour Jad Wio, Nick Cave, Supergrass, Katerine, mais aussi, et c’est là que ça se corse (oui Bertrand est originaire de Bastia) de Michel Houellebecq, Christophe Willem, Alizée ou encore Valérie Lemercier. Et la liste est longue. Et pour compliquer l’affaire, je peux rajouter qu’à 25 ans il produisait déjà Laibach, qu’en 1992 il écrivait la BO des Nuits fauves de Collard, qu’en 1995 il montait son label, Tricatel, le tout en s’occupant de Remixes de Air, Depeche Mode ou encore Jamiroquaï, et enfin en sortant trois Lp’s magistraux sous son nom : The Sssound of Mmmusic, Portrait robot et Chéri B.B. Et j’en oublie, des vertes et des pas mûres…

Autant dire que ce personnage méritait d’être rencontré, surtout pour une dernière. Entouré pour l’occasion d’un backing band de luxe (des membres de Hyperclean, Tahiti 80, Aquaserge) et d’April March sa nouvelle égérie, il déclinera durant toute la soirée un humour et une culture pop teintés de psyché (Korg quand tu nous tiens), au profit d’un certain passéisme pour les années 60, la musique variété et l’easy-listening. Polyvalent et cultivé, on sent par ses nappes de cordes habillées d’électronique son ouverture au Japon et à l’Allemagne. Une légèreté un brin élitiste qui ne jurerait pas sur la compilation Shake sauvage dont Nickx nous a vantés les mérites. Toujours adepte du bon mot, ses chansons sont magnifiques. "Ma rencontre" par exemple avec son faux air de bossa et son texte si naïf : "Si je me rencontrais au coin de la rue, je me dirais bonjour Bertrand" ou encore "Je suis seul dans ma chanson" et "Noël sur ordonnance". En anglais ça donne "Spring isn’t fair" et c’est encore plus beau. Quant à April March, la plus française des américaines (de son vrai nom Elinore Blake), elle atterrit à mi-concert pour pousser la chansonnette yéyé, dont "Chick Habit", reprise anglo-saxonne du "Laisse tomber les filles" de Gainsbourg et de France Gall, laissant ainsi à Bertrand le soin de s’occuper pleinement du clavier. Mr Burgalat je vous dis adieu, je viens à peine de vous rencontrer et vous allez déjà me manquer.

A lire aussi : Françoise Hardy - (1972)

Les Myspace ou sites de Bertrand Burgalat, April March, Allez les filles et Espace Tatry

"Spring isn’t fair" :

En duo avec Robert Wyatt, "This summer night" :

"Chick habit" par April March :

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29 janvier 2009

Late Of The Pier - Concert à Bordeaux le 27/01/09

Devenu spécialiste de la chronique casse-gueule, et après un Franz Ferdinand controversé, ne manquait que le live d’un groupe bouc émissaire d’une année passée. Poussé par la curiosité, ou par un simple élan masochiste, j’arrive à enrôler l’ami Fabien dans l’affaire et enfile mon nouveau sweat fluo acheté pour l’occasion, il ne faudrait pas que l’on nous reconnaisse. Et ce qu’il va se passer ensuite, il faut le voir pour le croire, c’est que malgré tous nos à priori tirés de l’écoute fastidieuse de Fantasy black channel, LOTP n’est pas pire !

On s’en serait douté, le quatuor est très très jeune. Et la première surprise vient de leur propension au multi-instrumentalisme. Samuel Eastgate notamment, le leader, qui semble s’amuser à venir taquiner ses collègues, un coup aux synthés, un coup aux séquenceurs, un coup aux percus, le tout avec une guitare constamment dans les mains. Quant à sa voix, elle ne tient vraiment la route que dans les moments les plus énervés. Peut-être un problème d’amplification mais j’en doute.

Et on en arrive à la vision d’ensemble : à mille, allez, disons à cent lieues de l’image que je m’en faisais. Très loin d’un schéma classique couplet / refrain / couplet, les titres de LOTP ne sont pas si simples que ça. Et "The bears are coming" recèle bien des tiroirs. Quant à "Random girl" ou "Heartbeat", le live fait ressortir les synthés d’une manière presque lo-fi, en tous cas bien moins saturé que sur disque.

Quoi qu'il en soit l’énergie déployée dans une salle pas franchement fofolle est remarquable. Et même si après réflexion, je leur préfèrerai toujours un bon Of Montréal, un acceptable Klaxons ou même un moyen Friendly Fires, LOTP (du moins en tant que groupe) ne méritait certainement pas notre acharnement aveugle. J’en veux pour preuve la confession de l’ami Fabien : "Des fois c’est chiant de se rendre compte que l’on a eu tort". Il n’en reste pas moins que 15€ les 45min, c’est un peu chéros.

Le site de LOTP et celui de la Rockschool Barbey

A lire aussi : Late Of The Pier - Fantasy black chanel (2008)

"Focker" :

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28 janvier 2009

Black Moth Super Rainbow - Don’t you want to be in a Cult ? w/ Feel the Drip (2009)

Pourquoi un post de cette longueur pour un disque dont la durée n’excède pas dix minutes ? Parce que la sortie de ce mini-EP à l’artwork complètement barré est l’occasion d’évoquer un groupe vraiment spécial dont on parle assez peu en France. J’ai découvert Black Moth Super Rainbow par le biais du très bon trio "folktronica" The Octopus Project, avec qui ils ont enregistré The House of Apples and Eyeballs en 2007. Peu de temps après cette découverte, j’ai succombé aux charmes opiacés de leur troisième album, Dandelion Gum, puis de toutes leurs autres prods.

BMSR est une troupe de doux dingues venus de Pittsburgh et fascinés par le Flower Power, les acides, et les synthétiseurs. Quelque part entre Gong, Boards Of Canada et Air, en quelque sorte. Ses cinq membres sont affublés de noms de scène ubuesques que je ne peux me priver de citer : Tobacco, Power Pill Fist, Father Hummingbird, The Seven Fields of Aphelion (!) et Iffernaut. Usant et abusant du Rhodes, du Novatron et du Moog, ils élaborent un mélange très ludique de prog-rock, de psychédélisme analogique et d’expérimentations aux consonances cinématographiques. Au départ très underground, le groupe a gagné en notoriété en assurant la première partie des Flaming Lips lors de leur tournée de 2007.

Tous les instruments des disques de BMSR sont enregistrés live, puis assemblés en studio avec l’aide d’un laptop et d’un sampler. Malgré la simplicité de leurs chansons, souvent agrémentées de voix vocodées, ils produisent selon moi un son très intense et assez unique dans la masse des combos psychédéliques d’aujourd’hui. Preuve en est encore faite sur ces deux pistes destinées à calmer les fans en attente d’un album intitulé Eating Us, annoncé pour mai/juin. “Don’t You Want To Be In A Cult” est à mi-chemin de la comptine pour enfants et de la B.O. de film de genre, avec des vagues très lo-fi de synthé et de simili-cordes pour toile de fond. Plus longue à se mettre en place, “Feel The Drip” donne davantage dans le rock planant, toujours habité par des distortions multicolores, cartoonesques, et une mélodie qui paraît naïve mais prend finalement aux tripes. Vivement l’album !

En bref : Deux très belles petites pièces de psychédélisme analogique, en attendant un album qu’on imagine grandiose et qui devrait sortir avant l’été.



BMSR - Feel The Drip.mp3

BMSR - Lost Picking Flowers In The Woods.mp3
(extrait de l’EP du même nom, 2005)

BMSR - Forever Heavy.mp3 (extrait de l’album Dandelion Gum, 2007)

Le clip de "Sun Lips":


Celui de "Count Backwards To Black":


"Lost Picking Flowers In The Woods" en live:


Le Myspace et le site de Black Moth Super Rainbow méritent vraiment d’être visités, puisqu’ils y proposent régulièrement des titres inédits en écoute ou en téléchargement gratuit.

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27 janvier 2009

Sporto Kantès - Concert à Bordeaux le 22/01/09


Il fallait en vouloir pour se déplacer au BT 59 ce soir-là. Bravant à vélo la tempête de pluie et de vent qui me sépare du lieu, je prie pour que ce concert soit à la hauteur du buzz savamment orchestré l’année dernière, notamment par Radio Nova comme l’avait déjà précisé Fabien dans sa chronique emballée mais circonspecte de 3 At Last, troisième album du duo, on s’en serait douté. Les quelques écoutes de rattrapage l’après-midi même ne m’avaient pas tout-à-fait conquis, ce joyeux bordel trouvant à me yeux ses limites dans son manque de limites, justement.

Toujours est-il que je débarque trempé dans une salle quasi comble -le public bordelais semble se déplacer en masse en ce début d’année- avec un auditoire vraiment très jeune, certains sont même venus avec leur maman, paye ta honte ! Plus sérieusement, lorsque le duo débarque sur scène, j’ai la bonne surprise de constater que des musiciens sont là (au nombre de trois), et que Nicolas Kantorovwicz et Benjamin Sportes ont des guitares dans les mains. Parce qu’à l’écoute de 3 A Last j’avais peur de me retrouver devant deux gonzes cachés derrière leurs labtops.

Une chose est sûre, le concert grossit vraiment les traits du groupe. L’éclectisme qu’on lui connait est exacerbé, et il est encore bien impossible aujourd’hui de définir un "son" Sporto Kantès, un style propre identifiable à cent lieues. Je parlais tout à l’heure d’absence de limites et c’est bel et bien le cas. Reggae, rockabilly, hip-hop, trash, le tout soutenu par une section rythmique orientée électro (du peuple) et le désormais indispensable synthé. On ne sait pas sur quel pied danser, mais on danse quand même, parce que oui, ce patchwork est sacrément festif.

Le deuxième trait grossi par la scène, qui m’avait échappé sur disque, c’est cet humour parfois potache déployé par le duo (qui a dit que Nico venait des Wampas ?). Pas une blague qui ne leur échappe, et un comportement labélisé 100% rock n’ roll : cigare au bec, torse poil, distribution de whiskey à la foule, tout y passe. Et ce n’est qu’une fois cette révélation acceptée, Sporto Kantès n’est pas un duo électro pop indé comme on a essayé de nous le faire passer, mais bel et bien un combo franchouillard (le biniou de "Tower") prêt à en découdre avec les habitudes, que l’on peut se laisser aller.

Musicalement, les titres les plus funky comme "U are the light" remportent les honneurs, lorsque tous les musiciens se la donnent grave en direct. Les titres en français tels que "Liquid" ou "Sick song" ne sont pas trop mals. Et bien sûr, l’inévitable hit "Whistle" est de la partie, bien moins mastérisé que sur disque, mais en mode bootleg avec "A message to you Rudy" des Specials, plutôt original. Double rappel de coutume, et le duo finalement très populaire repart sous les applaudissements. Et je ne me fais aucun doute quant à son avenir, le public suivra.

Les Myspaces de Sporto Kantès, Allez les filles et BT 59

A lire aussi : Rubin Steiner - Concert à Bordeaux le 18/10/08
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Je vous mets "Lee" extrait du deuxième album parce que "Whistle" il commence à nous… :

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26 janvier 2009

Hjaltalín - Live au Café de la Danse, Paris, le 20/01/09

Nous avions été parmi les premiers à vous en parler (lire chronique du 29/04/08), l'excellent premier album des islandais de Hjaltalín sort enfin aujourd'hui en France. A cette occasion, le groupe donnait son tout premier concert à Paris en tête d'affiche, après un premier passage au Bataclan en première partie de Cold War Kids il y a deux mois. Le groupe ouvre avec le tendre "I Lie," histoire de rester dans l'ambiance : le public du Café de la Danse, assis, vient d'assister aux concerts de You & You, formation folk locale, et de Saycet, trio d'electronica éthérée. On préfèrera la version enregistrée, beaucoup plus subtile dans sa manière de jouer avec les silences. Mais à la seconde suivante, le groupe brille par une transition bien malicieuse, en lançant guitare, violon, piano, haut-bois dans la course "Selur," menée tambour battant par une rythmique basse-batterie bondissante. Ici au contraire, l'amplification fait beaucoup de bien à la chanson. Une fois n'est pas coutume, le son est impeccable, chaque instrument a sa place. Le pianiste, qui semble issu du jazz contemporain, ajoute une touche nouvelle aux influences indie et classique de la musique de Hjaltalín.

Il faut l'avouer, on attendait quelque peu des Arcade Fire islandais (multiplicité des instruments, élans électriques), et on s'est quelque peu trompés. Hjaltalín ne sont pas des performers, l'énergie donnée n'est pas évidente. Ils ont plutôt l'air d'enfants bien élevés, timides et un peu gauches, qui restent bien à leur place et ne savent pas trop quoi faire de leurs membres. On pourrait trouver cela dommage, mais au cours du concert, Hjaltalín va tirer tout son charme de cette attitude génée et maladroite. L'ensemble livre donc une interprétation humble et honnête, sans grand élan ni pose, de chansons malines confectionées avec un plaisir certain, dont "Goodbye july/margt ad ugga," que le public reconnaît et apprécie, tout en restant assis toutefois. Puis les musiciens se lâchent peu à peu, et occupent de plus en plus d'espace sur scène. Et finissent leur set sur leur plus grandes réussites, "Trailer Music" puis "Traffic Music," avec lesquels, en donnant enfin un peu de l'énergie que l'on espérait d'eux, ils conquièrent le public... qui toutefois restera toujours assis...

Plus d'un an après la sortie islandaise de leur album, on peut enfin dresser le constat : Hjaltalín n'est pas (encore) un grand groupe, mais il a pour sûr le charme des petits. A suivre.
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Le myspace du groupe

Et une version acoustique de "Trailer Music" enregistrée pour un dvd musical :



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The White Stripes - Get Behind Me Satan (2005)

Cet album est un tournant. Non pas que l'oeuvre en elle-même, celle des White Stripes, ait souffert jusque là d'un relâchement, d'une baisse d'inspiration. Car comme dans le cochon, tout est bon dans la déjà ample discographie des Bandes Blanches, et ce 5ème effort longue durée ne faillit pas à la règle !

Jack White, génial démiurge, a tout compris, tout pigé : tout d'abord, inventer un concept autour de son nom, allant jusqu'à respecter la sainte trinité chromatique ; c'est ainsi, ses pochettes, tout comme ses rondelles seront à l'image de ses costumes de scène et ceux de Meg, c'est -à-dire blancs, rouges et noirs !

Il va à lui seul influencer une flopée de groupes de revival wock'n woll, et pas seulement ceux de la vague en the (pendant longtemps, la seule qui vaille dans l'histoire ; on en est à présent plutôt au nom unique, et en 4 lettres !) dont il est le représentant le plus crédible ; et serait-on tenté d'ajouter, le seul qui mérite véritablement la postérité.
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Ainsi, le fin guitariste (re)lance l'idée du duo, tombé en désuétude depuis les mornes années 80, et qui ne concernaient jusqu'alors que les archétypiques formations de muzak à tendance pop-synthé ! Ici, l'esprit est à nouveau au binaire, tendance lo-fi, et dans le sillage du groupe qui nous occupe, combien de Black Keys, de Kills, de Pravda et j'en oublie vont relancer l'adage du "à deux, c'est mieux !"

Enfin, notre homme transpire une sincérité et une passion intacte pour la musique qui voit le jour au carrefour mythique où se rencontrent le Malin et l'esprit du blues, du rock, celui que feu Robert Johnson va inoculer à tout un pan d'une scène rock anglophone ébahie aux confins des 60's.

Que se passe-t-il donc en 2005 ? Sans doute lassé de la formule quelque peu réductrice du duo batterie-guitare dont les esprits chagrins n'ont pas compris qu'elle abritait néanmoins la substantifique moelle d'une chanson, et que celles des White Stripes étaient, jusqu'à preuve du contraire, des modèles du genre, eh bien Jack White va quelque peu délaisser sa six-cordes, la rencardant au coin du mix, lui préférant les sonorités du piano, et de manière générale, de tous les claviers pouvant lui tomber sous la main. L'esprit du groupe demeure ; seul est modifié l'enrobage, la finition.

Encore que cela ne frappe pas forcément aux yeux sur "Blue Orchid", terrible déflagration glam , qui en tant que premier single de l'album renvoie au phénomène de la très bonne "Seven Nation Army" de l'album précédent Elephant (2003) - rendu malheureusement inécoutable faute d'un remix hexagonal vulgaire et inepte !
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Mais dès "The Nurse", l'on entre dans l'univers lourd et marécageux d'une musique bayou, qui doit autant au fantôme Beefheart qu'au Gris-Gris de Doctor John. Pour montrer l'essor planétaire des White Stripes qui effectuent une tournée triomphale en Amérique du Sud, c'est un marimba qui emmène la danse, dans une ambiance moite au possible !

L'album fait de temps en autres quelques embardées bienvenues dans le rock boogie ; et c'est avec beaucoup de verve que White réempoigne sa Mustang pour dégoupiller les presque jumeaux "My Doorbell", et "The Denial Twist", néanmoins réhaussées de piano. Le blues de rigueur est aussi présent ("Instinct Blues"), la comptine de Meg aussi ("Passive Manipulation") et le furieusement garage "Take Take Take" et son sample de sonnerie qui peut rendre dingue toute une assemblée (exemple vécu) et les faire débouler vers la porte d'entrée !

Dans le registre lourd et moite évoqué plus haut, de nombreuses chansons comptent ici parmi ce que Jack, aussi à l'aise dans l'interprétation que dans l'exécution, a composé de mieux : "White Moon", ses glissandos de cymbale et ses notes éparses tristes, ce "Red Rain" menaçant avec sa slide pernicieuse, "I'm Lonely (But I Ain't That Lonely Yet" et son piano bastringue désenchanté !
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Tout cet attirail, à la fois furieusement hétéroclite (on compte aussi l'espèce de gigue "Little Ghost") et homogène - car le piano demeure l'instrument roi ! - est réellement recommandable, mais gagne sa valeur ajoutée comme souvent par l'ajout d'une chanson magique "Forever For Her (is Over For Me") qui a fait dire à certains critiques que Get Behind Me Satan était le Exile On The Main St des Stripes ; et je ne suis pas d'accord, car si elle est flatteuse, la comparaison s'avère réductrice !

Pour son aura romantique véhiculée notamment par ce morceau princier et émouvant, pour ses options instrumentales qui font la part belle à l'exotisme, à une orfèvrerie pop qui serait dépouillée, l'oeuvre tient plus du Aftermath que d'aucun autre album des Stones.

La panoplie de néo-mousquetaire décadent de Jack White influe aussi sur ces références ; et là, on touche au work of art, comme ils disent !

En bref : Les Whites Stripes dans l'apparat où on les attend le moins, mais toujours cette aisance stupéfiante à trousser selon le format pop, des chansons qui, quelque soit leur production, flottent toujours très haut au-dessus de la mélée. Ou D'artagnan s'offre un intermède boogie.




Le site off et le Myspace

Sublime interprétation dans la cave de "Forever For Her (Is Over for Me)"

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The Orb - U.F.Orb (1992)

Trouvé dans l’un des bacs des bonnes affaires de la Fnac, l’album éclatait comme une petite tache entre les rangées de compilations lounge. Comme il n’est plus aussi facile de tomber sur une telle opportunité, l’objet s’est rapidement trouvé en ma possession. Une trouvaille qui s’inscrit naturellement dans la série commencée par Nickx et Dave avec leurs chroniques des Ballistic Brothers et Black Science Orchestra. L'équipage aux commandes de cet objet volant non identifié est constitué de la figure principale de ce projet, Dr. Alex Paterson, et de son coéquipier de voyage Chris Watson (AKA "Trash"). Trip spatial, odyssée futuriste, dans les dimensions du chill out et de l’ambient, le disque atteint la première place des charts anglais à sa sortie.

Alors que le projet coûteux du tourisme spatial est en phase d’être réalisé, dès la fin des années 80, The Orb s’organisait déjà à proposer des voyages similaires pour le prix d’un disque. Né de la collaboration de Jimmy Cauty et Alex Paterson, le projet est récupéré par ce dernier qui veut éviter de passer pour le side project de KLF, l’autre groupe de Cauty dont la popularité ne cesse de grandir. Depuis, la structure de The Orb intègre périodiquement de nouveaux profils. Trash, qui succède ainsi à Kris Wetson, sera lui-même remplacé par Andy Hughes, Andy Falconer, Steve Hillage, ou Thomas Fehlman, l’autre pilier de cette formation à géométrie variable et fondateur du label allemand Teutonic Beats. On le retrouve d’ailleurs sur la première composition de l’album. Dérivées de l’acid house, leurs productions s’inspirent des canons rock et électronique progressif des années 70-80 (Pink Floyd, Tangerine Dream, Kraftwerk,…), et de Brian Eno, qui exerce une forte influence sur Paterson. Ils font un tabac dans les salles de chill out des clubs londoniens et les journalistes s’étonnent de voir un album de rock progressif créer autant d’engouement autour de lui.

Pourtant, de rock progressif, il n’en conserve que l’essence. Peu de traces d’instruments mais des tables de mixage et des sons directement empruntés aux données de la Nasa, après l’accord de l’agence. L’ingénieur du son Watson, met ses capacités techniques à l’élaboration d’un son panoramique, censé représenter le voyage dans l’espace. "O.O.B.E." inaugure le périple stellaire au son de nappes atmosphériques. Décollage, et immersion progressive. Le morceau éponyme "U.F.Orb" rappelle que l’ambient se décline aussi bien en version techno/house de dancefloor, certes tardive, mais parsemée de trouvailles hallucinatoires, comme ce vrombissement de pales d’hélicoptère. Le bizarre, la vie alien, extraterrestre, sont autant de sujets de préoccupations. Le single, "Blue Room", s'inscrit en référence à la prétendue chambre bleue de la base militaire de Wright-Patterson, qui serait censée cacher la preuve d’une vie extraterrestre. Aventure d’une quarantaine de minutes dans sa version originale, elle apparaît réduite à 17mn, néanmoins magistrales au regard de la qualité de ses effets hypnotiques.

Alliage de rythmes drum and bass, du velours des claviers et de l’ondulation des lignes de synthés, The Orb multiplie suffisamment ses matériaux ce qui écarte toute sensation de déjà-vu. Endurance et maîtrise du souffle sont des qualités maîtrisées par le duo. Alors que "Towers Of Dub" laisse place à un dub bourdonnant où se détachent les improvisations d’un harmonica qui semble répondre aux aboiements de chiens pendant plus d’un quart d’heure, "Close Encounters" et "Majestic" ne descendent pas en dessous de la barre des 10mn. Techno vrillée et corrosive pour le premier, le deuxième track file comme une comète qui traîne derrière elle une longue chevelure de gaz synthétique et une queue formée de poussières de sonorités pétillantes. Totalement futuriste, l’album est doté d’un artwork réalisé par le groupe de graphistes The Designer Republic, notamment réputé pour ses pochettes effectuées pour le label d’electronica anglais Warp.

En bref : Cette relique figée hors du temps, inclassable, témoigne de l’incroyable richesse des compositions électroniques de ce début des années 90’, entre excursion audio-visuelle et délire cosmique. Un voyage cérébral.



Le site et le MySpace du groupe.

"U.F.Orb"


"Blue Room" (dans une version réduite de 3mn)



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24 janvier 2009

Ladytron - Velocifero (2008)

C'est dans un relatif anonymat qu'est sorti le 4ème opus de Ladytron à l'orée du dernier trimestre 2008. La frilosité ambiante à chroniquer ce nouveau disque dans la presse écrite (allo Rock And Folk ?) est-elle liée à la relative déception qu'a engendrée le précédent Witching Hour (2005) ?

Peut-être. Ce n'est pas une raison en tout cas pour zapper l'actualité d'un groupe qui, s'il n'en est toujours pas à avoir retrouvé l'état de grâce de ses débuts -les irrésistibles Light And Magic (2002) et surtout le debut 604 de 2001- n'en demeure pas moins ce que la Grande-Bretagne a produit de plus roboratif en matière d'electro-pop, depuis les formidables et hélas défunts Add N To (X)._
Les voix acidulées de Mira et d'Helen font toujours mouche sur les nappes de Korg et de Farfisa que leur tricotent Daniel et Reuben, en particulier sur le nouveau single "Ghosts", tubsque à souhait. Ailleurs, un titre curieux car chanté en bulgare ("Kletva") emmène l'auditeur sur des territoires vocaux abscons, autrefois fréquentés par les Cocteau Twins. L'on sait de toute façon que tout comme chez leurs contemporains de Stereolab, on accorde davantage chez Ladytron d'importance au groove, à la prosodie, aux rythmes qu'aux textes.
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Pour ces raisons purement hédonistes, on abandonnera lascivement nos corps aux écoutes martiales de "Black Cat", "I'm Not Scared" ou du vindicatif "Dead Blue". Le quatuor anglais a semble-t-il durci le ton sur ses tempos, balançant la sauce, une tendance déjà perceptible sur Witching Hour et qui pourra faire regretter le temps où le combo mixte ne s'en remettait qu'au charme sucré de ses mélodies electro-chic façon Blondie deuxième génération, pour titiller l'oreille. Il n'empêche, l'esprit de danse est là, et le souvenir ému d'un chill-out à Benicassim demeure vivace.

En bref : pas le plus grand disque d'électro, ni même la meilleure livraison de Ladytron. Néanmoins, la satisfaction de reprendre des nouvelles d'un ex-pilier de l'électro qui a pris l'habitude d'espacer sa production : se faire oublier pour mieux réapparaître ?



Le Myspace et le site off
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"Kletva" :


"Ghosts" :



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Gui Boratto - Atomic Soda EP (2009)

Auteur en 2007 de l’un des meilleurs albums techno de ces dernières années, le Brésilien Gui Boratto sera de retour en mars avec un nouveau disque que l’on annonce très orienté électro-pop, dans la veine de son morceau le plus populaire, “Beautiful Life”. De quoi m’effrayer puisque je trouve le titre en question assez mauvais, contrairement au reste de Chromophobia. D’autant que le nom de ce très attendu deuxième opus, Take My Breath Away (!), me fait irrémédiablement penser à Top Gun et que la pochette (visible ici), est d’une laideur sans nom. Heureusement, un rapide coup d’oreilles à la bête, déjà disponible en streaming, m’a plus que rassuré. Mais n’anticipons pas: elle ne sera lâchée que le 23 mars, et pour l’heure, ce sont deux des titres de l’album qui paraissent en 12” le 9 février, toujours chez Kompakt, et donnent un petit avant-goût de ce qui nous attend.

De toute évidence, c’est un maxi essentiellement destiné aux DJ que cet Atomic Soda : les deux faces tapent très fort façon marteau-pilon et ressemblent davantage à des EP antérieurs comme Beluga ou Arquipelago qu’aux tracks de Chromophobia. Pas très représentatives de l’album à venir, donc, ce sont néanmoins de solides indications sur la forme actuelle du bonhomme. A force de traîner à Berlin, il a semble-t-il germanisé ses productions, qui sonnent presque comme celles du résident du Berghain, Marcel Dettman. “Atomic Soda” fait courir un son de basse synthétique sur un pied martial et mat, son qui se sature par la suite et confère une atmosphère crépusculaire à cette longue plage qui évoque (ça va faire plaisir à Fab) les prods du Chilien Ricardo Tobar. Plus encore calibrée pour le dancefloor, “Ballroom” nous propulse à très grande vitesse sur une autobahn rectiligne jonchée de débris industriels. Pas de quoi grimper au rideau pour autant.

En bref : Deux titres de techno minimale furibonde, comme un teaser mensonger d’un deuxième album aux sonorités plus douces et mélodiques. Efficace, mais pas transcendant.



L’intégralité de l’album en streaming

A noter :
- Gui Boratto au Dock des Suds de Marseille pour la "Nuit Rouge" le 7 février, et au Rex Club de Paris pour une Release Party le 12 février.
- Grosse année en prévision pour Kompakt, qui sortira le nouvel album du suédois The Field au mois de mai et distribuera, au deuxième semestre, le successeur du splendide This Bliss de Pantha du Prince.

Le site et le MySpace de Gui Boratto
Le site de Kompakt
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23 janvier 2009

Apple Jelly - Nanana Club (2008)

Voilà un groupe bien typique de chez nous, qui a du talent, de l'enthousiasme, des idées, qui tourne depuis quelques années, et n'est plus confidentiel, mais n'a pas, pour l'instant, atteint une visibilité très élevée. Originaires de la région de Lyon, les frères Benn et Viktor ont deux albums et plus de 250 concerts au compteur, ont fait une première partie des Klaxons, et ont été élus espoir électro du printemps de Bourges 2003. Leur nom est trompeur ; il faut toujours se méfier de la confiture. Souvenez-vous de l'artwork magnifique de Strawberry Jam, l'avant dernier album des Animal Collective : de la confiture de fraise, en effet, mais bien autre chose en fait, des paysages solaires, hallucinés, toute une psyché agitée et colorée. Les Apple jelly, à l'évidence, ont bien autre chose que de la confiture dans la tête, même s'ils ont une prédilection marquée pour le rythme et les mélodies entêtantes. Ils ont des idées, figurez-vous, et on ne peut pas en dire autant de tout le monde.
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Fans de films de genre, d'art contemporain, ils élaborent une électro-pop référencée, sans être conceptuelle, et sans jamais sombrer dans l'esprit de pesanteur. Un léger vent de folie traverse leur Nanana Club, qui n'est pas sans rappeler Of Montreal, le côté psychotique en moins : variations des timbres de la voix d'un morceau à l'autre, variation des ambiances, des styles d'écriture, effets de choeurs, vocaux tribaux, cris. La figure récurrente de ce dernier album est le zombie. Pas celui de Mickael Jackson, pauvre pantin réveillé le temps d'un tube, mais celui de Romero, bien plus inquiétant, parce que reflet de l'horreur bien réelle de notre société.
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L'introduction nous met d'emblée dans l'ambiance : énorme synthé sortant de terre, rythmique sourde, cris étouffés, voilà qui nous rappelle plaisamment nos joyeux lurons de Zombie Zombie, tant appréciés dans ce webzine. Mais le deuxième morceau, "Radio" casse l'horizon d'attente, en nous balançant un tube groovy discoïde, un peu idiot à première vue, mais avec un joli break rêveur, et surtout qui s'arrête sagement quand il le faut. Le reste laisse la place à une écriture un peu plus complexe. On retiendra surtout "Dead men walking" : les zombies de Romero (ceux de Dawn of the dead, trés exactement), qui depuis longtemps hantent mon imaginaire politique, se mettent à chanter pour réclamer la vie, le soleil, c'est-à-dire autre chose que cette misérable survie centrée sur le travail et la pulsion consumériste. Un synthé métronomique se mêle aux sonorités amples d'un piano, tandis que Benn et Viktor adoptent une belle voix grise. Le piano apporte ce qu'il faut de tristesse et d'émotion à cette complainte des presque morts, mais qu'une force de vie traverse miraculeusement le temps de la chanson.
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Dans l'ensemble c'est l'électro qui domine, comme sur l'ouverture daftpunkienne de "Doc revolution", mais la basse très rythmique de Viktor est toujours présente pour faire groover chaque compo. Beau final, avec "La fin du western", qui semble faire signe vers quelque chose de plus expérimental (claquements de langue, esthétique doo wop). Moi, ça m'évoque les Misfits de Billy Wilder, pour rester dans les références cinématographiques.
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En résumé : Cérébral mais groovy. Politique mais dansant. Les zombies de Mickael Jackson peuvent aller se rhabiller.





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Fires Of Rome - You Kingdom You (2009)


Bon, que dire de ce disque ? Nouvel avatar d'une scène new-yorkaise décidément très prolifique au début des années 2000, on y retrouve ce concept finalement astucieux du power-trio, (il n'y en a pas tant que ça), cet aspect fourre-tout qui peut tout à la fois servir comme desservir le combo mené par Andrew Wyatt - pas de lien de parenté avec son illustre devancier ;  NYC se trouvant sur la carte loin de Canterbury. 
 
Que trouve-t-on donc pour se sustenter dans cette auberge espagnole ? Eh bien, et c'est bien là l'anicroche, autant de matière à s'enthousiasmer qu'à fuir, même si la qualité d'ensemble demeure attrayante. Fires Of Rome donne l'impression de ne pas savoir sur quel pied danser, ou bien de vouloir goûter à toutes les ivresses. C'est parfois furieusement dansant et réminiscent des rythmiques syncopées des Wire ou  Gang Of Four de jadis ; ainsi cela fonctionne comme sur l'enlevé "Set In Stone" et son refrain très années 80. 
On trouve également du glam super efficace comme sur ce "Love Is A BurningThing" qui, sous ses airs de manifeste renverrait jusqu'à Ziggy Stardust dans les cordes. D'ailleurs l'on jurerait entendre Mick Ronson à la six-cordes. Dans le même esprit glitter, on imagine sans peine Andrew Wyatt et son binôme avoir écouté en boucle T Rex ("But You're Such A Cherry"). 

Là où ça se gâte, c'est sur les refrains qui singent le Genesis du pire (pléonasme) ; car il y a cette voix maniérée de Wyatt qui rappelle hélas un peu trop celle de Peter Gabriel ("It Makes Me Weak") Et que dire de cet abominable pastiche de Talking Heads, ("Bronx Bombardier"), qui donne envie d'éradiquer de nos discothèques, et ce de façon définitive, tous les héritiers funk  du groupe légendaire de la Grosse Pomme qui n'ont jamais tenu leurs promesses sur la durée. .Le chanteur a en effet cette propension à en faire des tonnes, et cette manière de plomber des titres qui partent pourtant sous de bons auspices ("Monkey In A Cage" démarré acoustique, mais vite rejoint par un vibrato dégoulinant) qui rendent l'affaire parfois vaine.

Ce n'est en définitive que lorsque le groupe se contente de torcher des pop-songs excitantes, ("Love..." donc, mais aussi "Songs As Yet Unsung", "Set In Stone") que les Fires Of Rome recueillent l'adhésion.

On ressort donc de l'écoute de ce curieux lp avec une impression de saccharine collée aux dents, un effet de trop plein de fraises Tagada qui et c'est bien là le paradoxe, ne parviennent pas tout à fait à  écoeurer.  Les intentions et les capacités mélodiques sont là.
Qu'un deuxième album hélas jamais paru aurait peut-être permis de canaliser.

 
En bref : un album qui enfonce, certes de manière agréable, des portes ouvertes. Et un groupe qui sous ses airs assumés de poseur ne manque évidemment pas de panache. Néanmoins la démarche artistique gagnera à être plus originale et à choisir son camp entre 80's triomphantes et prog-funk parfois douteux.
Le Myspace _ L'album en streaming
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22 janvier 2009

Calexico + Depedro - Concert à Bordeaux le 21/01/09


La Rock School Barbey accueillait hier soir un concert très attendu, suite à la sortie l’année dernière de Carried to dust, dernier album en date des représentants du mythe crépusculaire de l’Ouest Américain, j’ai nommé Calexico. Grand groupe du paysage indé qui comme Tindersticks a connu son heure de gloire fin 90’s et qui depuis rame un peu pour se trouver un public, le combo de Tucson semble en 2008 avoir récupéré de sa superbe, comblant fans et newbies avec un onzième enregistrement plus délicat et nuancé que ses prédécesseurs.

Premiers constats statistiques : la salle est comble et le public plus âgé qu’à l’accoutumé. Peu étonnant quand on sait qu’en plus de dix ans de carrière, le groupe a su monter un réseau de fans internationaux grâce à un talent non feint pour le brassage des genres, du rock au blues en passant par le jazz ou la country. Un style finalement indéfinissable au profit d’un exotisme non putassier, parce que Calexico est peut-être le seul groupe à utiliser les grands espaces morriconiens et la ferveur latine sans tomber dans l’effet carte postale. Chez nous c’est Manu Chao qui s’en charge, avec plus ou moins de succès.
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En première partie, c’est l’espagnol Jairo Zavala alias Depedro qui s’y colle. Le genre de gars, si tu le croises dans la rue, tu penses qu’il est en situation irrégulière. Tout en rouflaquettes et guitare en bandoulière, il nous présente son projet le plus personnel à ce jour, seul ou accompagné des musicos de Calexico. Il joue des balades rythmées à la guitare, chantées en espagnol, du plus bel effet, et rejoint le groupe pour la suite des événements (Depedro joue sur Carried to dust, et à n’en pas douter, son CDD chez Calexico pourrait rapidement devenir indéterminé).

La bande à Joey Burns et John Convertino monte alors sur scène. Sept musiciens au total pour deux trompettes, une batterie, un trio accordéon / harmonica / mélodica, une contrebasse, moult guitares et surtout, presque la star de la soirée, cette pedal steel qui vous emmène définitivement très loin dans l’imaginaire. Instrument magique et planant, complètement maîtrisé par le grand Paul Niehaus, qui m’évoque alors Jason Molina et son "Farewell transmission". Malheureusement Sam Beam d’Iron And Wine n’est pas là, lui qui a également participé à l’album. Mais qu’à cela ne tienne, une constatation s’impose ce soir, tous ces musiciens sont vraiment exceptionnels.

De ballades pop sobres peut-être trop low tempo aux grandes envolées mariachis, Joey Burns illumine ce set essentiellement axé sur le dernier opus dont "Two silver trees", "The news about William" ou "Trigger" (plus besoin d’instrument, il suffit de siffler) sont de grands moments. De quoi en tous cas assurer facilement l’heure et demi de show, dont deux rappels et une reprise de Love, "Alone again or". Joey aura fait preuve d’une sympathie de chaque instant, multipliant les mercis et autres commentaires de soutien. Standing ovation pour le premier concert de l’année 2009, qui pour le coup démarre en trompettes.

"Alone again or" par Calexico et "La Memoria" par Depedro :


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21 janvier 2009

Franz Ferdinand - Tonight : Franz Ferdinand (2009)

Allons, il fallait bien en parler de ce nouveau Franz Ferdinand. Même si chacun sait que les trois écossais en costumes tirés n’ont jamais récolté tous les suffrages dans nos colonnes, bien au contraire. A défaut d’en faire nos nouveaux Late Of The Pier -la place est à prendre pour 2009- laissons au troisième opus en date le bénéfice du doute, et accordons lui une écoute, juste parce que mine de rien, en 2004, il me semble que je n’étais pas le seul à danser sur "Take me out", "Auf achse" ou "Come on home". Ou alors certains ont la mémoire courte. Alors Ok, de l’eau a coulé sous les ponts et lorsqu’en 2005 sortait You could have it so much better, on aurait effectivement aimé obtenir un peu mieux que cet album bâclé, dont je ne me souviens aucun titre soit-dit-en passant. Bref, trois ans plus tard et à déjà 37 ans le bel Alex Kapranos remonte sur les planches et nous annonce quelques nouveautés. Qu’en est-il ?

Quelques heures plus tard -et oui, j’ai poussé le vice jusqu’à l’écouter plusieurs fois- la sensation est plutôt bonne, comme quand on vous rabâche à droite à gauche qu’un film est vraiment dégueu, et que vous ne pouvez en être finalement qu’agréablement surpris. Et malgré ce que j’ai pu lire ici ou là, Franz Ferdinand ne refait pas tout à fait du Franz Ferdinand. Alex continue d’embobiner les foules avec son faux air charmeur, Alex n’a pas perdu sa recette couplets + refrains = machines à tubes, Alex a toujours de l’énergie à revendre… Jusqu’ici tout va bien, ou mal si vous êtes définitivement allergiques. Là où interviennent les pseudos remaniements musicaux, c’est lorsque l’on voit s’effacer les traditionnelles guitares au profit d’effets samplés et de synthés, sans que cela ne ressemble de trop à ce qui se fait en ce moment. En ce sens, la nouvelle version de "Can’t stop feeling" et "Bite hard" sont surprenants.

Poussant même le bouchon un peu plus loin, le final de "Lucid dreams" est carrément électro, exempt de tous vocaux, mais finalement assez anecdotique. Par contre "What she came for" n’a pas à rougir, pas plus que "Send him away". Dans un registre plus habituel, "Live alone" ou "Ulysses" sont du Franz Ferdinand pur jus, avec tout juste un peu de synthé en sus. A écouter une fois également le synthé de "Twilight omens", pas si mauvais que ça. Les titres non cités ne recèlent quant à eux rien de remarquable, et sont à oublier dardar. Finalement plus dansant, voire plus funky (sisi) le nouveau Franz Ferdinand ne marquera pas son temps mais on ne peut lui enlever une brochette de titres festifs intercalables entres deux autres tubes plus arrosés.

En bref : Pas si mauvais que ça, le nouveau Franz Ferdinand souffre d’une concurrence actuelle bien plus inspirée mais ajoute à sa sauce un soupçon de nouveauté suffisant pour illuminer quelques morceaux récupérables.
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Le site officiel et le Myspace

A lire aussi : Weezer - (2008)

"Bite hard" en live, plutôt qu’ "Ulysses" que l’on voit partout :

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20 janvier 2009

Charlotte Zwerin - Thelonious Monk: Straight, No Chaser (1988)

Je connaissais à peine Thelonious Monk avant de voir ce documentaire dans un petit cinéma parisien, en 2001. Tout juste avais-je écouté une compilation d’enregistrements en trio préparée par un ami bien intentionné, compilation qui m’avait immédiatement emballé. Mais c’est au sortir de la séance de Straight, No Chaser qu’a véritablement commencé mon culte pour le musicien. Depuis ce jour, Monk est pour moi une pure incarnation du génie musical, aux côtés des Jimi Hendrix, Miles Davis et autres John Coltrane. On a énormément glosé sur les rapports entre sa folie - Monk ayant souffert d’une maladie mentale non encore identifiée jusqu’à son décès en 1982 - et son génie, mais c’est sur pellicule encore plus que sur disque que l’on peut juger de l’ampleur de l’une et de l’autre. Et le film de Charlotte Zwerin reste le plus bel hommage au musicien réalisé à ce jour, tous supports confondus.

Les images parlent d’elles-mêmes. Coiffé de chapeaux souvent extravagants, tournant sur lui même jusqu’au vertige, un sourire d’une vague démence aux lèvres, l’artiste est semblable à un enfant capricieux et incapable de gérer autre chose que sa musique. Sa femme Nellie l’habille, le nourrit, et fait la queue à la banque tandis qu’il mange une crème glacée en fixant les gens d’un air hébété. Les musiciens qui l’entourent lors des sessions d’enregistrement font tout leur possible pour recueillir les partitions complètes et les indications du maître, sans obtenir autre chose qu’un “Joue la note que tu veux !”.

Emprisonné en lui-même, marmonnant d’inintelligibles considérations, Thelonious fait cependant preuve d’une lucidité incroyable dès qu’il s’asseoit devant un piano. Rien de cérémonial dans ses performances : il est sur scène comme ailleurs, totalement imprévisible, fumant sa clope et se mouchant tout en jouant “Round Midnight”, s’échappant en coulisses pour ne revenir qu’au moment précis où commence son solo, ou entamant une nouvelle danse de derviche tourneur devant un public blanc et bourgeois totalement médusé.


L’une des grandes forces de ce film, on l’aura compris, est la qualité des images d’archives et notamment des captations de concerts, proprement époustouflantes. C’est d’ailleurs sur la base d’archives filmées que s’est construit le projet de Charlotte Zwerin. En 1980, le réalisateur Bruce Ricker la contacte et lui parle de Michael et Christian Blackwood, qui ont suivi Monk lors de sa tournée européenne de 1967-1968 avec leur caméra. Diffusées lors d’une émission pour la télévision allemande, les images n’ont jamais été réutilisées depuis. Enthousiasmée, elle lutte pour obtenir des financements, auxquels elle accèdera finalement grâce au coup de pouce de Clint Eastwood, qui accepte de produire le film alors qu’il est en plein tournage de Bird, son excellent hommage à Charlie Parker.

Autour de la matière fournie par les frères Blackwood, Zwerin imagine un portrait sous la forme d’un récit chronologique complet, et entame un travail de recherche colossal. Non seulement elle exhume des documents souvent inédits et récolte les témoignages de ses proches et collaborateurs, mais elle ose aussi des dispositifs plus originaux, tel ce quatre mains en face-à-face de Barry Harris et Tommy Flanagan, deux héritiers musicaux de Thelonious, qui livrent une superbe réinterprétation de “Well You Needn’t”. Et si tout cela ne nous permet pas de percer le mystère de cet artiste unique et impénétrable, jamais nous ne nous en étions approchés à ce point.

En bref : Des images d’archives magnifiques servies par un montage impeccable : pour les fans comme pour les profanes, Straight, No Chaser est le documentaire à voir absolument sur l’authentique génie qu’était Thelonious Monk. Et, au passage, l’un des plus beaux films jamais dédiés au jazz.

A noter : Parmi les autres documentaires consacrés au pianiste, on peut signaler Thelonious Monk (Masters of Jazz, Collection Archives Inédites, 2002). Plus cheap, mais intéressant quand même. Pour en savoir plus sur sa vie, consultez les excellents Monk, de Laurent de Wilde (Gallimard), et Blue Monk, de Jacques Ponzio et François Postif (Actes Sud). Mais surtout, achetez ses disques !

Un extrait du film :

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19 janvier 2009

VCR - S/t Ep (2003)

Deuxième tuerie retenue de ma phénoménale soirée revival 80’s d’il y a quinze jours, ce maxi sorti de nulle part, enfin si, de Virginie pour être exact, et pour lequel il m’a été difficile de trouver des infos. Parce qu’avec trois lettres comme seules indications, il a fallu ruser. Mais tirons dès à présent les choses au clair. VCR est donc un groupe contemporain, fondé en 2002, dont le line-up particulier n’a cessé de se remodeler depuis. Si Chad Middleton, Steve Smith et Christian Newby font toujours partie de l’équipe, Casey Tomlin et Mya Anitai, pourtant indispensables sur cet Ep, auraient quelque peu splitté comme on dit. Bref, vous commencez à vous demander quelle est la particularité de cette obscure formation en mouvement. Et bien tout tient dans sa composition, inhabituelle chez un combo électro punk rock : pas de guitares (tout juste une basse), une batterie et trois synthés en action. Alors Ok, ça n’est pas nouveau, Devo, Depeche Mode, OMD ou encore plus récemment The Faint s’y sont essayé, mais de nos jours c’est plutôt rare. Surtout pour des morceaux qualifiés par les intéressés de fun-core aventureux, qui donnent une pêche, mais alors une pêche…

Il s’agit ici du premier Ep délivré par le groupe en 2003, limité à seulement 100 exemplaires (chez Pop Faction), et réédité en 2005 chez Sideonedummy Records qui a également sorti en 2006 le premier Lp du groupe, Power destiny, que je n’ai pas encore eu la chance d’écouter. Mais pour l’heure et pour ce que j’ai entre les mains, c’est-à-dire ce maxi de six titres et seulement quinze minutes, ça envoie comme il faut. Enregistré en trois jours et uniquement composé à l’ordinateur, VCR ne comprend pourtant aucune séquence préprogrammée, ni effet Midi, tout est joué live. Ne souhaitant pas s’engouffrer dans le revival 80’s mais étant amateurs de sonorités Nintendo (type Castlevania pour être exact), le groupe choisit d’imaginer le son de demain, ultra catchy, constitué de breaks, d’un flow agressif limite hip-hop et ouvrant de nouvelles portes aux soli de synthés. Le rythme est punk, la batterie électro, et le phrasé violent. En ce sens quatre des six titres se tirent dans les pattes et ont sensiblement le même niveau ("Rad", "Back in business", "King and queen of winter" et "DVD". Restent "We are VCR" qui sonne forcément comme leur hymne (avec quelques Ah ah ah féminins) et la bombe atomique "Bratcore" avec ses synthés obsédants, sa voix gueularde ("Skitzo dancer", encore) et ce je ne sais quoi qui fait que ça fonctionne. On en redemande.

En bref : Un maxi en forme de bombe, mêlant punk, hip-hop et électro pour une musique résolument tournée ver l’avenir. Impressionnant.
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Le Myspace

Télécharger VCR gratuitement ou l’acheter (pas de vinyl je crois)

"Bratcore" mis en ligne par un fan (qui se paye un délire à la fin):

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17 janvier 2009

Yellow Magic Orchestra - Solid State Survivor (1979)

C’est aujourd’hui reconnu, les années 80 et leur côté fluo cheap reviennent à la mode. En panne d’inspiration ou selon une avancée rétrograde des mœurs regardant toujours vingt ans en arrière (les 70’s à la mode dans les 90’s, les 80’s dans les 00’s, et bientôt (?) les 90’s dans les 10’s), les bricoleurs de tous bords ressortent leurs vieux claviers midi et dépoussièrent une décennie pourtant bien triste. C’est le cas de DatA (parmi tant d’autres) qui n’aurait certainement jamais existé sans The Man-Machine de Kraftwerk, ni sans son pendant japonais, le YMO qui un an après livre l’anachronisme musical personnifié dans un contexte dominé par le punk anglais et le sérieux de ses propos.

C’est le claviériste Ryuishi Sakamoto qui est à l’origine du projet. Etudiant aux beaux-arts, de culture jazz, il rencontre sur son campus le batteur chanteur Yukihiro Takahashi ainsi que Haruomi Hosono. A eux trois et en seulement six ans (split en 1984), ils vont défricher l’univers encore en gestation de la synth pop. Comme propriétaires d’une machine à remonter le temps, ils vont devancer de plusieurs années le mouvement techno et le renouveau du disco, sans savoir que trente ans plus tard, leurs rythmes métronomiques à mi chemin entre la pop et les machines allaient continuer d’inspirer toute une génération.

Là où YMO dépasse le simple rang de kitcherie exotique, c’est dans son second degré et son humour assumés, alors qu’à première vue le mot humour ne s’accorde guère ni avec le Japon, ni avec les années 80, en tout cas musicalement. Les costumes rouges de la pochette sont bien entendus destinés à leurs homologues allemands et "Day tripper" la cover des Beatles est déconcertante de précocité dans l’art du remix. Hormis deux plages ambiantes glaciales ("Castalla" et "Insomnia") intéressantes mais dispensables, l’album affiche six hymnes techno pop avant l’heure, aux mélodies sucrées hors du temps.

Ainsi "Solid state survivor" et "Technopolis" usent et abusent de ces synthés minimalistes et de ces voix vocodées. Quand on n’a pas l’impression d’être dans un jeu vidéo, on se voit courir dans un champ au son d’un générique de dessin animé japonais. Une hybridation vierge de tout référent anglais de l’époque, et quasi universelle malgré le côté nippon (ni mauvais) de l’ensemble (d’ailleurs les Polysics…). "Absolute ego dance" et "Behind the mask" complètent le tableau avec leurs rythmes effrénés. Enfin, et le clip ci-dessous devrait vous en convaincre, "Rydeen" est le sommet du disque. D’une naïveté hors limite, je l’ai vu retourner un dance floor il y a tout juste une semaine. Et j’ai lu sur tous les visages : "Mais c’est quoi ce truc ?". C’est le Yellow Magic Orchestra, et ça a trente ans cette année.

En bref : Modèle intemporel de space opéra électro pop asséné par un trio de japonais venus du futur.
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Un Myspace

A lire aussi : IGO - Synth love (2008)

Le clip hallucinogène de "Rydeen" :

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16 janvier 2009

Meringue, Alcohol & Us - s/t (2009)

Alors que Fabien nous parlait il y a quelques jours de la quiétude provoquée par l’écoute de Dark Captain Light Captain, je pense avoir ressenti la même impression quasi hypnotique en m’aventurant dans cet album. Enfin, aventure est un grand mot pour un disque folk qui bien que non exempt de qualités -sinon je n’en parlerais pas- se contente de brosser l’auditeur dans le sens du poil, y a-t-il du mal à ça ? Surtout quand le dit-disque fait le choix d’un folk optimiste et positif, au lieu de s’appesantir en trémolos comme le font excessivement certains. Car mis à part "Get born and then" (excellente par ailleurs), les neuf autres titres de ce premier jet français de surcroit assument plutôt bien leur légèreté et leur entrain.

Remarqué l’année dernière avec un premier maxi intitulé Black and white rainbows, le trio poitevin composé d’Amandine, Bruce et Judicaël revient donc en force en cette année 2009. Ils se mettent toujours à trois pour chanter, l’un après l’autre j’entends, quoique quelques fois en chœur ("Spring Prince") et continuent de faire appel à la horde des nouveaux anciens instruments à la mode que sont mandoline, ukulélé, xylophone ou violoncelle. Le résultat n’en est que plus soyeux et délicat, vous en conviendrez.

Amateurs de Eels (la profondeur en moins, désolé) ou Billie Holliday, on ne s’étonne donc pas de les entendre chanter en anglais, à la manière d’une nouvelle vague folk / pop malgré tout bleu blanc rouge qui compte déjà dans ses rangs les sympathiques Cocoon ou encore Orouni. "Find my man" est le titre qui m’a le plus touché, avec son rythme ukulélé (même moi je pourrais le faire), la voix perchée d’Amandine et les traditionnels lala lala. Le ukulélé qui occupe d’ailleurs une place non négligeable dans le disque, quand ce ne sont pas les arpèges doux comme du coton de "Basil" ou la guitare espagnole de "The hungry man" qui s’expriment. Agréable comme du soleil en hiver.

En bref : Un premier album pop / folk bien comme il faut, agréable de bout en bout. Il n’y a plus qu’à prendre exemple sur CocoRosie pour l’expérimentation et le tour est joué.


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Le Myspace

A lire aussi : Orouni - Jump out the window (2008)

Le disque en écoute :


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15 janvier 2009

The Jesus And Mary Chain - Psychocandy (1985)


Pierre angulaire. Expression si souvent galvaudée et néanmoins la plus appropriée pour qualifier le premier long player des petites teignes de Glasgow. Il faut savoir qu'à cette époque, soit celle des 80's où le dyptique fric/frime règne (MTV, Tapie, surproductions vulgaires à la Frankie...) cet album est une sorte de boomerang qui remet le monde de la pop dans le bon sens du vent, et fait renaître l'indé de ses cendres.
Car si la pop tendance ligne claire est alors célébrée, manque le combo couillu et burné, reprenant le combat sur les braises du punk, un groupe sulfureux, qui dérange et qui divise : ce sera les Jesus And Mary Chain.

Déjà, ce nom ! Ensuite , l'emballage : ce look improbable de proto Robert Smith hirsute (pléonasme !) et de jeune lycéen acnéique et en rage contre la terre entière, une rage sourde et toute prolétaire, non feinte, bien loin de la prétendue discorde des deux Gallagher, vaste imposture médiatique.. Non, la fratrie Reid était elle, tout un poème ! Si l'on ajoute l'accent rocailleux du Barras district de Glasgow, d'obédience catholique - ô ironie - l'une des faces B épiques du groupe ne s'intitule-t-elle pas "Jesus Sucks" ?- on ne pouvait imaginer meilleurs gimmicks pour ressortir du lot.

Alors, pour un groupe privilégiant autant l'apparence, la provoc dans la forme, ne manquait plus que la valeur ajoutée qui allait rendre des refrains déjà marquants terriblement ensorcelants. Pour ce faire, les deux frères eurent l'idée de conjuguer leur savoir-faire pop à une production velvetienne en diable ; et non pas celle posée ou léchée de The Velvet Underground (1969) ou de Loaded (1970), mais plutôt celle faite de distorsions crades et crues façon White Light White Heat (1967). Il faut d'ailleurs voir sur les videos d'époque un Bobby Gillespie (futur frontman des Primal Scream) juvénile, et tapant de façon martiale debout sur ses futs, tel une Moe Tucker réincarnée.
L'influence de ce disque fondateur se retrouverait du reste chez de nombreux artistes ; que penser par exemple de la superbe ballade "Just Like Honey", là utilisée dans le soundtrack du Lost In Translation de Sofia Coppola, ici repris par Alela Diane au sein du superbe projet Headless Heroes. Inutile de préciser que point de shoegazers sans ce disque mais plus grave, sans doute les Magnetic Fields n'auraient-ils jamais émergé : se souvenir qu'un dixième de 69 Love Songs, constitue un hommage évident à Psychocandy.

A quoi tient l'héritage Psychocandy, album générationnel entre tous ? Bien sûr à ce son, entrelacs effarant de guitares à fil de fer barbelé, tout pour la distorsion. Bon, les JAMC n'ont rien inventé en 85 ; déjà le lutin Dave Davies sans doute inspiré par Link Wray avait eu l'idée géniale de lacérer son ampli à coup de cutter pour lui donner cette saturation si caractéristique sur les premiers singles des Kinks, et puis, il y avait eu Sister Ray, donc... Mais rien qui ressemblât de près ou de loin à ces stridences, au son crissant que l'on peut entendre à l'intro de "Never understand" , ou sur l'insolent et ébouriffant triptique que constituent "The Living End", "In A Hole" et "Taste The Floor". Heureusement, quelques midtempos à tomber (" Cut Dead", "It's So Hard") - ce qui serait bientôt la marque de fabrique du groupe- parsemaient intelligemment le disque pour amortir l'uppercut.

Pour quiconque n'avait jamais entendu Etienne Daho chanter sous fond de perceuses électriques, le premier disque pop estampillé vrilleur de tympans serait un choc.

En bref : le Velvet de White Light...à la rencontre de chansons pop ultimes. Psychocandy ou le crossover parfait et antidote nécessaire aux années bling bling gangrénées par MTV.





"The Living End" :

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