22 août 2007

The Beta Band - The Beta Band (1999)

Vilain petit canard commercial et critique de la géniale discographie des Beta Band, l' ALBUM éponyme fut même rejeté par ses géniteurs, le traitant à l'orée de sa sortie de "Fucking awful"! Pourtant c'est celui ci qui accusa le plus ma curiosité et qui me pousse à vous faire découvrir un groupe à part, à mille lieues des rayons de disque destinés à remplir les poches des majors. Je sauverai ce disque!

D'origine écossaise, Stephen Mason, Robbin Jones, Josh Maclean et Richard Greentree créent en 1997 une musique psyché délirante et pop, ardue à définir. Pour les références c'est Syd Barett jouant avec les Beatles, c'est Beck chantant du Pink Floyd ou encore Eels tapant le carton chez les Beach boys. Du carton il doit sûrement en être question, ou plutôt du toncar pour soutenir leurs cigarettes qui ne doivent pas contenir que du tabac. Car il ne faut pas se leurrer, ce rock hallucinogène est avant tout destiné à accompagner les douces rêveries d'un auditoire enfumé et mélancolique.

Foutoir de génie, ou non, The Beta Band anime telles des marionnettes une fanfare électronique qui se dérobe sans cesse sous nos oreilles. On pense savoir où l'on en est, ok c'est du hip-hop (The Beta band rap), et puis merde c'est de la pop (It's not too beautiful), le passage se faisant généralement en une chute libre de notes dissonantes et perturbantes mais si généreusement accompagnatrices. "It's not too beautiful" justement, le plus singueulisable morceau de l'album s'il en est, transporte très loin grâce à sa pop nappée et atmosphérique. Ca en serait presque beau bordel. Comment peut-on abandonner ce morceau? Je ne comprends pas.

"Dance o'er the border", excellentissime selon moi, sorte de dub hip hop électronique, break dance sous acide qui pourrait aisément envoyer la clique à la clinique si un psy écoutait ça. Et puis il y a "BrokenUpADingDong", folk exalté d'une bande de hippies narcoleptiques. "Round the bend" c'est les Byrds qui rencontrent Radiohead, du n'importe quoi je vous dis!

Vous l'aurez compris, The Beta Band est un album à vivre ou à laisser, euphorique et planant, qui suppose d'accepter le fait de s'embarquer dans une grande fresque épique et droguée, lorsque la créativité psychédélique arrive à accoucher d'un son original et allumé. Non The Beta Band n'est pas un groupe Lambda. Non The Beta Band ne bande pas. Clairement hallucinant.


En bref: The Beta Band ou la folie incontrôlable au service de chansons planantes et obsédantes. A prendre ou à laisser, selon l'humeur et le degré de high du moment.





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20 août 2007

Entretien avec Nicolas Maslowski (Makasound)

Depuis quelques temps le label français Makasound remet au goût du jour des albums de reggae méconnus ou qui ne sont plus édités. Il porte aussi de nombreux projets avec des artistes comme Earl "Chinna" Smith ou Winston McAnuff. Pour en savoir plus sur cette maison hexagonale atypique, rencontre avec Nicolas Maslowski, un de ses créateurs.

Quand le label Makasound a-t-il été créé ? Par qui ? Dans quel objectif ?

Nicolas Maslowski : Le label s’est monté fin 2001, et le premier disque est sorti en mars 2002. C’était l’album de Winston McAnuff « Diary of the silent years ». Nous avons monté le label à deux – Romain et moi – suite à l’impossibilité de trouver un label assez couillu pour sortir cet album de Winston. Les maisons de disques nous disaient « il n’est pas connu », « il est trop vieux », etc…donc nous l’avons sorti nous-mêmes. C’est comme cela que tout à commencé. Donc le premier objectif était de sortir « Diary of the silent years ». Dès lors, nous avons réfléchi à la suite.

Quel est le principe directeur du label ? A quels impératifs vous tenez-vous ?

Le principe était donc de sortir des albums rares de roots, si possible inédits, mais en tout cas des trucs killers qu’on kiffait dans ma collection d’albums vinyles. De la grosse musique. Les premiers impératifs sur Makasound étaient donc de sortir de la bonne musique roots jamaïcaines, antérieures à 1984 (l’ère digitale). Je crois qu’on s’y est bien tenus sur l’ensemble de la collection Makasound qui compte aujourd’hui près de 20 références, le dernier en date étant The Slickers « Break Through ». Puis par la suite nous avons lancé d’autres labels, ou plutôt des collections comme Inna de Yard, Black Eye, ou encore Makafresh. Les différentes collections sont clairement individualisées sur http://www.makasound.com/. Tout ces noms embrouillent un peu les gens.

La série "Inna da yard" est l'un de vos projets que j'apprécie le plus, comment êtes-vous rentrés en contact avec Earl "Chinna" Smith pour enregistrer dans son yard ?

L’idée de la collection Inna de Yard m’est venue à Paris, en réfléchissant à comment produire des albums à coût réduits. La production d’album coûte cher, et nous n’avions pas les moyens de louer des studios,et tout ce que cela inclus comme dépenses. Comme nous voulions aussi produire des albums acoustiques, l’un dans l’autre Inna de Yard correspondait bien. Au départ, l’idée était d’aller de yard en yard, chez chaque chanteur qui aurait adhéré au projet. Puis j’ai exposé le projet à Winston pour voir ce qu’il en pensait. C’est lui qui m’a aiguillé vers Chinna, me disant que l’idéal serait de le faire chez lui puisqu’il a un home studio très basique mais qui suffirait. Quelques mois après nous étions en Jamaïque pour enregistrer quelques overdubs pour l’album de Winston avec Camille Bazbaz, « A Drop ». Chinna était au studio Harry J pour poser des guitares. Je lui ai exposé l’idée en 5 minutes et il a été directement emballé. Nous avons commencé la semaine suivante avec lui et avec Kiddus I. Puis Linval Thompson , Cedric Myton des Congos (avant qu’ils ne se réunifient), Ras Michael Jnr, The Viceroys, et Junior Murvin (http://www.innadeyard.com/ ). Nous avons en boite un Mighty Diamonds , un Prince Alla et encore plus de surprises.

Comment contactez-vous les autres légendes jamaïcaines que vous faites enregistrer ?

Depuis cinq années que nous nous rendons en Jamaïque plus sieurs fois par an, nous avons tissé une toile de contacts, notamment grace à Winston mcAnuff, mais aussi par nous-mêmes. Nous commençons à être connus sur place et il y a même des artistes qui nous sollicitent pour différents projets des quatre labels. Mais nous allons à notre rythme, et en fonction de nos envies.

Travaillez-vous entre la France et la Jamaïque ? Comment cela se passe ?

Nous sommes basés en France, à Paris, mais nous allons de une à trois fois par an en Jamaïque, principalement à Kingston. Il est possible qu’un de ces jours nous ayons un bureau là-bas, mais ça n’est pas encore fait.

A l'écoute de vos productions, on peut percevoir un choix, me semble-t-il, pour un reggae très acoustique et épuré, pourquoi ce choix ?

Ce choix était un parti prix de la collection Inna de Yard, retrouvez les chansons telles qu’elles ont été crées : le plus souvent avec une guitare et une voix. C’est en effet un choix délibéré. Nous voulions enregistrer des albums acoustiques, des disques apaisants comme celui de Kiddus I.

Pourquoi le choix aussi d'un reggae plutôt roots ?

Tout simplement parce que c’est celui que nous aimons le plus. Nous ne sommes pas du tout fermés aux musiques nouvelles, d’où qu’elles soient, mais le reggae roots nous touche particulièrement. J’adore Sizzla ou Group Home. On écoute plein d’autres musiques mais celle-ci est si particulière, unique et très sincère.

Quelle est la démarche pour rééditer un classique du reggae (je pense notamment à Alton Ellis) ? Surtout lorsqu'on est un label indépendant comme le votre ?

La démarche est assez simple : contacter l’artiste et/ ou le producteur du disque, puis se mettre d’accord avec lui. Par exemple pour Alton Ellis on est passé directement par lui après avoir été recommandé par Leroy Brown. Et quand j’ai contacté Leroy Brown (dont Willi Willaims m’avait donné le contact suite à notre déception de ne pouvoir sortir le Messenger Man puisque le deal était bouclé avec Blood & Fire), il s’est d’abord renseigné sur nous avant d’accepter d’avancer sur quoi que se soit. On a gagné une belle confiance de la part des ces artistes. Mais chaque projet est différent, comme chaque personne.

Que penses-tu du marché de la musique reggae ? En forme ou végétatif ?

Je pense que le marché du reggae est stable, en France du moins, mais qu’il reste faible par rapport au potentiel de cette musique. Il l’est depuis le début, depuis 1977 ou 78 où Marley a explosé, depuis que Gainsbourg à sorti ces deux albums reggae et que Bernard Lavilliers y a touché aussi. Mais je pense en même temps qu’il est dans une forme végétative, parce que trop mis à l’écart par rapport à son envergure. Bob Marley est le plus gros back catalogue d’Universal ! Et puis après tout dépend ce qu’on appelle reggae, ou ce qu’on met dans cette catégorie. Bob Marley est toujours le baobab qui cache la foret. Amener Winston la où il est aujourd’hui a été un vrai combat, et qui est loin d’être fini. Mais globalement le reggae souffre d’une mauvaise image, d’une image totalement fausse que les médias généralistes entretiennent : spliff, cocotier et nonchalance, ou homo phobie par exemple. On le présente toujours de manière idiote, comme une musique simple, peu créative et qui ne s’écoute que l’été, ou on le pointe du doigt pour dire : Attention, c’est dangereux, ils sont homophobes, ou ils sont racistes, ou encore ils fument de l’herbe, etc…je pense que c’est son coté radical, unitaire et sans concession qui fait peur, mais c’est dur à dire. Parfois quand je lis certains trucs (je pense notamment à l’article de V Mortaigne paru dans le monde il y a quelques mois) ou que j’entend des discours sur le reggae, j’ai envie de m’arracher les cheveux. A la télévision par exemple, en France, un rasta ne peut être que comique ; je pense la à une récente pub Fiat qui faisait référence à Rasta Rocket, ou à la rediffusion de la prestation de Nuls à l’occasion de la présence de Burning Spear sur un plateau de Canal +. Il a du être atterré. Même les quelques fois où Winston est allé sur des plateaux, j’ai entendu des phrases qui dépassent l’entendement. Déjà aucun d’entre eux n’est capable de prononcer son nom correctement, et je pense que c’est inadmissible de la part de journalistes. Mais aujourd’hui on tolère tout. D’ailleurs, il n’y a presque plus de journaliste dignes de cet appellation.
En même temps, tout le marché baisse aujourd’hui. Même pour nous sur notre petite niche. C’est pour cela que nous cherchons d’autres moyens de diffusions, comme par exemple la vente en ligne sur notre ite http://www.makasound.com/. Ca n’est ouvert que depuis quelques mois, en réaction…pour ne pas arrêter.

Peux-tu me citer L'ALBUM reggae MYTHIQUE pour toi ?

AAHHHH. C’est dur, un seul ? C’est pas possible. Il y a plusieurs Dennis Brown, probablement un Johnny Osbourne, L’album de Knowledge produit par Tapper Zukie, le « Messenger Man » de Willi Williams, « Forward on to Zion » de Abyssinians. Il y a plein de gros albums fondamentaux comme « War inna Babylon » de Max Romeo ou « Hail H.I.M » de Spear et puis il y a aussi plein de perles rares, comme par exemple le Mighty Three’s…

Propos recueillis par fabien.


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19 août 2007

Elvis Costello - Théâtre de Fourvières (Lyon) - 26/07/07

J'ai vu Elvis: il n'est pas mort comme on le prétend ! Trève de plaisanteries, car l'autre, le vrai (à l'état civil !), le King sera célébré comme il le mérite cette année !

Non, je veux parler bien sûr du plus célèbre binoclard du rock aux côtés de Buddy Holly ou autre Hank Marvin, le bien nommé Elvis Costello alias Napoleon Dynamite, the Emotional Toothpaste (eh oui!), the Man (rien que ça !), the Coward Brother ou bien plus sûrement Declan Mc Manus (son véritable patronyme)-c'est vrai que ça le faisait moins...

Arrivés une demi-heure avant l'ouverture de la billeterie en ce 26 juillet au théâtre de Fourvières, je remarque dans la famélique file d'attente qui se presse pour l'instant 3 choses qui me vexent: 1) ladite file d'attente confirme que Costello ne joue pas à guichets fermés, pure aberration en soi pour un tel artiste qui ne s'est pas produit en France depuis près de 10 ans 2) son nom, contrairement à Gad Elmaleh, ne figure même pas sur le long listing des artistes appelés à fouler le festival lyonnais 2007 3) les appareils photos sont proscrits, en revanche les portables (grosse hypocrisie), no soucy !!

Qu'à cela ne tienne, après avoir vérifié la servitude toute aussi jeune que tâtillone du personnel lisse et coincé du derche des placettiers (si!si!) du théâtre, Nini et moi investissons comme à notre habitude le premier rang du riquiqui hémicycle dont la scène, heureuse surprise est au même niveau, c'est-à-dire que pas de fosse, rien ! Comme le staff de Fourvières ne rigole pas, c'est assis en tailleur et pas bouger ! que nous attendons l'arrivée de The Man ! Particulièrement fébrile à l'idée de cette rencontre, je me suis déjà imaginé, en m'avançant mater le tracklisting, Elvis en personne dissimulé avec son chapeau derrière un ampli. Hélas ce n'était qu'un projo dont la mise en mouvement soudaine me fait rire silencieusement! Pugnaces, nous osons une bière servie par un saisonnier au pédigrée de barman bac moins 1 (même moi je mets moins de mousse !!) : peine perdue, elle est infame !

A 21H30 tapantes, et alors que l'enceinte s'est remplie jusqu'à la gueule, c'est avec beaucoup d'émotion que je vois arriver Costello. Cette excitation est partagée par la jeune fille d'à côté venue avec une poche pleine de 45t vintage de l'Homme, promise à une future dédicace. Elvis est suivi de son backing-band de ryhthm&blues (4 blacks infernaux aux cuivres !), un 2ème guitariste, section rythmique et bien sûr monsieur Allen Toussaint prenant place au piano à queue. Bien que tirant ostensiblement la gueule, l'incomparable Steve Nieve des Attractions (légendaire backing-band du Maître) est à l'orgue ! Physiquement méconnaissable avec sa barbe de loup de mer, Nini lui décerne le titre de sosie de l'été ; c'est un private joke dont nous rions beaucoup !

Ouane, tou, frit, fore et ça démarre chaloupé, swinguant tout ce qu'on veut : l'ensemble de The River In Riverse son dernier effort partagé avec Toussaint est à l'honneur, mais très vite, Elvis sensible à l'enthousiasme des premiers rangs -où il se balade à la coule micro en main- revient en scène et d'un geste nous incite à nous rapprocher ! Les crampes naissantes (remember position en tailleur !) et l'excitation palpable sont autant d'éléments déclencheurs ! Elvis Costello est en grande forme ! Son vibrato si caractéristique, sa voix magnifique est aussi puissante qu'il y a 30 ans, témoins ces quelques essais a capella que peu de rockers de sa génération iraient se permettre ! Avec son jeu de guitare si minimaliste mais unique en son genre, Elvis balance son nouvel album donc, entremèlé de vieilles scies revisitées à la sauce New Orleans !

Comme prévu sur le tracklisting, nous avons droit à un "Pump It Up"d'anthologie, un "Watching The Detetctives", reggae séminal d'abord méconnaissable et à moult titres de Get Happy (normal, album d'obédience northern soul).

Le meilleur est à venir; ravi de l'accueil qui lui est fait, Elvis Costello légèrement empâté dans sa silhouette mais toujours dépositaire de cette patine de songwriter de génie (aucun rapport il est vrai !) oscille entre francs traits d'humour à la Woody Allen ("Il est sympa ce théâtre, il sera encore plus beau une fois qu'il sera terminé !") et moment d'émotivité pure : cette reprise d' I Want You, l'un de ses plus beaux morceaux, avec le seul Nieve au piano, lors du rappel ! Un rappel particulièrement goutu puisqu'il nous offre outre cette déchirante ode amoureuse, un brelan de titres dont l'imputrescible "Alison", entoné par tout un théâtre en fusion !

Alison, souvenez-vous, suckers, c'était il y a 30 ans : "A-a-a-a-a-a-a-a-lisooooooon ! My aim is true" qui donnait son titre à son légendaire premier LP, une époque où des artistes aussi essentiels que les Specials, Joe Jackson, Damned, Clash ou Wire sortaient leurs premiers disques, époque du punk mais déjà annonciateur du ska et de la new-wave !

Ultime retour avec le groupe au complet où il semble qu'enfin le service d'ordre très raide du string se détende peu à peu, leur chef finissant même par esquisser un sourire !

Ah, j'oubliais ! La jeune fille a eu droit en plein morceau à son barbouillage de pochettes de la part d'un Costello énamouré et particulièrement jovial il est vrai, l'henaurme section cuivres se disperse dans la nuit en tapant des mains complices ! Tout n'est qu' amour !

Le public constitué d'autant de néophytes que de fans de la première heure s'en va rassasié et heureux ! Restent 2 heures de route à se fader après un interminable circuit glauque (travaux à la bretelle d'accès de l'autoroute) dans l'univers de la prostitution lyonnaise ! Ce soir, je n'ai peut-être pas vu Dieu mais Elvis était là ! Et j'y étais !






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